Par un jugement n° 1202026, 1202029 du 26 novembre 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2016, la communauté d'agglomération, Lorient Agglomération, représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 26 novembre 2015;
2°) d'annuler les délibérations du 14 mars 2012 par lesquelles le comité syndical du syndicat d'alimentation en eau potable (SIAEP) de la région d'Hennebont-Port-Louis a, d'une part, " validé " la liste des biens mis à disposition du syndicat départemental de l'eau du Morbihan au titre des compétences de production et de transport d'eau, d'autre part, autorisé son président à " acter " la mise à disposition du syndicat départemental de l'eau du Morbihan de l'unité de production de Langroise et à signer le procès-verbal de mise à disposition ;
3°) de mettre à la charge du syndicat Eau du Morbihan (EdM) une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier car insuffisamment motivé au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative d'une part en tant qu'il écarte le moyen tiré du vice de procédure et d'autre part en tant qu'il écarte l'exception d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 22 juillet 2011 ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté le vice de procédure alors que la présence du président du Syndicat Eau du Morbihan (EdM) à la séance est par elle-même irrégulière et a exercé une influence ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté comme non fondée l'exception d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 22 juillet 2011 ;
- cet arrêté entérine l'abrogation de l'arrêté préfectoral de 1974 et donc créée un nouveau Syndicat, par suite, le préfet aurait dû faire application des dispositions des articles L. 5212-2 et L. 5211-45 du code général des collectivités territoriales, soit dresser la liste des syndicats concernés et consulter la CDCI ;
- d'autre part, cet arrêté est consécutif à la délibération du 28 octobre 2010 du syndicat départemental de l'eau, elle-même illégale dès lors que l'information des membres du comité syndical a été insuffisante et le projet de statuts joint à la convocation substantiellement différent de celui réellement adopté ;
- en raison de l'illégalité de l'arrêté du 22 juillet 2011, le SIAEP de la région d'Hennebont-Port-Louis n'a pu régulièrement mettre ses biens à la disposition de EdM ;
- la cour devra annuler le jugement attaqué et, par l'effet dévolutif de l'appel, annuler les deux délibérations contestées au regard des moyens qu'elle a développés en première instance.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 octobre 2016, le Syndicat départemental de l'eau du Morbihan, dit EdM, représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Lorient Agglomération le versement d'une somme de 3 500 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable en raison, d'une part, du caractère non décisoire de l'acte contesté, qui se borne à faire une application automatique de l'article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales, d'autre part, de ce que les délibérations contestées font suite à l'arrêté du 22 juillet 2011 par lequel le préfet a modifié les statuts du syndicat départemental de l'eau du Morbihan et n'ont aucun lien avec l'arrêté du 25 juillet 2011 par lequel le préfet a approuvé l'extension des compétences de Lorient Agglomération à la gestion intégrée de l'eau ; la cour a admis ce défaut d'intérêt pour agir de la requérante par son arrêt n°13NT02281 du 19 mai 2015 ;
- le jugement est suffisamment motivé et régulier ;
- les autres moyens soulevés par Lorient Agglomération ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 28 novembre 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 29 décembre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat,
- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la communauté d'agglomération du pays de Lorient, et de MeA..., représentant le syndicat départemental de l'eau du Morbihan.
Une note en délibéré présentée pour la communauté d'agglomération du pays de Lorient a été enregistrée le 29 mars 2017.
1. Considérant que, par un arrêté du 22 juillet 2011, le préfet du Morbihan a approuvé la modification des statuts du syndicat départemental de l'eau du Morbihan à compter du 1er janvier 2012 ; qu'en vertu de l'article 4 de cet arrêté, le syndicat départemental de l'eau du Morbihan exerce obligatoirement les compétences d'autorité organisatrice du service de production et de transport de l'eau potable et, de manière optionnelle, la compétence en matière de distribution d'eau potable pour ceux de ses membres qui lui délèguent cette compétence ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales, applicable aux syndicats mixtes en vertu des dispositions de l'article L. 5211-17 du même code : " Le transfert d'une compétence entraîne de plein droit la mise à la disposition de la collectivité bénéficiaire des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l'exercice de cette compétence. / Cette mise à disposition est constatée par un procès-verbal établi contradictoirement entre les représentants de la collectivité antérieurement compétente et de la collectivité bénéficiaire. Le procès-verbal précise la consistance, la situation juridique, l'état des biens et l'évaluation de la remise en état de ceux-ci ..." ; qu'aux termes de l'article L. 1321-2 de ce code : " Lorsque la collectivité antérieurement compétente était propriétaire des biens mis à disposition, la remise de ces biens a lieu à titre gratuit. La collectivité bénéficiaire de la mise à disposition assume l'ensemble des obligations du propriétaire. Elle possède tous pouvoirs de gestion. Elle assure le renouvellement des biens mobiliers. Elle peut autoriser l'occupation des biens remis. Elle en perçoit les fruits et produits. Elle agit en justice au lieu et place du propriétaire. / La collectivité bénéficiaire peut procéder à tous travaux de reconstruction, de démolition, de surélévation ou d'addition de constructions propres à assurer le maintien de l'affectation des biens... " ; qu'en application de ces dispositions, le comité syndical du syndicat d'alimentation en eau potable (SIAEP) de la région d'Hennebont-Port-Louis, qui est membre du syndicat départemental de l'eau du Morbihan a, par deux délibérations du 14 mars 2012, prises à la suite de l'arrêté du 22 juillet 2011 du préfet du Morbihan, d'une part, mis à la disposition du syndicat départemental de l'eau du Morbihan les ouvrages de production et de transport d'eau lui appartenant, notamment l'unité de production d'eau de Langroise, et, d'autre part, autorisé son président à " acter " la mise à disposition de l'unité de production d'eau de Langroise et à signer le procès-verbal de mise à disposition des biens au syndicat départemental de l'eau du Morbihan ; que, par la présente requête, la communauté d'agglomération Lorient Agglomération relève appel du jugement n°1202026, 1202029 du 26 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux délibérations ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. Considérant, en premier lieu, que le jugement attaqué répond à son point 5 au moyen tiré du vice de procédure qui aurait entaché le déroulement de la séance du comité syndical du SIAEP de la région d'Hennebont-Port-Louis du 14 mars 2012, en mentionnant, d'une part, le retrait du président du syndicat départemental de l'eau du Morbihan avant l'ouverture des débats relatifs aux délibérations contestées et l'absence de participation aux discussions d'un autre représentant de ce syndicat, et d'autre part, les conditions dans lesquelles les délibérations ont été votées, pour en déduire l'absence d'influence exercée par les représentants du syndicat départemental de l'eau sur les délibérations ou sur le sens du vote et l'absence de privation de garantie pour l'organe délibérant ; qu'en second lieu, le jugement répond aux moyens développés pour établir l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de l'arrêté du préfet du Morbihan du 22 juillet 2011, d'une part, à son point 8 par la démonstration que cet arrêté n'a ni pour objet ni pour effet de créer un nouveau syndicat mixte et qu'en conséquence Lorient Agglomération ne pouvait utilement se prévaloir de la méconnaissance des articles L. 5211-45 ou L. 5212-2 du code général des collectivités territoriales ; que le jugement écarte, d'autre part, à son point 9, comme n'étant pas fondée, la première branche du moyen du défaut d'information préalable suffisante des membres du comité syndical du syndicat départemental de l'eau du Morbihan en vue de la séance du 28 octobre 2010, tiré du caractère insuffisant de la note explicative de synthèse, et écarte, enfin, à son point 10 la seconde branche du même moyen tirée des modifications substantielles qui existeraient entre les délibérations adoptées et les projets successifs de délibérations qui auraient été préalablement communiquées, en indiquant que le tribunal n'avait pas été mis à même d'en apprécier le bien-fondé ; que le jugement attaqué est ainsi suffisamment motivé sur ces différents points ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Considérant, en premier lieu, qu'en application des dispositions précitées de l'article L. 1321-1 du code général des collectivités territoriales, qui prévoient la mise à la disposition de plein droit au profit de la collectivité bénéficiaire d'un transfert de compétence des biens meubles et immeubles utilisés, à la date de ce transfert, pour l'exercice de cette compétence, le comité syndical du SIAEP d'Hennebont-Port-Louis n'avait pas à porter d'appréciation sur l'utilité principale de l'usine de Langroise, dont il est constant qu'elle est utilisée pour la production et le traitement de l'eau, qui sont au nombre des compétences obligatoirement transférées par ses membres au syndicat départemental de l'eau du Morbihan à compter du 1er janvier 2012 ; que, dans ces conditions, Lorient Agglomération n'est pas fondé à soutenir que la seule présence à la séance d'un représentant du syndicat de l'eau du Morbihan aurait été de nature à exercer une influence sur les délibérations contestées ; que le moyen tiré du vice de procédure entachant les délibérations contestées du 14 mars 2012 doit par suite être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que Lorient Agglomération excipe de l'illégalité de l'arrêté préfectoral du 22 juillet 2011, en soutenant qu'il a pour objet de créer un nouveau syndicat mixte et que, par voie de conséquence, le préfet aurait dû, d'une part, en l'absence de délibérations concordantes, dresser la liste des communes concernées en application de l'article L. 5212-2 du code général des collectivités territoriales, et d'autre part, consulter préalablement la commission départementale de la coopération intercommunale en application de l'article L. 5211-45 du même code ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5711-4 du code général des collectivités territoriales : " En matière de gestion de l'eau, et des cours d'eau, d'alimentation en eau potable, (...), un syndicat mixte relevant du présent titre peut adhérer à un autre syndicat mixte défini au présent titre ou institué en application de l'article L. 5721-2, suivant la procédure définie à l'article L. 5211-18. L'adhésion d'un syndicat mixte à un autre syndicat mixte est sans incidence sur les règles qui régissent ce dernier. / Lorsque le syndicat mixte qui adhère à un autre syndicat mixte lui transfère la totalité des compétences qu'il exerce, l'adhésion entraîne sa dissolution. / Les membres du syndicat mixte dissous deviennent de plein droit membres du syndicat mixte qui subsiste. (...) " ; que si lors de sa création, en 1974, le syndicat départemental de l'eau du Morbihan comptait parmi ses membres uniquement des communes et des syndicats de communes sous forme de syndicats à vocation multiple ou à vocation unique, certains de ses membres sont devenus des syndicats mixtes ; que, dès lors que de par ses statuts le syndicat départemental de l'eau du Morbihan avait une compétence en matière de gestion de l'eau et des cours d'eau et d'alimentation en eau potable, il entrait dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 5711-4 du code général des collectivités territoriales ; qu'en abrogeant l'arrêté préfectoral de création du 31 octobre 1974 et les arrêtés modificatifs ultérieurs, et en arrêtant les nouveaux statuts du syndicat départemental de l'eau du Morbihan, le préfet du Morbihan, d'une part, a parachevé la mise en conformité des statuts du syndicat avec les dispositions législatives applicables, et d'autre part, l'a transformé en un syndicat mixte " à la carte " au sens de l'article L. 5212-16 du code général des collectivités territoriales pour tenir compte de sa nouvelle compétence à caractère optionnel relative à la distribution d'eau ; qu'ainsi et alors que le syndicat en cause conserve sa compétence originelle en matière de gestion de l'eau et des cours d'eau et d'alimentation en eau potable, la communauté d'agglomération requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du préfet du Morbihan du 22 juillet 2011 aurait eu pour objet ou pour effet de créer un nouveau syndicat ; que, par suite, Lorient Agglomération ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions des articles L. 5212-2 et L. 5211-45 du code général des collectivités territoriales ;
7. Considérant, en troisième lieu, que Lorient Agglomération soutient que l'arrêté préfectoral du 22 juillet 2011 est consécutif à la délibération du 28 octobre 2010 par laquelle le comité syndical du syndicat départemental de l'eau a approuvé la modification de ses statuts, qui serait elle-même illégale au motif que l'information préalable des membres du comité syndical aurait été insuffisante ; que dès lors qu'il est constant qu'à cette date du 28 octobre 2010 la communauté d'agglomération requérante n'exerçait aucune compétence dans le domaine de la gestion de l'eau, l'exercice d'une telle compétence n'ayant été approuvé qu'ultérieurement par une délibération du 10 décembre 2010 du conseil de la communauté d'agglomération du pays de Lorient, ainsi qu'il ressort des visas de l'arrêté du préfet du Morbihan du 25 juillet 2011 modifiant les statuts de celle-ci, la note explicative de synthèse transmise aux membres du comité syndical du SDE en vue de la séance du 28 octobre 2010 n'avait pas à mentionner les incidences de l'extension des compétences de Lorient Agglomération sur la composition du syndicat de l'eau du Morbihan, son patrimoine et ses finances ; que, pour le reste, en se bornant sans davantage de précisions à des conjectures telles que " il semble que le second projet de statuts qui aurait été transmis aux membres du comité syndical est substantiellement différent du premier projet joint à la convocation des membres du comité ", la requérante n'établit pas que l'information des membres du comité du syndicat départemental de l'eau aurait été insuffisante préalablement à sa délibération du 28 octobre 2010 approuvant la modification des statuts du syndicat entérinée par l'arrêté préfectoral du 22 juillet 2011 ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant à renvoyer aux autres moyens soulevés dans ses écritures de première instance sans préciser en quoi le jugement attaqué aurait répondu de manière erronée à ceux-ci, la requérante ne met pas la cour en mesure d'apprécier la portée du surplus de son argumentation d'appel ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le syndicat départemental de l'eau du Morbihan, que la communauté d'agglomération Lorient Agglomération n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat départemental de l'eau du Morbihan, qui n'est pas la partie perdante, la somme que la communauté d'agglomération Lorient Agglomération demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
11. Considérant, en revanche, qu'il y a lieu de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Lorient Agglomération la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le syndicat départemental de l'eau du Morbihan et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération du pays de Lorient est rejetée.
Article 2 : La communauté d'agglomération du pays de Lorient versera au syndicat départemental de l'eau du Morbihan une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération du pays de Lorient, au syndicat départemental de l'eau du Morbihan et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet du Morbihan.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 avril 2017.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.