Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 septembre 2014 et 25 février 2016, l'Earl Le Boireau, représentée par Me Tertrais, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 18 juillet 2014 ;
2°) d'annuler la décision du 3 mars 2011 du préfet de la Vendée la mettant en demeure de cesser l'exploitation des parcelles litigieuses, ainsi que la décision du 5 juillet 2011 de cette même autorité prononçant à son encontre une sanction pécuniaire de 450 euros par hectare exploité sans autorisation et la décision du 5 janvier 2012 de la commission de recours du contrôle des structures des exploitations agricoles rejetant le recours formé contre cette décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 3 mars 2011 est entachée d'une erreur de fait dès lors que la décision du 17 décembre 2010 qui a été annulée par le tribunal administratif s'est substituée à celle du 28 octobre 2010 ;
- le juge de première instance, qui devait apprécier la légalité de la sanction contestée à la date à laquelle il se prononçait, s'est estimé à tort saisi dans le cadre d'un recours en excès de pouvoir alors qu'il était saisi en tant que juge de plein contentieux, s'agissant de la contestation d'une sanction ; il devait par voie de conséquence apprécier la légalité de la décision contestée à la date à laquelle il s'est prononcé ;
- la demande présentée le 29 octobre 2010 devait être regardée comme valant recours gracieux contre la décision du 28 octobre 2010 ;
- la sanction prononcée est manifestement injustifiée et disproportionnée dans la mesure où elle la pénalise ainsi que ses associés alors qu'ils sont titulaires de baux ruraux et n'ont fait que poursuivre l'exploitation des terres depuis la disparition du Gaec le Bocquet au sein duquel ils étaient associés ;
- en estimant qu'ils avaient perdu les droits qu'ils tenaient sur les parcelles litigieuses au motif que le Gaec était dissous le préfet a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
- le juge des baux ruraux a d'ailleurs reconnu la continuité de l'exploitation des terres par M. C...B...et ce raisonnement vaut également pour son frère A...B....
Par un mémoire en défense enregistré le 8 décembre 2015, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 428 euros soit mise à la charge de l'Earl Le Boireau au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par l'Earl Le Boireau ne sont pas fondés.
La clôture de l'instruction a été fixée au 1er avril 2016 à 12 heures par une ordonnance du 1er mars 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Tertrais, avocat de l'Earl Le Boireau.
1. Considérant que le 16 août 2010, l'Earl Le Boireau a sollicité l'autorisation d'exploiter un ensemble de parcelles situées à la Ferrière et à la Merlatière en Vendée ; que le 28 octobre 2010, le préfet de ce département a accordé une autorisation partielle à l'Earl mais a refusé l'autorisation sollicitée pour les parcelles ZK 34 située à la Merlatière, ZM11 , ZM 23, ZM 30 et ZM 37 situées à la Ferrière, d'une surface totale de 28 hectares 40 ares, précédemment exploitées par le Gaec Le Boquet, dont les associés, MM A...et C...B..., souhaitaient intégrer l'Earl ; que l'Earl Le Boireau a présenté le 29 octobre 2010 deux nouvelles demandes d'autorisation d'exploiter pour des surfaces respectives de 39 hectares 57 ares et de 41 hectares 47 ares ; que, suite à l'avis défavorable émis le 2 décembre 2010 par la commission départementale d'orientation agricole, le préfet de la Vendée a rejeté ces demandes par deux décisions du 17 décembre 2010 ; que ces décisions ont été annulées par le tribunal administratif de Nantes le 18 juillet 2014 ; que, parallèlement, par une décision du 3 mars 2011, le préfet de la Vendée a mis en demeure l'Earl Le Boireau de cesser l'exploitation des parcelles ZK 34 située à la Merlatière et ZM 11, ZM 23, ZM 30 et ZM 37 situées à la Ferrière dans le délai d'un mois ; que, par une décision du 5 juillet 2011, le préfet a prononcé à l'encontre de l'Earl une sanction pécuniaire de 450 euros par hectare exploité sans autorisation, soit un montant de 12 781 euros pour 28 hectares 40 ares ; que, par une décision du 5 janvier 2012, la commission de recours du contrôle des structures des exploitations agricoles a rejeté le recours dont l'avait saisie l'Earl ; que cette dernière a saisi le tribunal administratif de deux recours dirigés contre la décision du 3 mars 2011 puis contre la décision du 5 juillet 2011 confirmée le 5 janvier 2012 ; qu'elle relève appel du jugement du 18 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif a rejeté ces deux demandes ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime : " Lorsqu'elle constate qu'un fonds est exploité contrairement aux dispositions du présent chapitre, l'autorité administrative met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine et qui ne saurait être inférieur à un mois. / La mise en demeure mentionnée à l'alinéa précédent prescrit à l'intéressé soit de présenter une demande d'autorisation, soit, si une décision de refus d'autorisation est intervenue, de cesser l'exploitation des terres concernées. / Lorsque l'intéressé, tenu de présenter une demande d'autorisation, ne l'a pas formée dans le délai mentionné ci-dessus, l'autorité administrative lui notifie une mise en demeure de cesser d'exploiter dans un délai de même durée. / Lorsque la cessation de l'exploitation est ordonnée, l'intéressé est mis à même, pendant le délai qui lui est imparti, de présenter ses observations écrites ou orales devant toute instance ayant à connaître de l'affaire. / Si, à l'expiration du délai imparti pour cesser l'exploitation des terres concernées, l'autorité administrative constate que l'exploitation se poursuit dans des conditions irrégulières, elle peut prononcer à l'encontre de l'intéressé une sanction pécuniaire d'un montant compris entre 304,90 et 914,70 euros par hectare. La surface prise en compte correspond à la surface de polyculture-élevage faisant l'objet de l'exploitation illégale, ou son équivalent, après, le cas échéant, application des coefficients d'équivalence résultant, pour chaque nature de culture, de l'application de l'article L. 312-6. / Cette mesure pourra être reconduite chaque année s'il est constaté que l'intéressé poursuit l'exploitation en cause. " ;
3. Considérant, d'une part, que l'annulation pour excès de pouvoir des décisions préfectorales du 17 décembre 2010 par le tribunal administratif de Nantes dont se prévaut l'Earl Le Boireau n'a pas eu pour effet de lui conférer le droit d'exploiter les parcelles litigieuses ; que le préfet se trouvait seulement saisi à nouveau de ses demandes d'autorisation d'exploiter, qu'il devait réexaminer au regard des dispositions du code rural et de la pêche maritime et des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles applicables ; qu'ainsi, et à supposer que la décision contestée de mise en demeure de cesser l'exploitation de 28 hectares 40 de terres ait pour fondement l'une des deux décisions annulées et non celle du 28 octobre 2010 comme le soutient le ministre, elle était, en tout état de cause, justifiée en fait et en droit dès lors que la réalité de l'exploitation par l'Earl Le Boireau, qui ne disposait alors d'aucune autorisation d'exploiter les terres en litige durant la période concernée, n'est pas contestée ; que, compte tenu de l'indépendance des législations, l'Earl ne peut utilement se prévaloir à cet égard du fait que MM A...et C...B...auraient été titulaires des baux ruraux concernant les mêmes parcelles ;
4. Considérant, d'autre part, que s'il résulte de l'instruction que le préfet a en définitive délivré à l'Earl Le Boireau, le 6 octobre 2015, l'autorisation d'exploiter les 28 hectares 40 ares situés à la Ferrière et à la Merlatière concernés par la sanction pécuniaire litigieuse, il n'est pas établi que cette décision, qui répond à une nouvelle demande présentée par l'Earl le 27 juillet 2015, aurait pu être prise dès 2010 ; que, dans ces conditions, en fixant à 12 781 euros la sanction contestée, sur la base de 450 euros par hectare de terres exploitées sans autorisation, la commission de recours du contrôle des structures des exploitations agricoles, dont la décision s'est substituée à celle du préfet du 5 juillet 2011, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Earl Le Boireau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à l'Earl Le Boireau de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Earl Le Boireau le versement à l'Etat de la somme qu'il demande au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de l'Earl Le Boireau est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'Etat tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl Le Boireau et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 juin 2016.
Le rapporteur,
V. GélardLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
''
''
''
''
3
N°14NT02429