Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 juin 2015, Mme D..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2015 ;
2°) d'annuler cette décision du 10 octobre 2013 ;
3°) d'accueillir favorablement sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, en ce que l'intéressée est sans ressource et à la charge exclusive de son père, qu'elle justifie de l'importance des versements effectués pour elle et son frère, que si les revenus de son père et de son épouse sont limités, ceux-ci sont en mesure de l'accueillir dans de bonnes conditions, qu'elle a consenti à se marier avec M. C...le 31 août 2014, sous la pression de la famille de son mari, alors qu'elle était livrée à elle-même et que ses propres parents n'en étaient pas informés et qu'elle reste ainsi toujours à la charge de ses parents.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet des conclusions à fin d'injonction et s'en remet à la sagesse de la cour quant au surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que la demande de première instance n'était pas devenue sans objet à la date de l'ordonnance attaquée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Millet.
1. Considérant que Mme D..., ressortissante malgache, relève appel de l'ordonnance du 20 avril 2015 par laquelle le président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 octobre 2013 par laquelle la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté sa demande de visa ;
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Considérant que si, postérieurement à l'introduction de la demande de Mme D... devant le tribunal administratif, le ministre a donné instruction à l'autorité consulaire à Tananarive de lui délivrer un visa de long séjour, retirant ainsi la décision contestée du 10 octobre 2013 de la commission de recours contre les refus de visas d'entrée en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce retrait aurait été notifié à l'intéressée dans des conditions de nature à faire courir le délai de recours contentieux et qu'ainsi, à la date à laquelle le président du tribunal administratif a statué, le 20 avril 2015, ce retrait serait devenu définitif ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le premier juge a constaté le 20 avril 2015 qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation du refus de délivrance de visa ; que cette ordonnance doit, dès lors, être annulée ;
3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Nantes ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, les décisions de refus de visa d'entrée en France, prises par les autorités diplomatiques ou consulaires, ne sont pas motivées sauf dans les cas où le visa est refusé à un étranger appartenant à l'une des catégories suivantes et sous réserve de considérations tenant à la sûreté de l'Etat : (... ) 2° Conjoints, enfants de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendants de ressortissants français et partenaires liés à un ressortissant français par un pacte civil de solidarité " ;
5. Considérant que la décision du 10 octobre 2013 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle repose ; que la circonstance qu'elle ne mentionne pas que la demande de visa de long séjour a été formée en qualité d'enfant de ressortissants français ne saurait caractériser une motivation insuffisante de cette décision ; que, par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté ;
6. Considérant, en second lieu, que pour rejeter son recours formé contre le refus de visa d'entrée en France en qualité d'enfant majeur à charge d'un ressortissant français, la commission de recours s'est fondée sur le fait que Mme D... ne démontrait pas être sans ressources et à la charge financière exclusive de son père, faute pour celui-ci de disposer de ressources suffisantes pour subvenir à ses besoins et l'accueillir ; que le ministre reconnaît toutefois dans ses écritures qu'à la date de la décision contestée, la requérante était à la charge de son père, ressortissant français ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la décision refusant à Mme D... un visa de long séjour en qualité d'enfant à charge d'un ressortissant français doit être annulée ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 de ce code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
9. Considérant qu'eu égard aux motifs de la présente décision, l'exécution de celle-ci n'implique pas nécessairement la délivrance d'un visa à Mme D... ; qu'il n'y a pas davantage lieu d'enjoindre, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, à l'autorité compétente de prendre à nouveau, après une nouvelle instruction, une décision concernant la demande présentée par Mme D..., dès lors que les autorités consulaires ont statué à nouveau sur la demande de la requérante par décision du 14 avril 2015 et qu'il était loisible à l'intéressée d'exercer un recours contre cette décision de refus auprès de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France ;
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme que Mme D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la 6ème chambre du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2015 et la décision du 10 octobre 2013 sont annulées.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 décembre 2016.
Le rapporteur,
J-F. MILLETLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT01958