Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 1er mai et 11 septembre 2020, M. F... B..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 6 mars 2020 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 29 janvier 2020 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, à titre principal, de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans le délai de cinq jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de de 100 euros par jour de retard passé ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités italiennes :
- il n'est pas établi que Mme C... signataire de la décision contestée ait été compétente ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen personnalisé de sa situation et la décision n'est pas motivée ;
- les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues dès lors que son information a été tardive ;
- les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; il n'est pas établi que l'entretien a été mené par une personne qualifiée formée à cet effet, le nom et la signature de la personne ayant conduit l'entretien n'étant pas mentionnés ; il existe un doute sur la compétence de l'agent de préfecture et sur l'interprète eu égard à la réalité de son état de santé ; les conditions de confidentialité de l'entretien n'ont pas été respectées ; les conditions de cet entretien ont eu des conséquences sur l'appréciation de sa situation sanitaire ;
- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 eu égard aux défaillances systémiques affectant les conditions de traitement des demandeurs d'asile en Italie avec un risque de non-respect des droits garantis par l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux ;
- il n'a pas été procédé à un examen de sa situation au regard de l'article 3.2 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors que la demande de transfert aurait dû être présentée par la France sur le fondement du d) du 1 de l'article 18 du règlement cité et que le préfet n'apporte pas de garantie sur sa possibilité de disposer d'un recours effectif contre la décision de refus d'asile qui lui a été opposée en Italie et eu égard à son état de santé ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à l'application des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 eu égard à son état de santé et aux défaillances du système de soins italien ;
. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant transfert auprès des autorités italiennes ;
- il n'est pas établi que Mme C... signataire de la décision contestée ait été compétente ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision d'assignation à résidence, et les obligations de pointage avec ses effets personnels, qui lui sont imposées, sont disproportionnées ; l'obligation de se présenter à heures fixes et avec ses effets personnels n'a pas de base légale et est exorbitante.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 3 juillet et 10 septembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté de transfert et au rejet du surplus des concluions
Il soutient que :
- la France est devenue responsable de l'examen de la demande d'asile de M. B... ;
- les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 16 janvier 1984, de nationalité guinéenne, est, selon ses déclarations, entré irrégulièrement sur le territoire français le 18 décembre 2019. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile auprès des services de la préfecture de la Loire-Atlantique le 31 décembre 2019. Ayant considéré, après l'examen de son dossier, que M. B... avait déposé une première demande d'asile le 2 février 2017 en Italie, et que les autorités italiennes étaient responsables de l'instruction de sa demande d'asile, le préfet de Maine-et-Loire a saisi ces autorités, le 6 janvier 2020, d'une demande de transfert de M. B... sur le fondement du b) de l'article 18.1 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Après l'accord explicite des autorités italiennes intervenu le 16 janvier 2020 sur le fondement cité, le préfet de Maine-et-Loire a, par deux arrêtés du 29 janvier 2020, décidé, d'une part, de transférer l'intéressé aux autorités italiennes et, d'autre part, de l'assigner à résidence dans le département de la Loire-Atlantique. Par un jugement du 6 mars 2020, dont M. B... relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de ces arrêtés.
Sur l'étendue du litige :
En ce qui concerne la décision de transfert :
2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle est notifié à l'administration le jugement par lequel le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet pour procéder à l'exécution de la décision de transfert du requérant vers l'Italie a été interrompu par la saisine du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir intégralement à compter de la notification à l'administration, le 9 mars 2020, du jugement attaqué. Par suite, l'arrêté en cause est caduc à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile de l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du requérant relatives à l'annulation de l'arrêté prononçant son transfert vers l'Italie.
En ce qui concerne l'arrêté portant assignation à résidence :
5. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à son annulation.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. M. B... invoque, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence, l'illégalité de la décision du même jour portant transfert auprès des autorités italiennes.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision de transfert :
7. En premier lieu, l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : (...) 7° Aux agents en fonction dans les préfectures, pour les matières relevant des attributions du ministre de l'intérieur, y compris les lettres d'observation valant recours gracieux formés auprès des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, pour les matières relevant des ministères qui ne disposent pas de services dans le département ainsi que pour la transformation en états exécutoires des ordres de recettes mentionnés aux articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (...) ".
8. Par un arrêté du 27 novembre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Maine-et-Loire, le préfet de ce département a donné délégation à Mme D... C..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers et signataire de la décision litigieuse, à l'effet de signer les décisions de transfert prises pour l'application du règlement dit " Dublin III " et les décisions d'assignation à résidence. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cet arrêté vise la nomination de l'agent bénéficiaire de la délégation. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait.
9. En deuxième lieu, l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. (...) ".
10. La décision litigieuse de transfert de M. B... auprès des autorités italiennes vise notamment le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en particulier son article L. 742-3. Elle relève qu'il a présenté une demande d'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 31 décembre 2019 et que les recherches entreprises sur le fichier Eurodac ont fait apparaître que l'intéressé avait préalablement sollicité l'asile en Italie. Elle précise, en outre, la situation familiale de l'intéressé et sa situation sanitaire dont le préfet a apprécié l'incidence sur sa situation administrative au regard des éléments présentés. Dans ces conditions, la décision comporte un exposé détaillé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de Maine-et-Loire s'est fondé pour considérer l'Italie comme responsable de l'examen de la demande d'asile de M. B... et décider son transfert auprès des autorités de ce pays. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision ne satisferait pas à l'exigence légale de motivation ou qu'il n'aurait pas été procédé à un examen complet de sa situation doivent être écartés.
11. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; /b) des critères de détermination de l'État membre responsable (...); /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;/e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune (...). Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. / 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. ". Enfin selon les dispositions de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".
12. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations, l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 citées au point précédent constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
13. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu remettre, le 31 décembre 2019, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile dans les services de la préfecture, et à l'occasion de son entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées. Ces documents, dont les pages de garde ont été signées par l'intéressé le 31 décembre 2019, sont rédigés en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre ainsi que cela ressort des termes du compte-rendu de l'entretien individuel sur lequel il a également apposé sa signature, et dont le contenu lui a également été communiqué par oral avec le concours d'un interprète. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé d'une garantie au motif que l'information qui lui a été donnée par les services préfectoraux aurait dû l'être dès son passage dans une structure de pré-accueil. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à l'information du demandeur d'asile énoncé à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
14. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".
15. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. B... qu'il a bénéficié le 31 décembre 2019, avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en langue soussou, que l'intéressé a déclaré comprendre, avec le concours d'un interprète, dont l'identité est portée sur le compte rendu d'entretien, intervenant pour le compte de la société ISM Interprétariat, agréée par le ministère de l'intérieur. Il n'est pas établi que le requérant n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.
16. En cinquième lieu, la circonstance que les autorités françaises ont indiqué lors de leur saisine des autorités italiennes que M. B... ne savait pas s'il avait été statué sur sa demande d'asile alors qu'il avait indiqué lors de l'entretien en préfecture qu'elle avait été rejetée est sans incidence sur la légalité de la décision contestée alors que les autorités italiennes ont explicitement indiqué en réponse qu'elles acceptaient de le reprendre en charge sur le fondement du b) du I de l'article 18 du règlement du 26 juin 2013, en qualité de demandeur d'asile.
17. En sixième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Par ailleurs, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule et l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose que : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
18. Si M. B... invoque les conditions de prise en charge des demandeurs d'asile en Italie, les documents qu'il produit à l'appui de ses allégations ne permettent pas de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités italiennes dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il indique du reste avoir été soigné en Italie, où il a été hospitalisé pendant un mois. Il n'établit ainsi pas encourir le risque de subir dans ce pays un traitement inhumain ou dégradant en méconnaissance des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne.
19. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)".
20. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation, notamment médicale, de M. B... et des conséquences de sa réadmission en Italie au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile et de son état de santé.
21. D'autre part, M. B... produit des documents médicaux, faisant état de son suivi médical au CHU de Nantes où il a subi une fibroscopie oesogastroduodénale en raison de rectorragies chroniques déjà prises en charge en Italie, et où une rectosigmoïdoscopie a été programmée ainsi que des radiographies osseuses. Ces seuls éléments, tout comme la circonstance qu'il aurait craché du sang lors de la notification de l'arrêté contesté, ne permettent pas de démontrer à eux seuls que son état de santé le placerait dans une situation de vulnérabilité exceptionnelle imposant d'instruire sa demande d'asile en France. Dans ces conditions, il n'est pas établi que le préfet de la Loire-Atlantique aurait entaché la décision de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement précité.
22. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à invoquer, à l'encontre de la décision prononçant son assignation à résidence, l'illégalité de la décision ordonnant sa remise aux autorités italiennes.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision d'assignation à résidence :
23. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7 du présent arrêt.
24. En deuxième lieu, la décision portant assignation à résidence de M. B... comporte l'exposé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Elle est ainsi suffisamment motivée au regard des exigences des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
25. En dernier lieu, l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. / Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 au titre du 5° de cet article ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5, l'autorité administrative peut fixer à quatre au plus le nombre de présentations quotidiennes. La même autorité administrative est compétente pour désigner à l'étranger assigné à résidence, en application de l'article L. 561-1, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside ".
26. Il résulte des dispositions précitées que le préfet a pu, sans entacher sa décision d'un défaut de base légale, assortir sa décision d'assignation à résidence de M. B... de l'obligation pour celui-ci de se présenter les mardi, mercredi et jeudi, à l'exception des jours fériés, aux services du commissariat central de police de Nantes, avec ses effets personnels, à 8 heures du matin. La circonstance que cette notion d'effets personnels ne serait mentionnée par aucun texte législatif ou réglementaire demeure sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Par ailleurs, il n'est pas démontré que cette obligation et ses modalités présenteraient pour le requérant un caractère disproportionné. Par suite, les moyens tirés du défaut de base légale et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacheraient la décision d'assignation doivent être écartés.
27. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 29 janvier 2020 du préfet de Maine-et-Loire. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. F... B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. A..., président assesseur,
- M. Jouno, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 novembre 2020.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
L. Lainé
La greffière,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT01418