Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés le 22 décembre 2017, les 2 février et 21 août 2018, M.B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 juillet 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 juin 2017 par lequel le préfet de la Vendée a décidé son transfert aux autorités italiennes ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée, à titre principal de prendre en charge sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demandeur d'asile en procédure normale, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de quarante huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée en fait et en droit ; la motivation ne permet pas d'être assuré que la partie adverse a procédé à l'examen préalable et rigoureux qui s'impose avant de prendre une décision de remise vers un pays ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement Dublin III ; il n'a pas eu dès son passage le 4 janvier 2017, à la plateforme d'accueil des demandeurs d'asile, une information complète sur ses droits par écrit ;
- il a été privé des droits conférés au statut de demandeur d'asile entre le 4 janvier et le 20 février 2017 n'ayant eu une attestation de demandeur d'asile que le 20 février 2017 suite à l'enregistrement de sa demande.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2018, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 novembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, présidente assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., ressortissant guinéen, est entré irrégulièrement en France le 22 décembre 2016. Informé par le relevé d'empreintes digitales et la vérification du fichier " Eurodac " de ce que l'intéressé avait déjà été enregistré le 17 novembre 2016 par les autorités italiennes, le préfet de la Vendée a saisi les autorités de ce pays d'une demande de reprise en charge de l'intéressé sur le fondement de l'article 13-1 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Les autorités italiennes ont implicitement accepté cette reprise en charge le 21 avril 2017. Par une décision du 7 juin 2017, le préfet de la Vendée a ordonné la remise de M. B...aux autorités italiennes. M. B...fait appel du jugement du 5 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, l'arrêté décidant la remise de M. B...aux autorités italiennes expose avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait qui le fondent. En outre, une telle motivation ne révèle pas un défaut d'examen particulier de sa demande. Ainsi, les moyens tirés du défaut de motivation et de l'absence d'examen particulier de sa demande doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, il résulte des dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
4. M. B...soutient qu'il a reçu tardivement, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile à la préfecture, l'information prévue par les dispositions susmentionnées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 alors qu'elle aurait dû lui être délivrée lors de l'introduction de sa demande d'asile le 4 janvier 2017, date à laquelle il s'est présenté au centre d'examen des situations administratives à Paris. Toutefois, il ne ressort d'aucune disposition du règlement, ni d'aucun principe, que l'information prévue à l'article 4 du règlement doive être délivrée préalablement à l'enregistrement de la demande d'asile au guichet unique et avant même que les services préfectoraux soient informés de ce que le demandeur ne relève pas de la compétence de la France et se trouve, pour ce motif, placée sous procédure Dublin en application de l'article 20 du même règlement, dans l'attente de la détermination de l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande. Or, en l'espèce, le préfet de la Vendée n'a été informé de ce que le requérant était susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement que le 20 février 2017, lors du relevé de ses empreintes décadactylaires. Ainsi, M.B..., qui ne conteste pas avoir reçu les brochures nécessaires à son information avant l'arrêté contesté de transfert aux autorités italiennes, n'est pas fondé à soutenir que cette information ne lui aurait pas été délivrée en temps utile ou qu'il aurait été privé d'une garantie substantielle, alors qu'il conservait la possibilité de faire valoir toute observation utile au regard de sa situation, et pouvait contester son transfert ou en demander la suspension. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande et procède à la détermination de l'Etat responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013 (...) / L'enregistrement a lieu au plus tard trois jours ouvrés après la présentation de la demande à l'autorité administrative compétente, sans condition préalable de domiciliation. (...) ".
6. Le délai d'enregistrement prévu par les dispositions précitées n'est pas prescrit à peine de nullité. Par suite, la circonstance que la demande d'asile présentée par M. B...n'aurait pas été enregistrée dans les délais fixés à l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est, en tout état de cause, pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure à l'issue de laquelle a été édicté l'arrêté contesté, portant remise de l'intéressé aux autorités italiennes.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Tiger-Winterhalter présidente assesseure,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 novembre 2018.
La rapporteure,
N. TIGER- WINTERHALTERLe président,
L. LAINÉ
La greffière,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT03914 2
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