Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 juillet 2020 M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 7 juillet 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Cher du 26 février 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale, protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il a également méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination est contraire aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 mars 2021 le préfet du Cher conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 1er février 1992, déclare être entré en France le 1er juin 2016. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 30 août 2018, confirmée le 11 février 2020 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 26 février 2020, le préfet du Cher l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé d'office. M. A... relève appel du jugement du 7 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. M. A... soutient qu'il vit avec une compatriote avec laquelle il a eu un enfant le 5 décembre 2019. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa compagne est elle-même en situation irrégulière et que, dans ces conditions, rien ne fait obstacle à ce qu'il reforme sa cellule familiale en Guinée. Par suite, et eu égard au fait que M. A... n'est pas sans attache dans son pays, où vivent les enfants qu'il a eu d'une première union, et qu'il ne justifie d'aucune insertion particulière dans la société française, l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, contraire aux stipulations rappelées au point précédent.
4. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions concernant les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que l'arrêté contesté n'a pas pour effet de priver la petite fille de M. A... de ses parents. Si M. A... soutient, en outre, que l'enfant court le risque d'une excision en cas de retour en Guinée, il ne produit aucun élément établissant qu'il ne serait pas en mesure de s'opposer à cette pratique. Enfin, ainsi qu'il a également été rappelé au point 3, il ressort des pièces du dossier que M. A... est le père de plusieurs enfants vivant en Guinée dont l'intérêt supérieur doit également être pris en compte. Dans ces conditions, l'arrêté contesté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
6. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Selon l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.".
7. M. A..., dont le récit a été jugé peu crédible par l'OFPRA et la CNDA, ne produit aucun élément permettant de penser qu'il serait personnellement menacé en cas d'éloignement forcé vers la Guinée, ou que sa fille, ainsi qu'il a été indiqué au point 5, risquerait d'y être excisée. Il y a donc lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et des stipulations rappelées au point précédent.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée au préfet du Cher.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- Mme Brisson, présidente assesseure,
- M. B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2021.
Le rapporteur
E. B...La présidente
I. PerrotLa greffière
A. Martin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02381