Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mars 2020, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans en date du 17 octobre 2019 ;
2°) d'annuler ces arrêtés du préfet du Loiret du 27 septembre 2019 et du 1er octobre 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de procéder à l'examen de sa demande d'asile dans un délai de 30 jours sous astreinte de 50 euros par jour de retard, en le mettant en possession, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- dès lors que sa demande d'asile avait été définitivement rejetée en Italie, la demande adressée par les autorités françaises aux autorités italiennes avait le caractère d'une demande de prise en charge et non de reprise en charge, en sorte qu'un accord implicite sur cette demande ne pouvait naître qu'au terme d'un délai de deux mois ; ainsi, au cas particulier, la décision de transfert litigieuse a été adoptée alors que l'accord implicite des autorités italiennes n'était pas acquis, ce qui entache d'irrégularité la procédure suivie ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 ;
- la décision portant assignation à résidence repose sur une décision de transfert elle-même illégale.
Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2020, le préfet du Loiret conclut au non-lieu à statuer sur la requête.
Il fait valoir qu'en raison du transfert en Italie de l'intéressé, l'appel a perdu son objet.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendus au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né en 1987, ressortissant nigérian, s'est présenté le 7 mai 2019 à la préfecture du Loiret pour déposer une demande d'asile. La consultation du système Eurodac a révélé qu'il avait demandé la reconnaissance de la qualité de réfugié en Italie, avant son entrée sur le territoire français. Les autorités italiennes ont, dès lors, été saisies le 7 juin 2019 d'une demande de reprise en charge du requérant. Le préfet du Loiret, par un arrêté du 27 septembre 2019, a décidé le transfert de M. B... aux autorités italiennes et, par un arrêté du 1er octobre 2019, a assigné M. B... à résidence dans le département du Loiret pour une durée de 45 jours. Par un jugement du 17 octobre 2019, dont il est relevé appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
Sur l'arrêté de transfert :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 25 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le requérant avait précédemment demandé le bénéfice de la protection internationale en Italie, si bien que, lorsque le préfet a requis les autorités italiennes, c'était, non en vue de sa prise en charge par celles-ci, mais de sa reprise en charge. Etait donc applicable à cette requête la procédure prévue par l'article 25 précité du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, relatif aux demandes de reprise en charge de demandeurs d'asile. Dès lors que les autorités italiennes ont été saisies de la demande de reprise en charge de l'intéressé le 7 juin 2019, laquelle était fondée sur des données issues du système Eurodac, elles doivent être regardées comme ayant, à l'issue d'un délai de quinze jours, implicitement accepté cette demande. Cette acceptation implicite était donc acquise à la date de l'arrêté contesté du 27 septembre 2019.
4. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".
5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un compte-rendu d'échographie daté du 23 septembre 2019, que, dans le cadre d'un bilan initial d'une hépatite B chronique, une échographie a révélé que M. B... présentait des micropolypes vésiculaires. Toutefois, d'une part, ni ces micropolypes dont ni le caractère malin ni le caractère pathogène à moyen ou long terme n'est établi, ni cette hépathite B, qui a donné lieu à une échographie dont le compte-rendu soulignait le caractère normal mis à part la présence des micropolypes, et dont il n'est donc pas établi qu'elle soit active, ne sont d'une gravité telle qu'ils justifieraient que le suivi médical dont bénéficie l'intéressé ne soit pas interrompu par l'effet de la mesure de transfert à destination de l'Italie. D'autre part, il n'est pas établi qu'en Italie, le requérant ne puisse pas bénéficier des soins adaptés à son état de santé. Dans ces conditions, et en l'absence d'autres éléments justifiant que les autorités françaises examinent, dans les conditions dérogatoires prévues par l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, la demande de protection internationale de l'intéressé, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions en le transférant en Italie.
Sur l'arrêté d'assignation à résidence :
6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 5 que l'exception d'illégalité de l'arrêté de transfert vers l'Italie, soulevée à l'appui de la contestation de l'arrêté d'assignation à résidence, doit être écartée.
7. Il résulte de tout ce qui a été dit ci-dessus que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Par suite, sa requête, y compris les conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2020 à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 octobre 2020.
Le rapporteur,
T. A...Le président,
L. Lainé
Le greffier,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00871
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