Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 juin 2015, M. B...et MmeD..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes du 26 mai 2015 ;
2°) d'annuler ces arrêtés du préfet de la Loire Atlantique du 19 mai 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire Atlantique de les admettre au séjour au titre de l'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat au profit de leur avocat, à condition que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, une somme de 1500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les arrêtés de réadmission méconnaissent l'article 4 du règlement UE n° 604/2013 du 26 juin 2013 car ils n'ont pas reçu toutes les informations prévues dans une langue qu'ils comprennent ;
- ils méconnaissent l'article 19 du même règlement car ils ont quitté le territoire " Dublin " pendant plus de trois mois depuis leur demande d'asile en Pologne, de sorte que ce pays n'est pas responsable de leurs demandes d'asile ;
- ils méconnaissent les articles 16 et 17 du même règlement et portent atteinte à leur vie familiale puisque leur fils vit en France avec sa famille ;
- ils méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car ils sont tchéchènes et car la Pologne n'est pas en mesure de bien accueillir les demandeurs d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2015, le préfet de la Loire Atlantique conclut au rejet de la requête. Il s'en remet à ses écritures de première instance.
Par un mémoire, enregistré le 21 novembre 2016, le préfet de la Loire Atlantique a, sur les demandes présentées par la Cour, indiqué notamment que le délai de six mois pour transférer M. B...et Mme D...en Pologne est expiré et n'a pas été prolongé et que leurs demandes d'asile sont en cours d'examen par l'OFPRA.
Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 août 2015 ;
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- -la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu,
1. Considérant que M. B...et MmeD..., ressortissants russes, ont sollicité l'asile en France le 23 mars 2015 ; que l'examen de leurs empreintes digitales a révélé qu'ils avaient déjà formé des demandes d'asile en Pologne et au Danemark ; que par des décisions du 7 avril 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a par conséquent refusé de les admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile ; que les autorités polonaises ont accepté de reprendre en charge M. B...et Mme D...le 22 avril 2015 ; que le préfet de la Loire-Atlantique, par des arrêtés du 19 mai 2015, a décidé de les remettre à ces autorités et les a assignés à résidence pendant une durée de quarante-cinq jours ; que M. B...et Mme D...relèvent appel du jugement du 26 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés de remise aux autorités polonaises :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du règlement n°604/2013 susvisé : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande d'asile est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable (...) " ; qu'aux termes de l'article 21.1 du même règlement : " L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut (...) requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur " ; qu'aux termes de l'article 29.1 du même texte : " Le transfert du demandeur (...) de l'État membre requérant vers l'État membre responsable s'effectue (...) au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée (...) " ; qu'aux termes de l'article 29.2 du même texte : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite." ;
3. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 1, les autorités polonaises, responsables de la demande d'asile de M. B...et de MmeD..., ont accepté de les reprendre le charge le 22 avril 2015 ; que si le préfet de la Loire-Atlantique a décidé, par les arrêtés contestés du 19 mai 2015, de les remettre à ces autorités, il est constant que ces arrêtés de remise aux autorités polonaises n'ont fait l'objet d'aucun commencement d'exécution et que M. B...et Mme D...ont continué à demeurer sur le territoire français, alors que le délai de six mois à compter de l'acceptation de reprise en charge des autorités polonaises du 22 avril 2015 était expiré ; que le préfet de la Loire-Atlantique indique que ce délai n'a pas été prolongé ; que dans ces conditions, en application des dispositions précitées de l'article 29.2 du règlement n° 604/2013, la Pologne est libérée de son obligation de reprise en charge de M. B...et de Mme D...et la responsabilité de l'examen de la demande d'asile de ces derniers est transférée à la France ; que les demandes respectives d'asile de M. B...et Mme D...sont d'ailleurs en cours d'examen par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides depuis les 7 janvier 2016 et 8 janvier 2016 ; qu'il suit de là que les conclusions des requérants tendant à l'annulation du jugement du 26 mai 2015 en tant qu'il rejette leur demande dirigée contre les arrêtés du 19 mai 2015 décidant leur remise aux autorités polonaises sont devenues sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés d'assignation à résidence :
4. Considérant que les requérants ne soulèvent aucun moyen à l'encontre des arrêtés du 19 mai 2015 par lesquels le préfet de la Loire Atlantique les a assignés à résidence ; que par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 26 mai 2015, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés d'assignation à résidence ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B...et Mme D...ont été provisoirement admis au séjour au titre de l'asile, le temps de l'examen de leurs demandes par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées par les requérants ;
Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le conseil des requérants sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B...et Mme D...tendant à l'annulation du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes du 26 mai 2015 en tant qu'il rejette la demande dirigée contre les arrêtés du préfet de la Loire-Atlantique du 19 mai 2015 décidant la remise de M. B...et Mme D...aux autorités polonaises, ainsi que sur leurs conclusions à fin d'injonction.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... et Mme D...est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. KhassanB..., à Mme RazetD..., à Me Thoumineet au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Loirat, président,
- Mme Rimeu, premier conseiller,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 décembre 2016.
Le rapporteur,
S. RIMEU
Le président,
C. LOIRAT
Le greffier,
M. GUERIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°15NT019642