Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 octobre 2015 et 16 novembre 2015, M. C..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 15 septembre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 avril 2015 du préfet du Loiret ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut de procéder au réexamen de sa situation et de l'admettre au séjour durant ce laps de temps, dans un délai d'un mois suivant la notification du jugement à intervenir et d'assortir ces injonctions d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
- le préfet a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la situation sanitaire en République démocratique du Congo, ainsi que le coût des soins ne lui permettent pas de pouvoir y bénéficier de façon satisfaisante des soins nécessaires au traitement de son hépatite B ; il a déjà bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade entre le 10 janvier 2013 et le 3 février 2015, pour la même pathologie ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il est en France depuis cinq ans et il a été engagé dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée lorsqu'il était titulaire d'un titre de séjour l'autorisant à travailler ; il vit en concubinage avec une compatriote qui est titulaire d'une carte de résident délivrée en qualité de réfugiée ; ils ont initié des démarches d'assistance à la procréation qui nécessitent sa présence auprès de sa compagne ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- le préfet aurait du lui délivrer à titre exceptionnel et humanitaire un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a omis de saisir la commission du titre de séjour ;
En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :
- la décision de refus de titre de séjour encourant l'annulation, le même sort ne peut dès lors que s'attacher à la décision portant obligation de quitter le territoire français qui est ainsi dépourvue de base légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2015, le préfet du Loiret, conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur.
1. Considérant que M.C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, allègue être entré en France le 20 décembre 2010 ; que sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 13 décembre 2011, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile le 10 octobre 2012 ; qu'en raison de son état de santé, il a obtenu une carte de séjour temporaire du 26 décembre 2012 au 3 février 2015 ; que par l'arrêté contesté du 21 avril 2015, le préfet du Loiret a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre de séjour en assortissant sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et en fixant le pays de destination ; que par la présente requête, M. C...relève appel du jugement du 15 septembre 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 21 avril 2015 du préfet du Loiret ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé (...). Le médecin de l'agence régionale de santé (...) peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé allant dans le sens de ses conclusions doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que, pour refuser de renouveler la carte de séjour temporaire de M. C..., le préfet du Loiret s'est fondé sur l'avis du 23 février 2015 émis par le médecin de l'agence régionale de santé de la région Centre, selon lequel l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité et il existe un traitement approprié dans son pays d'origine ; que M.C..., qui révèle souffrir d'une hépatite B, se borne à renvoyer les juges d'appel aux pièces qu'il a produites en première instance, notamment à une étude réalisée en 2010 par une association suisse, qui souligne la difficulté d'accès aux soins dans certaines régions de la République démocratique du Congo et en ville et la restriction de cet accès à ceux qui peuvent en supporter le coût ; que cette étude générale sur la situation du système sanitaire en République démocratique du Congo n'est pas par elle-même de nature à contredire l'avis précité du médecin de l'agence régionale de santé sur l'existence d'un traitement adéquat, et que dès lors que les dispositions précitées du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impliquent aucune appréciation quant au caractère effectif de l'accès au traitement en raison de la situation particulière du demandeur, l'appelant ne peut utilement se prévaloir du coût financier des soins dans son pays d'origine ; qu'il ressort, par ailleurs, du rapport du docteur Korn du 5 février 2015, également versé en première instance, que la présence d'anticorps HBs et ADN de l'hépatite B dans le sang du patient indiquent une amélioration de son immunité et sa possible guérison, qu'il convient de vérifier par des prises de sang régulières ; que dans ces conditions, M. C...ne peut se prévaloir d'aucune contradiction avec les appréciations précédemment portées par le médecin de l'agence régionale de santé et n'établit pas qu'il n'existerait pas de traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; que, par suite, et alors que M. C...ne fait valoir aucune circonstance humanitaire exceptionnelle au sens du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Loiret n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que M. C...fait valoir qu'il est présent sur le territoire français depuis cinq ans, qu'il a bénéficié d'un contrat de travail, qu'il vit maritalement avec une compatriote ayant le statut de réfugiée avec laquelle il est engagé dans un processus de procréation assistée ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside notamment son fils mineur et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente trois ans ; qu'à supposer que la communauté de vie soit établie avec sa compatriote, elle est récente et il ne justifie pas d'une insertion professionnelle ; que dans les circonstances de l'espèce et alors notamment qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les démarches entamées en vue d'une procédure de procréation médicalement assistée seraient parvenues à un stade avancé à la date de la décision contestée, le préfet du Loiret n'a, en prenant la décision susvisée, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. C...;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
8. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; que si les dispositions de l'article L. 313-14 du code permettent à l'administration de délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " à un étranger pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, il ressort des termes mêmes de cet article, et notamment de ce qu'il appartient à l'étranger de faire valoir les motifs exceptionnels justifiant que lui soit octroyé un titre de séjour, que le législateur n'a pas entendu déroger à la règle rappelée ci-dessus ni imposer à l'administration, saisie d'une demande d'une carte de séjour, quel qu'en soit le fondement, d'examiner d'office si l'étranger remplit les conditions prévues par cet article ; qu'il en résulte que M. C...ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre d'un refus opposé à une demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article ;
9. Considérant, en troisième lieu, que le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d' asile et non du cas de tous les étrangers qui se prévalent du bénéfice de ces dispositions ; qu'il résulte de ce tout ce qui précède que, M. C...ne pouvant prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire, le préfet du Loiret n'était pas tenu de consulter cette commission avant de statuer sur sa demande et n'a dès lors pas méconnu les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant, qu'ainsi qu'il résulte des points 2 à 8, la décision portant refus de séjour n'est pas illégale ; que M. C...n'est par suite pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
12. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. C...ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise pour information au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 1er mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2016.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT03180 2
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