Par un arrêt n°17NT01405 du 24 novembre 2017, la cour a ordonné le sursis à l'exécution de ce jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 5 mai 2017 et 9 novembre 2018 la société ENEDIS, représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 mars 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de M. D...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance était tardive et donc irrecevable ;
- elle produit en appel une convention du 10 août 1963 autorisant le syndicat intercommunal d'électricité de Maine-et-Loire à implanter les installations électriques litigieuses sur la propriété achetée par M. D... en 2004 ;
- dès 1925, l'implantation de supports d'une emprise inférieure à un mètre² pouvait être réalisée sur la base d'une convention et n'était pas soumise à déclaration d'utilité publique ;
- le déplacement ou l'enfouissement de la ligne porterait une atteinte excessive à l'intérêt général, dès lors qu'elle dessert plusieurs dizaines de maisons dont l'alimentation en électricité serait nécessairement coupée pendant les travaux ;
- M. D...ne subit aucun préjudice en raison de la présence de la ligne électrique sur sa propriété ; au demeurant, il a acquis la propriété en 2004 en toute connaissance de l'état des lieux.
Par des mémoires en défense enregistrés le 2 juin 2017 et les 2 et 26 novembre 2018 M. D..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société ENEDIS la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la société ENEDIS ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'énergie ;
- la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ;
- le décret du 29 juillet 1927 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie ;
- le décret n° 67-886 du 6 octobre 1967 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie et de la loi du 16 octobre 1919 relative à l'utilisation de l'énergie hydraulique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthon,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- et les observations de MeE..., représentant la société ENEDIS.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...a acquis le 12 juillet 2004 le terrain bâti cadastré section C n° 406 situé 50 route de Martigneau à Juigné-sur-Loire, sur lequel le syndicat intercommunal d'électricité de Maine-et-Loire avait érigé, en 1965, un pylône soutenant des lignes électriques. Il a demandé en 2012 à la société ERDF, devenue société ENEDIS, de déplacer ces ouvrages. Il a saisi le tribunal administratif de Nantes aux fins de contester le refus opposé à sa demande et de voir la société ENEDIS condamnée à procéder au déplacement ou à l'enfouissement de la ligne électrique et à l'indemniser des préjudices subis au titre de l'emprise irrégulière et des dommages permanents causés par les ouvrages publics en litige. Le tribunal administratif de Nantes, par un jugement du 7 mars 2017, a partiellement fait droit à sa demande en enjoignant à la société ENEDIS de déplacer l'ouvrage électrique en cause dans un délai d'un an. La société ENEDIS relève appel de ce jugement.
Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la société ENEDIS ;
2. Aux termes de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie, aujourd'hui codifié à l'article L. 323-4 du code de l'énergie : " La déclaration d'utilité publique confère, en outre, au concessionnaire le droit : 1° D'établir à demeure des supports et ancrages pour conducteurs aériens d'électricité (...) / 2°De faire passer les conducteurs d'électricité au-dessus des propriétés privées, sous les mêmes conditions et réserves que celles spécifiques à l'alinéa 1° ci-dessus ; /3° D'établir à demeure des canalisations souterraines, ou des supports pour conducteurs aériens, sur des terrains privés non bâtis, qui ne sont pas fermés de murs ou autres clôtures équivalentes ;/4° De couper les arbres et branches d'arbres qui, se trouvant à proximité des conducteurs aériens d'électricité, gênent leur pose ou pourraient, par leur mouvement ou leur chute, occasionner des courts-circuits ou des avaries aux ouvrages. / L'exécution des travaux prévus aux alinéas 1° à 4° ci-dessus doit être précédée d'une notification directe aux intéressés et d'une enquête spéciale dans chaque commune ; elle ne peut avoir lieu qu'après approbation du projet de détail des tracés par le préfet.(...)". Aux termes de l'article 1er du décret du 6 octobre 1967 portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie : " Une convention passée entre le concessionnaire et le propriétaire ayant pour objet la reconnaissance des servitudes d'appui, de passage, d'ébranchage ou d'abattage prévues au troisième alinéa de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 susvisée peut remplacer les formalités prévues au quatrième alinéa dudit article. ".
3. Si la passation d'une convention après l'entrée en vigueur du décret du 6 octobre 1967 a pour effet de dispenser le concessionnaire des formalités prescrites par l'alinéa 4 de l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 rappelé au point 2, il ne ressort pas pour autant de la combinaison des dispositions rappelées ci-dessus que la constitution d'une servitude par passation d'une convention avant l'entrée en vigueur du décret du 6 octobre 1967 était proscrite.
4. La société ENEDIS produit, devant la cour, une convention d'occupation, conclue le 10 août 1963 et approuvée par le préfet de Maine-et-Loire le 29 avril 1965, autorisant le syndicat intercommunal d'électricité de Maine-et-Loire à établir sur la propriété cadastrée 297 P des installations électriques comportant un support et une traversée de 87 m. A...n'est pas contesté que cette convention concerne la propriété de M. D..., actuellement cadastrée AW37. Il n'est pas davantage soutenu, ni même allégué, que les formalités prescrites par la loi du 15 juin 1906 n'auraient en l'espèce pas été respectées. Enfin, il résulte des termes de la convention du 10 août 1963 que le propriétaire y a expressément dispensé le conservateur des hypothèques de prendre inscription d'office de la servitude créée. Dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif d'Orléans a jugé que la régularité de l'implantation de l'ouvrage litigieux sur la parcelle appartenant à M. D...n'était pas établie, et ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la servitude en litige ne lui serait pas opposable.
5. Il résulte de ce qui précède que les installations électriques litigieuses doivent être regardées comme ayant été régulièrement implantées sur la propriété de M. D...par voie d'accord amiable. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la société ENEDIS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes lui a enjoint de procéder au déplacement de son ouvrage.
Sur les frais de l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société ENEDIS, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, verse à M. D...la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme de 1 500 euros au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1410898 du 7 mars 2017 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Nantes ainsi que les conclusions présentées par lui devant la cour sont rejetées.
Article 3 : M. D...versera à la société ENEDIS la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société ENEDIS et à M. G... D....
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Berthon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 février 2019.
Le rapporteur,
E. BerthonLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. F...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 17NT01406