Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 octobre 2018, M. B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 septembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 du préfet de Maine-et-Loire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que la décision a été prise en méconnaissance des dispositions des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, et procède d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2018 le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 25 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... B..., né le 6 juillet 1994 en Afghanistan, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 7 août 2018 et y a sollicité l'asile le 22 août 2018. La consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes digitales avaient été enregistrées une première fois en Hongrie le 3 juin 2015 puis le 29 juin 2015 au Royaume-Uni. Par un arrêté du 6 septembre 2018, le préfet de Maine-et-Loire a ordonné sa remise aux autorités britanniques, qui avaient explicitement accepté sa reprise en charge le 5 septembre 2018. M. B...relève appel du jugement du 14 septembre 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur l'arrêté de transfert aux autorités britanniques :
2. Aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...). La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / 2. (...) / Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable (...) ". L'application de ces critères peut toutefois être écartée en vertu de l'article 17 du même règlement, aux termes duquel : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ". Il résulte de ces dispositions que si le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 pose en principe dans le 1 de son article 3 qu'une demande d'asile est examinée par un seul Etat membre et que cet Etat est déterminé par application des critères fixés par son chapitre III, dans l'ordre énoncé par ce chapitre, l'application des critères d'examen des demandes d'asile est toutefois écartée en cas de mise en oeuvre de la clause dérogatoire énoncée au 1 de l'article 17 du règlement, qui procède d'une décision prise unilatéralement par un Etat membre.
3. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen complet et rigoureux de la situation de M. B... et des conséquences de sa réadmission au Royaume-Uni, au regard notamment des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Il ne ressort pas davantage du dossier que le préfet se serait abstenu d'examiner la possibilité de mettre en oeuvre la clause de souveraineté prévue à l'article 17 du règlement susvisé. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté qu'il conteste serait entaché d'un défaut d'examen sérieux et d'une erreur de droit.
4. D'autre part, il n'est pas établi que la demande d'asile de M. B...serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités britanniques dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. À cet égard si M. M. B...soutient que sa demande d'asile a été rejetée au Royaume-Uni, ce qui l'expose à un retour forcé en Afghanistan, il ne justifie pas qu'il aurait fait l'objet au Royaume-Uni d'une décision définitive d'éloignement dont l'exécution serait inévitable en cas de transfert dans ce pays. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants dans ce pays, alors que ce pays est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de sa demande d'asile, la décision contestée aurait été prise en méconnaissance des dispositions des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
5. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de Maine-et-Loire du 6 septembre 2018. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 22 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 février 2019.
Le rapporteur,
M-P. Allio-RousseauLe président,
L. Lainé
Le greffier,
M. A... La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18NT03701