Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 janvier 2017, et son mémoire complémentaire enregistré le 3 avril 2018, M. D... B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 août 2016 ;
2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, à titre principal, de lui faire délivrer un visa de long séjour dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision à venir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de 96 heures à compter de la notification à venir sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-648 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision de la commission est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait l'alinéa 2 de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le mariage de M. et Mme B...ayant été régulièrement transcrit sur les registres de l'Etat civil français le 5 mars 2012 ;
- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2017, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. B...n'a pas été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par décision du 18 janvier 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Sacher
Une note en délibéré présentée par le ministre de l'intérieur a été enregistrée le 13 avril 2018 ;
1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né le 22 juillet 1983, relève appel du jugement en date du 29 août 2016 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France (CRRV) de lui délivrer un visa en qualité de conjoint de ressortissant français ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par la présente loi doit (...) comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que par un courrier du 21 novembre 2013 communiqué à la demande du conseil de M.B..., la CRRV a motivé sa décision en citant les articles L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et en indiquant notamment s'être fondée sur l'absence de liens matrimoniaux et le caractère complaisant du mariage contracté à des fins étrangères à l'institution matrimoniale dans le seul but de faciliter l'établissement en France du demandeur ; qu'ainsi, le requérant disposait des considérations de droit et de fait qui constituaient le fondement de la décision de refus ; que par suite, le moyen tiré du défaut de l'insuffisante motivation de la décision attaquée doit être écarté ;
3. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Outre le cas mentionné au deuxième alinéa, le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public " ; qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude, de nature à justifier légalement le refus de visa ; que la seule circonstance que l'intention matrimoniale d'un seul des deux époux ne soit pas contestée ne fait pas obstacle à ce qu'une telle fraude soit établie ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a épousé le 18 juillet 2011, MmeC..., ressortissante française née le 30 juillet 1956 ; que les époux ont fait connaissance par l'intermédiaire d'internet en février 2010 puis se sont physiquement rencontrés en février 2011 à l'occasion d'un voyage de Mme C...en Algérie ; qu'il ressort de l'audition de l'intéressé réalisée le 22 novembre 2011 en appui de sa demande de visa que Mme C...n'avait réalisé qu'un seul voyage en Algérie entre son mariage en juillet et la première demande de visa en novembre ; que si le requérant se prévaut de neuf voyages réalisés par sa femme entre 2011 et 2017, des conversations par téléphone et par vidéoconférence régulières de sa femme, de photographies et d'attestations, l'ensemble de ces éléments, au demeurant postérieurs pour l'essentiel à la date de la décision attaquée, ne permettent d'établir que la seule intention matrimoniale de Mme C...et non celle de M.B... ; qu'au surplus, les photographies produites ne sont pas datées et les attestations produites apparaissent stéréotypées et peu circonstanciées ; que, dans ces conditions et eu égard au caractère récent de la rencontre et du mariage à la date de dépôt de la demande de visa, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France n'a ni méconnu l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commis une erreur manifeste d'appréciation en rejetant la demande de visa déposée par M. B...pour les motifs susmentionnés ;
5. Considérant en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) " ; qu'en l'absence d'établissement de l'intention matrimoniale de M.B... , ce dernier ne peut se prévaloir des dispositions de l'article précité ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours contre les refus de visas d'entrée en France ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Mony, premier conseiller,
- M. Sacher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 mai 2018.
Le rapporteur,
E. SACHERLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
F PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT00312