Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 janvier 2018, Mme C...représentée par Me D..., demande à la cour :
1) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 décembre 2017 ;
2) d'annuler l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 7 juillet 2017 ;
3) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire, sur le fondement des articles L 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours suivant la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît le 7°) de l'article L 313-11 et l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;
- cette décision méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 mars 2018, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun moyen n'est fondé.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la convention internationale des droits de l'enfant,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- la loi n° 91-641 du 10 juillet 1991,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de présenter des conclusions à l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Brisson,
Considérant ce qui suit :
1. MmeC..., née le 28 mars 1970 en Arménie, de nationalité arménienne et russe, déclare être entrée en France le 21 février 2012 afin de solliciter la qualité de réfugiée. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 11 avril 2012 confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 janvier 2013. Sa demande ultérieure d'admission au séjour pour raisons médicales a été rejetée par le préfet d'Indre-et-Loire le 13 février 2013. Le tribunal administratif d'Orléans, le 17 avril 2014, puis la cour, le 29 septembre 2015, ont rejeté le recours présenté par l'intéressée contre cette décision. Par une décision du 3 avril 2013, le même préfet a refusé de faire droit à la demande de Mme C...de délivrance d'un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'enfant malade. Le 6 mars 20017, l'intéressée a présenté une nouvelle demande de titre de séjour sur le fondement du 7°) de l'article L 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers laquelle a été rejetée par le préfet aux termes de l'arrêté en litige du 7 juillet 2017. Mme C...relève appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République." et, aux termes de l'article R. 313-21 de ce code, " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ".
3. Mme C...se prévaut de la durée de sa présence en France depuis 2012 et de ce qu'elle déploie des efforts pour s'y intégrer se traduisant tant par son apprentissage de la langue française que par sa participation à des activités bénévoles et le suivi de formations à finalité professionnelle. Toutefois, étant au demeurant hébergée chez un tiers et dépourvue de ressources propres, elle ne justifie pas, par ces seuls éléments, d'une intégration particulière dans la société française.
4. Par ailleurs, à supposer même qu'elle est séparée de son compagnon, père de ses enfants, lequel est lui-même destinataire d'un arrêté portant refus de titre de séjour, la requérante, qui s'est soustraite à deux reprises à l'exécution des arrêtés pris à son encontre par le préfet d'Indre-et-Loire les 13 février et 3 avril 2013, n'établit ni qu'elle serait dépourvue d'attaches en Arménie ou en Russie, pays dans lesquels elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans, ni qu'elle ne pourrait reconstituer son noyau familial hors du territoire national.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
6. En l'espèce, il est constant que les deux enfants de MmeC..., nés en 2001 et en 2003, sont scolarisés en France depuis 2012 , l'aînée étant, à la date de la décision en litige, en seconde et le benjamin en 3ème. A supposer même que, comme l'allègue l'intéressée, ses deux enfants, nés et ayant vécu en Russie jusqu'à leur départ pour la France, n'y auraient pas été scolarisés, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, que ceux-ci ne pourraient poursuivre leur scolarité en Arménie ou en Russie, pays dans lequel ils ont vécu plusieurs années. En tout état de cause, la décision n'a ni pour objet ni pour effet de séparer les enfants de la requérante.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (....) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
8. En dernier lieu, Mme C...ne peut se prévaloir utilement de la circulaire du 28 novembre 2012, laquelle est dépourvue de caractère réglementaire.
9. Par suite, le préfet d'Indre-et-Loire n'a, en refusant de délivrer à Mme C...un titre de séjour, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " -1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). Eu égard aux conditions du séjour de Mme C...et de ses enfants sur le territoire national rappelées ci-dessus, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige méconnaît ces stipulations.
En ce qui concerne le pays de destination :
11. En faisant valoir qu'elle est exposée à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Arménie, Mme C...doit être regardée comme ayant entendu invoquer la méconnaissance par le préfet de l'article 3 de la même convention. Cependant, elle ne produit aucun élément probant au soutien de ses allégations. Dans ces conditions le moyen ne peut qu'être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. Le rejet des conclusions à fin d'annulation n'impliquant aucune mesure particulière d'exécution, les conclusions présentées par Mme C...sur le fondement des articles L 911-1 et L 911-3 du code de justice administrative ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme C...au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez président
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M.A...'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique le 9 novembre 2018.
Le rapporteur,
C. BRISSONLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT00275 2
2