Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2017, M.C..., représenté par Me Bascoulergue, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 17 octobre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre à la commune de Vertou de lui " délivrer la confirmation d'un permis de construire tacite " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande de permis de construire, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Vertou, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens ainsi qu'une somme du même montant au titre des frais de même nature exposés en appel.
Il soutient que :
- le maire ne pouvait fonder son refus de permis en se fondant sur l'implantation et les caractéristiques de la construction projetée dès lors qu'il bénéficie d'un certificat d'urbanisme positif, devenu définitif, qui lui confère des droits acquis en ce qui concerne l'implantation de son projet dans le secteur concerné ; le plan de prévention des risques d'inondation approuvé en 1998, soit antérieurement à la délivrance du certificat d'urbanisme, ne peut désormais lui être opposé ; il n'appartient pas au maire de rectifier les erreurs matérielles alléguées dont serait entaché ce plan ; les dispositions de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme ont ainsi été méconnues ;
- le motif de fait tenant à la situation du terrain d'assiette du projet majoritairement en zone inondable est matériellement inexact ;
- eu égard à la différence de niveau entre le plancher de la construction projetée, dont la partie arrière est disposée sur pilotis, et la cote de la Sèvre Nantaise, en estimant qu'il existait un risque pour la sécurité des personnes et une atteinte au champ d'expansion des crues, le maire a commis une erreur d'appréciation ;
- le maire ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, se fonder sur les risques induits par la multiplication de projets et de remblais similaires dès lors que le projet doit être apprécié de façon intrinsèque et spécifique et non par rapport à d'autres projets extérieurs ;
- le maire, qui ne s'est pas livré à un examen propre du projet, a entaché son arrêté d'incompétence négative ;
- en ne mettant pas à même le pétitionnaire de justifier d'éléments qui auraient permis la délivrance d'un permis avec prescriptions, relatives à la hauteur et aux conditions de construction, les services instructeurs de la commune et le maire ont commis une erreur de droit.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2018, la commune de Vertou, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens ainsi qu'une somme du même montant au titre des frais de même nature exposés en appel.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- les observations de MeD..., substituant MeF..., représentant M. C...et les observations de MeB..., substituant MeE..., représentant la commune de Vertou.
Considérant ce qui suit :
1. M.C..., propriétaire de la parcelle cadastrée DK 106, située 23 route de Pont Caffino sur le territoire de la commune de Vertou (Loire-Atlantique), a sollicité la délivrance d'un permis de construire une maison d'habitation sur cette parcelle. Par un arrêté du 30 juin 2015, le maire de Vertou, se fondant sur l'article R. 111-2, alors en vigueur, du code de l'urbanisme, a refusé de lui délivrer l'autorisation sollicitée au motif que le projet était de nature à porter atteinte à la sécurité publique. M. C...relève appel du jugement du 17 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire du Vertou du 30 juin 2015.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le motif du refus opposé à la demande de permis :
2. L'article R. 111-2, alors en vigueur, du code de l'urbanisme dispose : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ". Pour opposer un refus à la demande de permis déposée par M.C..., le maire de Vertou a relevé, d'une part, qu'alors que le terrain d'assiette est majoritairement inondable et que sa partie inondable est, en grande partie, submersible par plus d'un mètre d'eau en cas de crue centennale, cette hauteur de submersion conjuguée à la vitesse du courant présente un risque pour la sécurité des occupants et, d'autre part, que le projet contribue à réduire le champ d'expansion des crues.
3. En premier lieu, la seule circonstance que le niveau de plancher de la construction projetée se situe légèrement au dessus de celui de la route de Pont Caffino, laquelle n'a pas été classée en zone inondable, dessert plusieurs constructions et supporte divers réseaux, ne permet pas de démontrer que la construction envisagée serait implantée en dehors de la partie inondable du terrain d'assiette du projet. Il ressort au contraire des pièces du dossier et notamment des données topographiques issues du modèle numérique de terrain 2010 (Litto 3D) ainsi que des relevés topographiques et altimétriques figurant dans le rapport du géomètre expert établi le 18 décembre 2017, que le projet est compris dans la partie inondable de la parcelle, située au pied d'un talus de 2,57 mètres. Ainsi, M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en estimant que le projet était implanté dans la partie inondable de l'unité foncière constituant son terrain d'assiette, le maire se serait fondé sur des faits matériellement inexacts.
4. En deuxième lieu, s'il est constant que la parcelle sur laquelle le projet est implanté, distante d'environ 140 mètres du lit mineur de la Sèvre Nantaise, n'a pas été classée par le plan de prévention des risques d'inondation de la Sèvre Nantaise, adopté le 3 décembre 1998, dans une zone soumise à un risque, il ressort tant du courrier du préfet de la Loire-Atlantique, adressé le 28 novembre 2014 au maire de la commune de Vertou, que de l'avis du 26 juin 2015 du directeur départemental des territoires et de la mer, recueilli par le maire dans le cadre de l'instruction de la demande de permis, que cette absence de classement résulte d'une erreur dans les références cadastrales utilisées. Il ressort de ces mêmes documents que de nouvelles investigations, réalisées au moyen notamment d'un modèle numérique de terrain plus précis, ont fait apparaître que l'unité foncière concernée, à proximité de laquelle se trouve un repère de crue faisant état d'une cote des plus hautes eaux connues de 8,16 mètres NGF/IGN, correspondant à la crue survenue en 1983, est en partie submersible par plus d'un mètre d'eau. En outre, il n'est pas contesté que le régime semi-torrentiel de la Sèvre Nantaise se traduit par une vitesse d'écoulement élevée et le transport d'embâcles. Dans ces conditions, alors même que le projet prévoit la surélévation de la maison par rapport au terrain naturel de sorte que les pièces habitables se situent au dessus du niveau des plus hautes eaux connues, l'intégrité même du bâtiment et, par suite, la sécurité de ses occupants, est susceptible d'être compromise. De surcroît, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet, qui, ainsi qu'il a été dit, connaît un fort dénivelé, de l'ordre de 3,47 mètres, constitue un champ d'expansion des crues. Contrairement à ce que soutient le requérant, le bâtiment projeté, en dépit d'un système de fondations sur vide sanitaire et, pour partie, sur pilotis, ainsi que les remblais prévus pour, d'une part, faciliter l'accès depuis la route du Pont Caffino et, d'autre part, aménager un espace de stationnement, sont de nature à réduire ce champ. Dès lors, alors même que la parcelle d'assiette du projet en cause est classée par le plan local d'urbanisme dans une zone urbaine constructible et que d'autres constructions auraient été autorisées à proximité du projet, en refusant de délivrer le permis de construire sollicité au motif que le projet était de nature à porter atteinte à la sécurité publique, le maire de Vertou n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
5. En dernier lieu, d'une part, il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté contesté que le maire se serait fondé sur les risques potentiellement induits par la multiplication de projets similaires au projet litigieux. En tout état de cause, la circonstance que, ainsi que l'a relevé le directeur départemental des territoires et de la mer dans son avis du 26 juin 2015, le phénomène de réduction des champs d'expansion des crues, dont il résulte une élévation de la ligne d'eau, est lié à la nature et au nombre des constructions implantées dans ces champs, figure parmi les considérations générales que le maire peut légalement prendre en compte lorsqu'il statue sur une demande de permis de construire. D'autre part, alors que les services instructeurs n'étaient pas tenus de mettre M. C...à même de modifier son projet de manière à le rendre conforme à la réglementation d'urbanisme, le requérant n'apporte aucun élément précis de nature à démontrer que de simples prescriptions spéciales auraient pu prévenir les risques engendrés par le projet. Ainsi, le maire de Vertou n'a pas entaché son arrêté des erreurs de droit alléguées.
En ce qui concerne le certificat d'urbanisme :
6. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / (...) ".
7. Si ces dispositions ont pour effet de garantir un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée durant les dix-huit mois qui suivent la délivrance d'un certificat d'urbanisme, quel que soit son contenu, examinée au regard des dispositions d'urbanisme applicables à la date de ce certificat, à la seule exception de celles qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique, elles n'ont pas pour effet de justifier la délivrance d'un permis de construire en méconnaissance des règles d'urbanisme légalement applicables à cette date ou sur le fondement d'une appréciation erronée.
8. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient M.C..., le certificat d'urbanisme positif, qui lui a été délivré le 3 juillet 2014 sur le fondement des dispositions du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, ne lui confère aucun " droit acquis " à la délivrance d'une autorisation de construire dans le secteur concerné.
9. Pour le surplus, M. C...reprend en appel le moyen soulevé en première instance et tiré de ce que le maire aurait méconnu l'étendue de sa compétence. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions du requérant aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Vertou, qui n'est pas, dans la présente instance, ni dans celle de première instance, la partie perdante, la somme que demande M. C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du requérant le versement à la commune de Vertou d'une somme totale de 2 500 euros au titre des frais exposés par elle en première instance et en appel.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : M. C...versera à la commune de Vertou la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à la commune de Vertou.
Délibéré après l'audience du 25 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président assesseur,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 octobre 2018.
Le rapporteur,
K. BOUGRINE
Le président,
A. PEREZLe greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03867