Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrée le 20 juin 2016 et le 22 février 2018, Mme F...C..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 avril 2016 ;
2°) de rejeter la demande de l'association " Les amis du golfe du Morbihan " présentée devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de l'association " Les amis du golfe du Morbihan " le versement de deux sommes de 3 000 euros au titre des frais de procédure de première instance et d'appel sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sa requête d'appel est recevable dès lors, notamment, qu'elle n'est pas tardive et que les formalités prévues à l'article R.600-1 du code de l'urbanisme ont été respectées ;
La requête de première instance de l'association " Les amis du golfe du Morbihan " était, en application des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, irrecevable faute de comporter de conclusions tendant à l'annulation du permis de construire querellé ;
les premiers juges ont retenu le moyen tiré de l'exception d'illégalité du plan local d'urbanisme alors que l'association requérante n'avait pas soulevé le moyen tiré de ce que le permis contesté méconnaissait les dispositions du document d'urbanisme immédiatement antérieur et remis en vigueur ; ils ont, ce faisant, statué " ultra petita " ;
le terrain d'assiette du projet, qui ne se situe pas en zone humide, n'a donc pas à être classé en zone Nds dans le plan local d'urbanisme, de sorte que son classement en zone 1AUh n'est entaché d'aucune illégalité et le moyen tiré de l'exception d'illégalité auquel le jugement attaqué a fait droit n'est pas fondé ;
le permis de construire n'était pas contraire au règlement de la zone NC du plan d'occupation des sols de la commune de Baden, remis en vigueur, dès lors que l'article NC 1 autorise " l'édification de constructions directement liées et nécessaires aux activités de la zone " ainsi que " l'extension des constructions abritant des activités industrielles, artisanales ou commerciales existantes " et que le terrain d'assiette, qui n'est pas situé dans un espace remarquable au sens de la loi " Littoral ", ne présente pas d'intérêt environnemental ; qu'il se situe, en revanche, dans une partie largement urbanisée ;
le plan d'occupation des sols de la commune de Baden adopté le 7 juin 2000 et remis en vigueur est, en tout état de cause, illégal en tant qu'il classe la parcelle cadastrée section ZV n°133 en zone NCa.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2016, l'association " Les amis du golfe du Morbihan ", représentée par Me I..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés et que le permis de construire contesté méconnaît les dispositions de l'article NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Baden, remis en vigueur.
Par un mémoire, enregistré le 12 mars 2018, la commune de Baden, représentée par la SELARL Lahalle D...(LEXCAP) s'en remet à la sagesse de la cour.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...'hirondel,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeG..., substituant MeB..., représentant MmeC..., de MeI..., représentant l'association " Les amis du golfe du Morbihan ", et de Me D..., représentant la commune de Baden.
1. Considérant que Mme C...relève appel du jugement du 21 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé, à la demande de l'association " Les amis du golfe du Morbihan ", l'arrêté du 22 août 2013 par lequel le maire de Baden lui a délivré un permis de construire en vue de l'extension d'une résidence hôtelière avec création de douze logements, sur une parcelle cadastrée section ZV n° 118, devenue ZV n°133, située route de Toulvern sur le territoire de la commune ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que, pour annuler le permis contesté, les premiers juges, après avoir relevé qu'en raison des annulations pour excès de pouvoir des délibérations du 11 février 2008 et du 5 novembre 2012 approuvant respectivement le plan local d'urbanisme et la modification de ce plan, la parcelle d'assiette du projet en litige, ne se trouvait plus classée en zone UBa du plan local d'urbanisme mais en zone agricole NCa1, ont considéré que le permis de construire en litige, qui autorise l'extension d'une résidence hôtelière avec création de douze logements, est devenu illégal au regard des dispositions des articles NC 1 et NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols antérieur applicables à la zone agricole ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'association " Les amis du golfe du Morbihan " n'avait pas soulevé devant les premiers juges l'illégalité de ce permis de construire au regard des dispositions des articles NC 1 et NC 2 du règlement dudit plan d'occupation des sols ; qu'ainsi, Mme C...est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;
3. Considérant qu'il y a lieu de statuer, par la voie de l'évocation, sur la demande présentée par l'association " Les amis du golfe du Morbihan " devant le tribunal administratif de Nantes ;
Sur la recevabilité de la demande de l'association " Les amis du Morbihan " :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La requête (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. " ;
5. Considérant qu'il ressort des énonciations de la demande, que l'association " Les amis du golfe du Morbihan" a saisi le tribunal administratif du litige l'opposant à la commune de Baden, né du rejet, par une décision du 21 octobre 2013, du recours gracieux qu'elle lui avait adressé en vue d'obtenir l'annulation du permis de construire accordé le 22 août 2013 à Mme F...C...pour l'extension d'une résidence de tourisme sur la parcelle cadastrée section ZV n° 118 et ajoute qu'elle souhaite contester " la décision prise par M.E... " ; que la demande est accompagnée des copies du permis de construire litigieux et du courrier du 17 octobre 2013 par lequel l'association avait informé Mme C... de l'existence de ce recours en lui en adressant une copie ; que la demande présentée devant le tribunal administratif tend ainsi manifestement à obtenir l'annulation de ce permis de construire ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que la demande de l'association serait irrecevable pour ne pas contenir de conclusions tendant à l'annulation du permis de construire ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur " ; que, si un permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation ; que, par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut, ni à demander l'annulation de ce permis par voie de conséquence de celle du document sur le fondement duquel il a été accordé ; que, cependant, il résulte de l'article L. 121-8, devenu L. 600-12 du code de l'urbanisme, que l'annulation pour excès de pouvoir d'un document d'urbanisme a pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur ; que, dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme annulé - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur ;
7. Considérant que par un jugement du 7 juillet 2011, confirmé sur ce point par un arrêt devenu définitif de la cour du 28 juin 2013, le tribunal administratif de Rennes a annulé la délibération du conseil municipal de Baden du 11 février 2008 approuvant le plan local d'urbanisme communal en tant notamment qu'il n'a pas classé en zone Nds le secteur classé en zone 1AUh s'étendant de Lann Vihan à La Lande Celino à l'ouest de la route départementale 316, et dans lequel s'inscrit la parcelle ZV n° 118, et a enjoint au maire de la commune de saisir le conseil municipal afin qu'il se prononce à nouveau sur le classement de ce secteur ; que, dans ces conditions, le conseil municipal, par une délibération du 5 novembre 2012, a modifié le plan local d'urbanisme, lequel a classé cette parcelle en zone UBa ; que le tribunal administratif, par un jugement du 17 juillet 2014, devenu définitif, a ensuite annulé cette délibération du 5 novembre 2012 en tant qu'elle classe les parcelles cadastrées section ZC n° 458 et ZV n° 118 en zone UBa ;
8. Considérant qu'après avoir invoqué l'illégalité des délibérations approuvant le plan local d'urbanisme, l'association " Les amis du golfe du Morbihan " soutient pour la première fois en appel que le permis de construire contesté méconnaît les dispositions du plan d'occupation des sols approuvé le 7 juin 2000 et remises en vigueur du fait des annulations successives prononcées par la juridiction administrative, évoquées au point précédent ; que la parcelle, assiette du projet litigieux, est classée dans le plan d'occupation des sols approuvé le 7 juin 2000 remis en vigueur en zone NC ;
9. Considérant, toutefois, que Mme C...soutient que l'association requérante ne saurait utilement se prévaloir du plan d'occupation des sols de la commune de Baden approuvé le 7 juin 2000 du fait de l'illégalité dont entaché le classement en zone NC ; qu'aux termes de l'article R.123-18 du code de l'urbanisme alors en vigueur : " I - Les documents graphiques doivent faire apparaître les zones urbaines et les zones naturelles. / (...) 2. Les zones naturelles, équipées ou non, dans lesquelles les règles et coefficients mentionnés ci-dessus peuvent exprimer l'interdiction de construire. / Ces zones naturelles comprennent en tant que de besoin : / (...) c) Les zones de richesses naturelles, dites "Zones NC", à protéger en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section ZV n°118 se rattache, au sud et à l'est à un vaste tènement naturel ; que si elle est située, à l'ouest et au nord, à proximité de parcelles bâties qui constituent un secteur d'urbanisation, il est constant qu'elle est en séparée par des routes qui forment une frontière entre la zone urbanisée et la zone naturelle ; que Mme C...ne peut utilement alléguer de ce que la parcelle supportait, à la date de la décision en litige, quatre constructions dès lors que celles-ci ont été édifiées postérieurement à l'adoption du plan d'occupation des sols remis en vigueur, suite à un permis de construire qui lui a été délivré le 6 novembre 2008 ; que si elle soutient, enfin, que la parcelle dont elle est propriétaire n'a aucune vocation agricole, il résulte des dispositions de l'article R. 123-18 du code de l'urbanisme alors applicables que le classement en zone agricole n'était pas subordonné à la valeur agricole des terres ; que, par suite, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que la parcelle cadastrée section ZV n°118 a pu être classée en zone NC ; que l'association " Les amis du golfe du Morbihan " est dès lors fondée à soutenir que la légalité du permis de construire contesté doit s'apprécier au regard des dispositions du plan d'occupation des sols approuvé le 7 juin 2000 ;
10. Considérant qu'aux termes du règlement de la zone NC du plan d'occupation des sols de la commune de Baden : " La zone NC est destinée à la protection des richesses naturelles en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol. / Elle comprend les secteurs : / NCa délimitant les parties du territoire affectées aux activités agricoles, sylvicoles, comprenant : / le sous-secteur NCa1 au Sud de la R.D. 101 (...) " ; qu'aux termes de l'article NC 1 relatifs aux occupations et utilisations du sol admises : " I. Sont admis / en secteur NCa / l'édification de constructions directement liées et nécessaires aux activités de la zone. / L'aménagement (...) ou l'extension des constructions abritant des activités industrielles, artisanales ou commerciales existantes. Toutefois, ces possibilités ne sauraient être admises dans le cas de constructions qu'il n'est pas souhaitable de maintenir ou de conforter en raison de leur situation, de leur nature ou de leur état général (...) / II. Sont admis sous réserve : / en secteur NCa : / (...) l'aménagement, la restauration ou l'extension mesurée des constructions existantes non directement liées et nécessaires aux activités de la zone à condition qu'ils se fassent en harmonie avec la construction originelle, que la hauteur reste limitée à celle de la construction originelle et que l'extension n'excède pas : / - 40 % par rapport à l'emprise au sol du bâtiment existant à la date de publication du P.O.S. (le 5 novembre 1981) et sans pouvoir dépasser 40 m² d'emprise au sol. / Toutefois, ces possibilités ne sauraient être admises dans le cas de constructions qu'il n'est pas souhaitable de maintenir ou de conforter en raison de leur situation, de leur nature, de leur état de dégradation ou de leur importance. (...) " ; qu'aux termes de l'article NC 2 relatif aux occupations et utilisations du sol interdites : " 1. Sont interdits : / (...) l'édification de constructions à usage de commerce, bureaux, services ou entrepôts ainsi que toute construction, même légère ou provisoire, non directement liée et nécessaire aux activités agricoles, aquacoles, sylvicoles ou extractives de la zone. /(...) l'édification de constructions à usage hôtelier (...) " ; que le projet autorisé par le permis de construire litigieux, à savoir l'extension d'une résidence hôtelière pour y créer douze logements, ne constitue pas une construction directement liée et nécessaire aux activités de la zone qui est protégée pour ses richesses naturelles en raison notamment de la valeur agricole des terres ou de la richesse du sol ou du sous-sol ; que s'il concerne l'extension d'un complexe hôtelier déjà existant en secteur NCa entrainant la création d'une surface de plancher de 457 m², il méconnaît les dispositions de l'article NC 1 du règlement de la zone qui limite à 40 m² l'emprise au sol en cas d''aménagement, de restauration ou d'extension des constructions existantes lorsqu'elles ne sont pas directement liées et nécessaires aux activités de la zone ; qu'une résidence hôtelière ne constitue pas, par ailleurs, une activité industrielle, artisanale ou commerciale au sens du règlement du plan d'occupation des sols, qui interdit dans la zone l'édification de constructions à usage hôtelier ; que, par suite, le permis de construire a été délivré en violation des dispositions de l'article NC 2 du règlement du plan d'occupation des sols remis en vigueur ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que l'association " Les amis du golfe du Morbihan " est fondée à demander l'annulation du permis de construire délivré par le maire de Baden le 22 août 2013 à MmeC... ;
12. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens invoqués par l'association " Les amis du golfe du Morbihan " n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder cette annulation ;
Sur les frais liés au litige :
13. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de Mme C...la somme que l'association " Les amis du golfe du Morbihan " demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par Mme C... soit mise à la charge de l'association " Les amis du golfe du Morbihan ", qui n'est pas la partie perdante ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 21 avril 2016 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 22 août 2013 par lequel le maire de la commune de Baden a délivré un permis de construire à Mme F...C..., ainsi que la décision du maire du 21 octobre 2013 rejetant le recours gracieux contre cet arrêté sont annulés.
Article 3 : Les conclusions de l'association " Les amis du golfe du Morbihan " tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C..., à l'association " Les amis du golfe du Morbihan " et à la commune de Baden.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président,
- M.A...'hirondel, premier conseiller,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 avril 2018.
Le rapporteur,
M. H...Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°16NT01980