Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2017, M. B...A..., représenté par Me G...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 septembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2017 par lequel la préfète de la Loire-Atlantique a décidé son transfert aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile ainsi que la décision du même jour l'assignant à résidence dans le département de la Loire-Atlantique pour une durée de quarante cinq jours ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire-Atlantique de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale et à titre subsidiaire d'enjoindre à la préfète de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- son droit à l'information a été méconnu ; l'arrêté de remise aux autorités allemandes méconnait les dispositions de l'article 5 du règlement n° 604/2013 en ce qu'il ne contient aucun élément d'identification et de qualification de l'agent ayant mené l'entretien ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le nom et les coordonnées de l'interprète ayant assuré la traduction ne sont pas précisés ;
- l'arrêté portant assignation à résidence est entaché des mêmes moyens d'illégalité externe que ceux développés au soutien de sa demande d'annulation de l'arrêté portant remise aux autorités allemandes ;
- l'arrêté portant assignation à résidence doit être annulé en raison de l'illégalité de l'arrêté portant remise aux autorités allemandes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 septembre 2018, la préfète de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.
M. B...A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 27 octobre 2017.
Vu les pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique le rapport de Mme Tiger-Winterhalter et les observations de Me E...représentant M. B...A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B...A..., de nationalité afghane, né le 1er janvier 1999, est entré irrégulièrement en France le 3 avril 2017 selon ses déclarations. Il a d'abord été pris en charge par le centre d'examen de situation administrative de la préfecture de police de Paris où ses empreintes digitales ont été relevées. Le résultat du relevé d'empreintes de l'intéressé dans le système Eurodac a révélé qu'il avait sollicité l'asile auprès des autorités allemandes le 19 avril 2017. La préfète de la Loire-Atlantique, département dans lequel se situe le centre d'examen de la situation administrative vers lequel le requérant a été dirigé par le préfet de police de Paris, a saisi les autorités allemandes, le 19 avril 2017, d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. L'Allemagne ayant accepté de reprendre en charge M. B...A..., la préfète de la Loire-Atlantique a décidé, en application des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la remise de l'intéressé aux autorités allemandes et, par un arrêté du même jour, l'a assigné à résidence pour une durée de quarantecinq jours. M. B...A...relève appel du jugement du 7 septembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
Sur l'arrêté de remise aux autorités allemandes :
2. Selon l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ". Selon l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire ".
3. Il ressort des pièces du dossier que l'entretien réalisé le 30 août 2017 a été assuré par un agent habilité de la préfecture qui doit, en l'absence de tout élément de preuve contraire, être regardé comme qualifié pour le mener, les dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'exigeant pas que le compte rendu de l'entretien précise le grade, la fonction ou autres qualités de l'agent de la préfecture qui le mène. Il ressort également des pièces du dossier que lors de cet entretien le requérant a bénéficié des services téléphoniques d'un interprète en langue farsi, appartenant à la société ISM interprétariat, qui est agréée par le ministère de l'intérieur et présente donc toutes les garanties de sérieux et de qualité. M. B...A...n'a fait remarquer à aucun moment de l'entretien qu'il ne comprenait pas ce que lui traduisait l'interprète, dont le nom est d'ailleurs indiqué sur le procès-verbal d'entretien, sans mentionner d'observations à ce sujet. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article L. 111-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
Sur l'arrêté d'assignation à résidence :
4. M. B...A...soutient que cet arrêté est entaché des mêmes illégalités externes que l'arrêté de remise aux autorités allemandes. Toutefois, en l'absence de plus de précisions, il ne met pas le juge à même de statuer sur le bien fondé de ce moyen.
5. Il résulte du point 3 du présent arrêt que M. B...A...n'est pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités allemandes.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...H...B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter présidente assesseure,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 octobre 2018.
La rapporteure,
N. TIGER-WINTERHALTERLe président,
L. LAINÉ
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT03541
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