Résumé de la décision
Le préfet du Calvados a demandé l'annulation d'un jugement du tribunal administratif de Rennes, qui avait partiellement annulé son arrêté du 20 juin 2018 portant obligation de quitter le territoire français à l'égard de M. A..., un ressortissant tunisien. Le tribunal avait considéré que le préfet n'avait pas correctement envisagé la possibilité de réadmission de M. A... en Italie, où il avait un titre de séjour valide. En appel, la cour a annulé la décision du tribunal, concluant que le préfet avait agi correctement en ne fixant pas la réadmission en Italie en raison des refus des autorités italiennes.
Arguments pertinents
1. Examen des priorités en matière d'éloignement : La cour a soutenu que lorsqu'une autorité administrative envisage des mesures d'éloignement, elle peut légalement choisir entre différentes options, incluant une remise aux autorités d'un État membre de l'Union européenne. Le préfet a d'abord tenté de faire réadmettre M. A... en Italie, mais ce dernier a été refusé par les autorités italiennes.
> "Il s’ensuit que [...] l’autorité administrative envisage une mesure d’éloignement [...] elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l’État membre [...] soit l’obliger à quitter le territoire français."
2. Refus de réadmission par l'Italie : L'argument central de la cour repose sur le refus explicite des autorités italiennes de réadmettre M. A.... La cour a jugé que ce refus légitimait la décision du préfet de l'éloigner vers un autre pays.
> "Ce n'est qu'après que ces dernières ont, par deux décisions [...] manifesté leur refus de réadmettre l'intéressé [...] que le préfet du Calvados a pris l'arrêté."
3. Absence d'autres moyens soulevés par M. A... : La cour a noté que M. A... n'avait soulevé aucun autre moyen contre l'arrêté lors de sa demande initiale. Cela a conduit à rejeter les conclusions à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.
> "Dans ces conditions, c'est à tort que [...] le magistrat désigné du tribunal administratif [...] a estimé que le préfet du Calvados avait commis une erreur d'appréciation."
Interprétations et citations légales
1. Application des textes législatifs : La cour a examiné plusieurs articles cumulés du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile:
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 511-1 et suivants : régissant les obligations de quitter le territoire français.
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 531-1 et suivants : concernant les procédures de remise à un État membre de l'Union européenne.
> "le législateur n’a pas donné à l’une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l’autre."
2. Enjeux de l’éloignement des étrangers : La cour souligne la nécessité d'une approche équilibrée dans l'examen des possibilités d’éloignement, en tenant compte des refus d'autres États de réadmettre des étrangers.
> "si l'étranger demande à être éloigné vers l'État membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet État."
En conclusion, la décision de la cour met en lumière l'importance des refus des États d'origine dans le traitement des demandes d'éloignement et clarifie les prérogatives du préfet dans la gestion des mesures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière en France.