3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 18 juin 2019 portant assignation à résidence, ou à défaut d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de modifier la décision dans le sens d'une présentation mensuelle, de dire que les heures de présentation n'ont pas à être fixées par le préfet et qu'il ne peut être obligé de venir avec ses effets personnels, et d'enjoindre au préfet de lui délivrer le formulaire portant information des personnes assignées à résidence, prévu par l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en langue arabe, chaque injonction étant prononcée sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai de cinq jours ouvrés ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire à titre principal, de reconnaitre la responsabilité de la France dans l'examen de sa demande d'asile et de lui délivrer une attestation de demande d'asile portant la mention " demandeur d'asile en procédure normale " et le formulaire prévu par les dispositions de l'article R. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans un délai de cinq jours ouvrés sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son avocate au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- il doit être enjoint au préfet de Maine-et-Loire de produire les arrêtés annoncés en pièces 8 et 9 du bordereau de communication en première instance ; dans l'hypothèse où ces arrêtés seraient divergents avec le contenu des arrêtés qui lui ont été notifiés, la procédure serait nulle ;
. en ce qui concerne la décision portant transfert aux autorités italiennes :
- le signataire de la décision n'est pas compétent ; si Mme C... dispose d'une délégation de signature, l'administration ne démontre pas que le préfet était absent ou empêché le jour de la signature de l'arrêté contesté ; en outre, l'arrêté de délégation du 11 juin 2019 au profit de Mme C... ne vise pas l'arrêté de nomination de cette dernière en méconnaissance de l'article 43 du décret n° 2004/374 du 29 avril 2004 ; la délégation de signature accordée à Mme C... est donc irrégulière puisque le préfet ne produit pas l'acte de nomination de Mme C... à ses fonctions ;
- la décision est insuffisamment motivée car motivée de manière stéréotypée ; la décision se borne à reprendre les éléments d'information tirés du fichier Eurodac sans procéder à un examen de sa situation personnelle ; un élément ne correspond pas à sa situation puisqu'il est indiqué qu'il n'a pas de membres de sa famille en France ce qui est faux, son oncle résidant en Loire-Atlantique ;
- en l'absence de production de l'accusé de de réception prévu par le règlement de la commission n° 1560/2003 du 2 septembre 2003, il n'est pas établi que la requête aux fins de reprise en charge a été présentée dans le délai de deux mois prévu par l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; le préfet s'est borné à produire l'accusé de réception émis par le point d'accès national des autorités françaises et non l'accusé de réception de la requête en reprise émis par les autorités italiennes ;
- il n'est pas établi que les délais de procédure prévus par les articles 21 et 22.6 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 applicables aux requêtes aux fins de prise en charge urgentes ont été respectés ; le préfet ayant sollicité le 17 avril 2019 une réponse en urgence, les autorités italiennes disposaient d'un délai d'un mois, soit une décision implicite après le 17 mai 2019 ; l'administration française a néanmoins considéré que l'accord implicite de l'Italie était acquis le 3 mai 2019, date à laquelle elle a transmis aux autorités italiennes le constat d'accord implicite de prise en charge ;
- la prolongation du délai de transfert de six mois n'est pas intervenue avant son expiration ; la France est donc devenue responsable de l'examen de sa demande d'asile le 10 janvier 2020 ;
- il n'est pas établi que les autorités italiennes ont été informées de la prolongation du délai de transfert en application de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 9 du règlement de la Commission du 2 septembre 2003 ; le préfet ne produit pas l'accusé de réception des autorités italiennes ; il n'est pas établi que les autorités italiennes ont été informées avant l'expiration du délai de transfert au 10 janvier 2020 ;
- il ne peut être regardé comme étant en fuite dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a eu l'intention de se soustraire aux autorités ; il n'a pas eu l'information relative à la procédure Dublin et notamment quant à la prolongation du délai de six mois en cas de fuite ; la convocation du 2 janvier 2020 pour se présenter à l'aéroport lui a été notifié avec l'aide par téléphone d'un interprète en langue arabe alors qu'il ne sait pas lire, parle le fur et peut comprendre l'arabe soudanais ; la convocation à l'aéroport de Nantes en vue de son transfert vers l'Italie ne lui a pas été notifiée dans une des deux langues qu'il comprend ; la convocation du 2 janvier 2020 ne lui a pas été notifiée avec suffisamment d'éléments explicatifs pour pouvoir s'y conformer ; alors qu'il était convoqué à 4 heures du matin, les autorités ne lui ont donné ni l'adresse de l'aéroport, ni proposé de moyens de transport ; il ne s'est pas soustrait et a prévenu l'autorité administrative qu'il ne pouvait se rendre en pleine nuit à l'aéroport ;
- les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues ; les guides A et B lui ont été remis en langue arabe classique alors qu'il ne comprend que l'arabe soudanais et ne sait pas lire ; il n'est pas établi que l'information requise lui ait été apportée par oral lors de l'entretien ; l'interprétariat en arabe soudanais a été effectué par l'association AFTcom qui ne disposait pas d'agrément d'organisme d'interprétariat à la date de l'entretien individuel, l'agrément lui ayant été accordé à compter du 2 mai 2019 ;
- les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues :
o le tribunal administratif n'a pas répondu au moyen concernant l'absence d'entretien dans une langue permettant une bonne compréhension ; le tribunal administratif a retenu à tort qu'il avait bénéficié d'un interprétariat via ISM-interprétariat, alors que l'interprétariat a été assuré par l'agence AFTcom, lequel n'a d'agrément que depuis le 2 mai 2019 ;
o il n'est pas établi que l'entretien a été mené par une personne qualifiée ; il n'y a aucune mention du nom et de la qualité de la personne ayant mené l'entretien ; le jugement a inversé la charge de la preuve en indiquant que l'agent de la préfecture habilité est réputé qualifié ; il n'est pas établi que l'agent ayant mené l'entretien avait reçu une formation spécifique à cette fin conformément à l'article L. 744-6 alinéa 3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
o il n'est pas établi que l'entretien a été mené dans le respect des garanties de confidentialité ;
o l'interprétariat n'a pas été mené par un organisme agréé à la date de l'entretien ;
- les dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ont été méconnues, ainsi que les dispositions de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne et les dispositions des articles 17, 18 et 19 de la directive " Accueil " du 26 juin 2013 ; il est impossible de transférer en Italie du fait des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et dans les conditions d'accueil des demandeurs ; il n'a pas à établir qu'il est personnellement exposé à des risques de traitements inhumains et dégradants en Italie ; il existe des risques de ne pas avoir accès au droit d'asile en Italie ; le dispositif " hotspots " est inefficace pour identifier, orienter et protéger les demandeurs d'asile ; il existe un risque de refoulement des personnes sans qu'elles aient été mises en mesure de demander le bénéfice d'une protection internationale ; il existe des entraves administratives pour l'accès à la procédure d'asile et à la protection internationale ; il n'a pas pu déposer de demande d'asile en Italie lors de son transfert en février 2019 ; les conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile transférés vers l'Italie sont défaillantes ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'application de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; l'Italie n'a pas donné d'accord explicite pour son transfert ce qui implique qu'il n'y a aucune garantie qu'il puisse déposer une demande d'asile en Italie ; il existe un risque d'expulsion de l'Italie vers le Soudan compte tenu de la pratique observée et de la coopération entre les autorités italiennes et soudanaises en matière d'expulsion ; il fera probablement l'objet d'une mesure d'éloignement à son arrivée en Italie ; en outre, la seule appartenance à une ethnie non arabe du Darfour constitue un facteur de persécution au Soudan ; en tant que membre de l'ethnie fur, ethnie non arabe particulièrement engagée dans la lutte contre les milices pro-gouvernementales, il est considéré comme personne à risque en cas de renvoi au Soudan en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il a rejoint en France son oncle qui bénéficie du statut de réfugié ;
- la décision qui mentionne qu'il n'a pas de membre de sa famille en France est entachée d'une erreur de fait ;
- le jugement qui indique qu'il n'établit pas la réalité et l'intensité des liens familiaux entretenus avec son oncle est entaché d'erreur de fait et dénature les faits soumis ;
- il n'est pas établi que le préfet de Maine-et-Loire a effectivement informé les autorités italiennes de sa volonté de procéder au transfert le 8 janvier 2020 en méconnaissance de l'article 31 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; il ne produit ni accusé de réception du courriel qu'il aurait adressé en vue de l'exécution de la procédure de transfert ni le formulaire type qui doit être adressé aux autorités italiennes ; le préfet n'apporte pas la preuve d'une réservation d'une place sur un vol à destination de l'Italie ;
. en ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de transfert ;
- le signataire de la décision n'est pas compétent ; si Mme C... dispose d'une délégation de signature, l'administration ne démontre pas que le préfet était absent ou empêché le jour de la signature de l'arrêté contesté ; en outre, l'arrêté de délégation du 11 juin 2019 au profit de Mme C... ne vise pas l'arrêté de nomination de cette dernière en méconnaissance de l'article 43 du décret n° 2004/374 du 29 avril 2004 ; la délégation de signature accordée à Mme C... est donc irrégulière puisque le préfet ne produit pas l'acte de nomination de Mme C... à ses fonctions ;
- la décision est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet n'a pas motivé l'opportunité de prononcer une assignation à résidence ;
- le préfet n'a pas motivé la fréquence de l'obligation de pointage ; le jugement n'a pas répondu au moyen tiré du défaut de motivation de la fréquence de l'obligation de pointage ;
- l'obligation de se présenter à horaires fixes ou l'obligation de se présenter avec des effets personnels sont entachées de défaut de base légale et ne sont pas prévues par l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de trois pointages hebdomadaires est disproportionnée et entachée d'erreur d'appréciation ; il ne présente aucun risque de fuite puisqu'il ne s'est pas soustrait à un précédent transfert en Italie ; le jugement n'a pas répondu au moyen tiré du caractère disproportionné de l'obligation de pointage ;
- le jugement a constaté que l'information due en application de l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui avait pas été délivrée lors de la notification de son arrêté mais n'a pas statué sur sa demande de régularisation de la notification et l'injonction demandée.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 novembre 2019 et le 29 janvier 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 3 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne ;
- le règlement (C.E) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- la directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme F..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant soudanais né en mars 1994, a déposé en France une demande d'asile qui a été enregistrée le 31 juillet 2018. Il a fait l'objet, le 17 décembre 2018, d'une décision de transfert vers l'Italie en vue de l'examen de sa demande d'asile, transfert qui a été effectivement exécuté le 27 février 2019. Postérieurement, M. B... est de nouveau entré en France et a présenté une demande d'asile qui a été enregistrée le 15 avril 2019. Par une décision du 18 juin 2019, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile, et par une décision du même jour, a également prononcé son assignation à résidence dans le département de la Loire-Atlantique. M. B... relève appel du jugement du 8 juillet 2019 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 18 juin 2019.
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de produire des documents :
2. Si les pièces numérotées 8 et 9 annexées au mémoire en défense du préfet de Maine-et-Loire enregistré au greffe du tribunal administratif de Nantes le 2 juillet 2019 à 9 heures 05 ne figuraient pas dans les pièces effectivement produites à l'appui de ce mémoire, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la demande adressée par le tribunal administratif, le préfet de Maine-et-Loire a communiqué ces pièces le 2 juillet 2019 à 11 heures 19. Ces pièces ont en outre été communiquées à M. B... dans le cadre de la présente instance devant la cour administrative d'appel. Il suit de là que les conclusions de M. B... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de lui communiquer les pièces n° 8 et n° 9 de son mémoire en défense devant le tribunal administratif de Nantes doivent être rejetées. Ces pièces ne diffèrent, en tout état de cause, pas des arrêtés notifiés à l'intéressé.
Sur l'exception de non-lieu à statuer :
3. L'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " (...) 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite (...) ". Par ailleurs, l'article 7 du règlement n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 dispose que : " 1. Le transfert vers l'État responsable s'effectue de l'une des manières suivantes : / a) à l'initiative du demandeur, une date limite étant fixée ; / b ) sous la forme d'un départ contrôlé, le demandeur étant accompagné jusqu'à l'embarquement par un agent de l'État requérant et le lieu, la date et l'heure de son arrivée étant notifiées à l'État responsable dans un délai préalable convenu ; / c ) sous escorte, le demandeur étant accompagné par un agent de l'État requérant, ou par le représentant d'un organisme mandaté par l'État requérant à cette fin, et remis aux autorités de l'État responsable (...) ". Il résulte de ces dispositions que le transfert d'un demandeur d'asile vers un Etat membre qui a accepté sa prise ou sa reprise en charge, sur le fondement du règlement du 26 juin 2013, s'effectue selon l'une des trois modalités définies à l'article 7 précité : à l'initiative du demandeur, sous la forme d'un départ contrôlé ou sous escorte.
4. Il résulte clairement des dispositions citées au point précédent que, d'une part, la notion de fuite doit s'entendre comme visant le cas où un ressortissant étranger se serait soustrait de façon intentionnelle et systématique au contrôle de l'autorité administrative en vue de faire obstacle à une mesure d'éloignement le concernant. D'autre part, dans l'hypothèse où le transfert du demandeur d'asile s'effectue sous la forme d'un départ contrôlé, il appartient, dans tous les cas, à l'Etat responsable de ce transfert d'en assurer effectivement l'organisation matérielle et d'accompagner le demandeur d'asile jusqu'à l'embarquement vers son lieu de destination. Une telle obligation recouvre la prise en charge du titre de transport permettant de rejoindre l'Etat responsable de l'examen de la demande d'asile depuis le territoire français ainsi que, le cas échéant et si nécessaire, celle du pré-acheminement du lieu de résidence du demandeur au lieu d'embarquement. Enfin, dans l'hypothèse où le demandeur d'asile se soustrait intentionnellement à l'exécution de son transfert ainsi organisé, il doit être regardé comme en fuite au sens des dispositions de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013 rappelées au point 3.
5. Il ressort des pièces du dossier que par une décision du 8 janvier 2020, le préfet de Maine-et-Loire a prononcé la prolongation du délai de transfert de M. B... jusqu'au 10 janvier 2021 après avoir considéré que ce dernier avait pris la fuite. Il ressort également des pièces du dossier que le préfet a estimé que M. B... avait pris la fuite au motif que ce dernier ne s'est pas présenté à l'aéroport de Nantes, où il avait été convoqué le mercredi 8 janvier 2020 avant 4 heures du matin. Néanmoins, la seule circonstance que M. B... ne s'est pas rendu à l'aéroport de Nantes à la date et l'heure ainsi indiquées alors que, son transfert devant s'effectuer sous la forme d'un départ contrôlé, il appartenait aux autorités françaises d'en assurer effectivement l'organisation matérielle et d'accompagner le demandeur d'asile jusqu'à l'embarquement vers son lieu de destination et, en particulier, d'assurer le pré-acheminement de son lieu de résidence au lieu d'embarquement, ne saurait suffire à établir que M. B..., qui au demeurant a contacté le jour même une assistante sociale pour lui demander d'informer la préfecture de son impossibilité de se rendre à l'aéroport avant 4 heures du matin en l'absence de transport en commun, se serait soustrait intentionnellement à l'exécution de son transfert ainsi organisé et devrait donc être regardé comme étant en fuite au sens des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
6. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de Maine-et-Loire a estimé qu'il était en fuite pour prolonger le délai de transfert jusqu'au 10 janvier 2021. Il résulte de ce qui précède que le délai d'exécution de la décision de transfert auprès des autorités italiennes expirait au 10 janvier 2020. Par suite, la décision de transfert est devenue caduque sans avoir reçu un commencement d'exécution. Il en résulte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 juin 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes, ainsi que sur les conclusions à fin d'injonction qui y sont associées.
Sur la régularité du jugement attaqué :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
8. D'une part, contrairement à ce que soutient l'appelant, le premier juge a répondu, au point 8 de son jugement, au moyen tiré du fait qu'en méconnaissance de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'entretien prévu par ces dispositions ne se serait pas déroulé dans une langue qu'il comprenait. Le tribunal administratif a ainsi relevé, dans son point 8, que l'entretien a été mené avec l'assistance d'un interprète en arabe soudanais. En outre, il ressort des pièces du dossier qu'au point 15 de son jugement, le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté portant assignation à résidence. En outre, l'obligation de présentation et l'obligation de remise de l'original de son passeport ou de tout autre document d'identité ou de voyage, auxquelles un étranger est susceptible d'être astreint sur le fondement des articles R. 561-2 et R. 561-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a pour objet de concourir à la mise en oeuvre de l'assignation à résidence. Dans ces conditions, l'obligation de motivation exigible à l'égard des mesures de police en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être regardée comme satisfaite dès lors que l'assignation à résidence est elle-même régulièrement motivée, sans que l'obligation de présentation ait à faire l'objet d'une motivation spécifique. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif aurait omis de répondre à son moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de pointage qui lui a été imposée dans l'arrêté portant assignation à résidence.
9. D'autre part, si M. B... soutient que le premier juge a omis de répondre à ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer le formulaire prévu par les dispositions de l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel doit accompagner la notification d'un arrêté portant assignation à résidence, il ressort de la lecture du jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes que ce dernier a visé explicitement ces conclusions et a rejeté, au point 19 de son jugement, l'ensemble des conclusions à fin d'injonction présentées pour le compte de M. B....
10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé.
11. En second lieu, M. B... soutient que le premier juge aurait commis une erreur de fait en retenant qu'il n'établissait pas la réalité et l'intensité des liens familiaux entretenus avec son oncle. Ce moyen procède toutefois d'une contestation du bien-fondé du jugement et non de sa régularité.
Sur la décision portant assignation à résidence :
12. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à son annulation.
En ce qui concerne l'exception d'illégalité du transfert auprès des autorités italiennes :
13. En premier lieu, l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements dispose que : " Le préfet de département peut donner délégation de signature, notamment en matière d'ordonnancement secondaire : (...) / 2° Pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat dans le département ; ces chefs de service peuvent recevoir délégation afin de signer les lettres d'observation valant recours gracieux adressées aux collectivités territoriales ou à leurs établissements publics ; / (...) 7° Aux agents en fonction dans les préfectures, pour les matières relevant des attributions du ministre de l'intérieur, y compris les lettres d'observation valant recours gracieux formés auprès des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, pour les matières relevant des ministères qui ne disposent pas de services dans le département ainsi que pour la transformation en états exécutoires des ordres de recettes mentionnés aux articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (...) ".
14. Par un arrêté du 11 juin 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Maine-et-Loire, le préfet de ce département a donné délégation à Mme D... C..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers et signataire de la décision litigieuse, à l'effet de signer les décisions de transfert prises pour l'application du règlement dit " Dublin III " et les décisions d'assignation à résidence. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cet arrêté vise la nomination de l'agent bénéficiaire de la délégation. Enfin, l'arrêté contesté n'ayant pas été signé en raison de l'absence ou de l'empêchement du préfet, mais en raison de la délégation consentie le 11 juin 2019, M. B... n'est pas fondé à soutenir, en tout état de cause, que l'administration n'établit pas cette absence ou cet empêchement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué manque en fait.
15. En deuxième lieu, l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. / Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative. / Cette décision est notifiée à l'intéressé. Elle mentionne les voies et délais de recours ainsi que le droit d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix. Lorsque l'intéressé n'est pas assisté d'un conseil, les principaux éléments de la décision lui sont communiqués dans une langue qu'il comprend ou dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend. (...) ".
16. L'arrêté du 18 juin 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes comporte l'exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui le fondent. Il comporte notamment l'ensemble des éléments de fait caractérisant la situation de M. B... tels qu'il en avait fait part au cours de l'entretien préalable. La circonstance que l'arrêté mentionne, à tort, que M. B... aurait indiqué ne pas avoir de membres de sa famille en France n'est pas de nature à caractériser une insuffisance de motivation. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté dont l'illégalité est invoquée doit être écarté.
17. En troisième lieu, l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif ("hit") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) n° 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement. / Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéas, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'État membre auprès duquel la demande a été introduite (...) ". Par ailleurs, l'article 23 du même règlement dispose que : " 1. Lorsqu'un État membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre État membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / 2. Une requête aux fins de reprise en charge est formulée aussi rapidement que possible et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la réception du résultat positif Eurodac ("hit"), en vertu de l'article 9, paragraphe 5, du règlement (UE) n° 603/2013. (...) / 3. Lorsque la requête aux fins de reprise en charge n'est pas formulée dans les délais fixés au paragraphe 2, c'est l'État membre auprès duquel la nouvelle demande est introduite qui est responsable de l'examen de la demande de protection internationale ". Par ailleurs, il résulte des dispositions des articles 15 et 19 du règlement (CE) de la Commission du 2 septembre 2003 que le réseau de communication " DubliNet " permet des échanges d'informations fiables entre les autorités nationales qui traitent les demandes d'asile et que les accusés de réception émis par un point d'accès national sont réputés faire foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse.
18. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a fait l'objet d'une demande de prise en charge adressée par la France aux autorités italiennes et non d'une procédure de reprise en charge. Il ne peut utilement invoquer la méconnaissance des délais prévus par les dispositions de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu'alors que le résultat positif Eurodac a été obtenu le 15 avril 2019, les autorités françaises ont adressé dès le 17 avril 2019, soit dans le délai prévu par les dispositions de l'article 21 du règlement du 26 juin 2013, une demande de prise en charge auprès des autorités italiennes, lesquelles ont accusé réception de cette demande le jour-même.
19. En quatrième lieu, le 2 de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 2. L'État membre requérant peut solliciter une réponse en urgence dans les cas où la demande de protection internationale a été introduite à la suite d'un refus d'entrée ou de séjour, d'une arrestation pour séjour irrégulier ou de la signification ou de l'exécution d'une mesure d'éloignement. / La requête indique les raisons qui justifient une réponse urgente et le délai dans lequel une réponse est attendue. Ce délai est d'au moins une semaine (...) ". Par ailleurs, l'article 22 du même règlement dispose que : " (...) 6. Si l'État membre requérant a invoqué l'urgence conformément aux dispositions de l'article 21, paragraphe 2, l'État membre requis met tout en oeuvre pour respecter le délai demandé. Exceptionnellement, lorsqu'il peut être démontré que l'examen d'une requête aux fins de prise en charge d'un demandeur est particulièrement complexe, l'État membre requis peut donner sa réponse après le délai demandé, mais en tout état de cause dans un délai d'un mois. Dans ce cas, l'État membre requis doit informer l'État membre requérant dans le délai initialement demandé qu'il a décidé de répondre ultérieurement (...) ".
20. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire aurait fixé un délai d'un mois aux autorités italiennes pour répondre à sa demande de prise en charge urgente de M. B... formulée en application du 2 de l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, ce délai ne correspondant qu'au délai maximum laissé par le 6 de l'article 22 du même règlement pour la réponse aux demandes urgentes lorsque l'examen de la requête aux fins de prise en charge s'avère particulièrement complexe. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que les autorités françaises ont méconnu ces dispositions en estimant être dès le 3 mai 2019 en possession d'un accord implicite des autorités italiennes.
21. En cinquième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. (...) ".
22. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre l'ensemble des éléments d'information prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. La remise de ces éléments doit intervenir en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations. Eu égard à leur nature, la remise par l'autorité administrative de ces informations prévues par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
23. Il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est vu remettre, le 15 avril 2019, le jour même de l'enregistrement de sa demande d'asile en préfecture, et à l'occasion de l'entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées, en langue arabe. Si l'intéressé soutient ne pas comprendre l'arabe classique, langue qu'il a néanmoins désignée comme langue comprise, il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu d'entretien sur lequel il a apposé sa signature, que les informations contenues dans les brochures A et B lui ont été communiquées oralement alors que l'entretien a été mené avec l'aide téléphonique d'un interprète en arabe soudanais. La circonstance que l'AFTCOM, agence de traduction à laquelle appartient l'interprète ayant assisté M. B... n'ait été agréée que quelques jours après l'entretien n'a pas privé l'intéressé d'une garantie. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.
24. En sixième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".
25. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. B... qu'il a bénéficié le 15 avril 2019, soit avant l'intervention de la décision contestée, de l'entretien individuel prévu par l'article 5 précité du règlement n° 604/2013. Cet entretien s'est tenu en arabe soudanais, que l'intéressé a déclaré comprendre, avec le concours par téléphone d'un interprète, intervenant pour le compte de l'agence AFTCOM. La circonstance que cette agence de traduction a été agréée par le ministre de l'intérieur quelques jours après cet entretien n'a pas privé M. B... d'une garantie, l'intéressé n'invoquant pas que ses propos auraient été tronqués on interprétés de manière erronée. Il n'est pas établi que le requérant n'aurait pas été en capacité de comprendre les informations qui lui ont été délivrées et de faire valoir toutes observations utiles relatives à sa situation au cours de l'entretien, ainsi que cela ressort du compte-rendu qui en a été établi. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet entretien n'aurait pas été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national et dans des conditions qui n'en auraient pas garanti la confidentialité. En outre, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité de l'agent ayant conduit l'entretien n'a pas privé le requérant de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien individuel. Dès lors, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 n'est pas fondé et doit être écarté.
26. En septième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Les États membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux, y compris à la frontière ou dans une zone de transit. La demande est examinée par un seul État membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable. / (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable (...) ". Par ailleurs, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dispose de même que : " Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
27. Le requérant invoque l'existence de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie. Toutefois, ses allégations de caractère général ne permettent ni de considérer que les autorités italiennes, qui ont donné leur accord implicite à la demande de prise en charge adressée par les autorités françaises, ne sont pas en mesure de traiter sa demande d'asile dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ni de supposer que, compte tenu de défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile en Italie, le requérant courrait dans cet Etat membre de l'Union européenne un risque réel d'être soumis à des traitements inhumains ou dégradants, au sens des dispositions de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, si M. B... soutient qu'il n'a pu déposer de demande d'asile après l'exécution du précédent transfert en février 2019, il résulte de ses écritures mêmes qu'il n'est demeuré que trois jours en Italie avant d'entrer à nouveau sur le territoire français. Enfin, l'arrêté contesté a pour unique objet de prononcer son transfert auprès des autorités italiennes pour l'examen de sa demande d'asile et non de l'éloigner en direction du Soudan. En produisant des décisions italiennes d'éloignement concernant des compatriotes soudanais, M. B... n'établit, ni même ne soutient qu'il ferait l'objet lui-même d'une décision d'éloignement du territoire italien devenue définitive et qu'il serait exposé à un risque d'éloignement vers le Darfour. Dès lors, l'arrêté de transfert contesté ne méconnaît pas les dispositions précitées du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
28. En huitième lieu, aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) 2. L'État membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'État membre responsable, ou l'État membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre État membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre État membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit. ".
29. M. B... fait état de divers rapports établis par des organisations non gouvernementales ou internationales, mettant en évidence les difficultés rencontrées par l'Italie dans la prise en charge des migrants. Cependant, les constats d'ordre général concernant le traitement par les autorités italiennes des demandes d'asile, dont le requérant se prévaut, ne permettent, à eux seuls, ni d'établir que l'intéressé n'aura pas accès à la procédure d'asile en Italie ni de démontrer que les conditions d'accueil qui lui seront réservées dans ce pays seraient indignes au point de placer l'intéressé dans une situation de vulnérabilité telle que sa demande d'asile devrait être instruite en France. Ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Maine-et-Loire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de la faculté que lui accorde l'article 17 précité du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
30. En neuvième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
31. La seule circonstance que l'oncle de M. B..., entré en France en 2015 et bénéficiant du statut de réfugié depuis 2016, réside en France ne permet pas d'établir que la décision de transférer M. B... en Italie pour l'examen de sa demande d'asile porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale. Dans ces conditions, la circonstance que l'arrêté contesté indiquerait à tort que M. B... avait déclaré ne pas avoir de membre de sa famille en France est sans incidence sur sa légalité, alors surtout que son oncle n'a pas, vis-à-vis de lui, la qualité de " membre de la famille " au sens du g) de l'article 2 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur de fait doivent être écartés.
32. En dernier lieu, l'article 31 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. L'État membre procédant au transfert d'un demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), communique à l'État membre responsable les données à caractère personnel concernant la personne à transférer qui sont adéquates, pertinentes et raisonnables, aux seules fins de s'assurer que les autorités qui sont compétentes conformément au droit national de l'État membre responsable sont en mesure d'apporter une assistance suffisante à cette personne, y compris les soins de santé urgents indispensables à la sauvegarde de ses intérêts essentiels, et de garantir la continuité de la protection et des droits conférés par le présent règlement et par d'autres instruments juridiques pertinents en matière d'asile. Ces données sont communiquées à l'État membre responsable dans un délai raisonnable avant l'exécution d'un transfert, afin que ses autorités compétentes conformément au droit national disposent d'un délai suffisant pour prendre les mesures nécessaires. / 2. L'État membre procédant au transfert transmet à l'État membre responsable les informations qu'il juge indispensables à la protection des droits de la personne à transférer et à la prise en compte de ses besoins particuliers immédiats, dans la mesure où l'autorité compétente conformément au droit national dispose de ces informations, et notamment : / a) les mesures immédiates que l'État membre responsable est tenu de prendre aux fins de s'assurer que les besoins particuliers de la personne à transférer sont adéquatement pris en compte, y compris les soins de santé urgents qui peuvent s'avérer nécessaires; (...) / d) une évaluation de l'âge du demandeur. / 3. L'échange d'informations prévu par le présent article ne s'effectue qu'entre les autorités notifiées à la Commission conformément à l'article 35 du présent règlement, au moyen du réseau de communication électronique "DubliNet" établi conformément à l'article 18 du règlement (CE) n° 1560/2003. Les informations échangées ne sont utilisées qu'aux fins prévues au paragraphe 1 du présent article et ne font pas l'objet d'un traitement ultérieur (...) ".
33. Il résulte des termes mêmes de cet article, et notamment de son titre, qu'il est relatif aux modalités d'exécution d'une décision de transfert. Ses dispositions n'imposent pas que l'échange d'information ait lieu avant l'édiction de la décision de transfert, mais seulement dans un délai raisonnable avant le transfert effectif de la personne intéressée. Dès lors, à la supposer même établie, son inobservation à la date de l'arrêté en litige est sans influence sur la légalité de ce dernier.
34. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à invoquer, à l'encontre de la décision portant assignation à résidence, l'exception d'illégalité de l'arrêté du 18 juin 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés à l'encontre de l'assignation à résidence :
35. L'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / (...) 1° bis Fait l'objet d'une décision de transfert en application de l'article L. 742-3 ou d'une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ; (...) / Les huit derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois pour les cas relevant des 1° et 2° à 7° du présent I, ou trois fois pour les cas relevant du 1° bis (...) ". L'article L. 561-1 du même code dispose que : " (...) La décision d'assignation à résidence est motivée. Elle peut être prise pour une durée maximale de six mois, renouvelable une fois dans la même limite de durée, par une décision également motivée (...) ".
36. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 14 du présent arrêt.
37. En deuxième lieu, la décision du 18 juin 2019 portant assignation à résidence de M. B... dans le département de la Loire-Atlantique comporte l'exposé détaillé des considérations de droit et de fait qui la fondent. Elle est ainsi suffisamment motivée au regard des dispositions combinées des articles L. 561-2 et L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision n'est donc pas fondé et doit être écarté. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, au point 8 du présent arrêt, l'obligation de présentation et l'obligation de remise de l'original de son passeport ou de tout autre document d'identité ou de voyage, auxquelles un étranger est susceptible d'être astreint sur le fondement des articles R. 561-2 et R. 561-3 du même code, a pour objet de concourir à la mise en oeuvre de l'assignation à résidence. Dans ces conditions, l'obligation de motivation exigible à l'égard des mesures de police en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration doit être regardée comme satisfaite dès lors que l'assignation à résidence est elle-même régulièrement motivée, sans que l'obligation de présentation ait à faire l'objet d'une motivation spécifique.
38. En dernier lieu, l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application des articles L. 561-1, L. 561-2, L. 744-9-1 ou L. 571-4 ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5 est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés. / Toutefois, lorsque l'étranger est assigné à résidence en application de l'article L. 561-1 au titre du 5° de cet article ou d'une des mesures prévues aux articles L. 523-3, L. 523-4 et L. 523-5, l'autorité administrative peut fixer à quatre au plus le nombre de présentations quotidiennes. La même autorité administrative est compétente pour désigner à l'étranger assigné à résidence, en application de l'article L. 561-1, une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il réside ".
39. Il résulte des dispositions précitées que le préfet a pu, sans entacher sa décision d'un défaut de base légale, assortir sa décision d'assignation à résidence de M. B... de l'obligation pour celui-ci de se présenter les mardis, mercredis et jeudis, à l'exception des jours fériés, aux services du commissariat de police de Nantes, à 8 heures du matin, muni de ses effets personnels. La circonstance que cette notion d'effets personnels ne serait mentionnée par aucun texte législatif ou réglementaire demeure sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Par ailleurs, il n'est pas démontré que cette obligation et ses modalités présenteraient pour l'intéressé un caractère disproportionné. Par suite, les moyens tirés du défaut de base légale et de l'erreur manifeste d'appréciation qui entacheraient la décision d'assignation doivent être écartés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
40. Si, compte tenu de la caducité de la décision de transfert contestée, la France est l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile présentée par M. B..., le présent arrêt n'implique, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées, y compris les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer le formulaire prévu par les dispositions de l'article R. 561-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur les frais liés au litige :
41. Il n'y pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... aux fins d'annulation de la décision du 18 juin 2019 portant transfert auprès des autorités italiennes.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président-assesseur,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique le 18 septembre 2020.
La rapporteure,
M. F...Le président,
L. LAINÉ
La greffière,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT03455