Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2018, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 23 février 2018 et d'annuler l'arrêté préfectoral du 1er octobre 2017 ;
2°) d'enjoindre au préfet du Calvados de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation et dans cette attente de lui délivrer un récépissé, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros, à verser à MeB..., en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
- le préfet du Calvados a entaché sa décision d'illégalité résultant d'un défaut d'examen des circonstances propres à sa situation
- la décision attaquée est entachée d'erreur de fait et d'erreur de droit concernant son état de santé et ses liens familiaux en France ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même illégal ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de fait.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 juillet 2018, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- il renvoie à ses écritures de première instance qu'il reprend subsidiairement.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 avril 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Picquet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A...C..., ressortissante mongole née le 20 septembre 1946, est entrée en France en compagnie de son époux le 22 juillet 2011. Sous une fausse identité, elle a formé une demande d'asile qui a été rejetée le 15 mai 2012 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et le 15 juillet 2013 par la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 11 avril 2014, le préfet du Calvados a refusé à Mme C...le droit de séjourner sur le territoire et lui a fait obligation de quitter le territoire. L'intéressée n'a pas déféré à cette décision et a sollicité, le 3 mai 2016, son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er octobre 2017, dont Mme C...a demandé l'annulation, le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Par un jugement du 23 février 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Mme C...fait appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet a considéré que Mme C...n'avait pas d'enfant sur le territoire français. Toutefois, il ressort des pièces nouvelles produites en appel et révélant un état de fait antérieur à la décision préfectorale attaquée, et en particulier des certificats de naissance tenant lieu d'actes d'état-civil, que, si son époux est décédé, ses trois enfants résident en France, sa fille Alimaa s'étant vu accorder le bénéfice de la protection subsidiaire le 13 novembre 2009, son fils Amarsanaa s'étant vu reconnaître le statut de réfugié le 4 mars 2008 et sa fille Bolomaa s'étant également vu reconnaître le statut de réfugié. Ainsi, et alors même que ces éléments n'avaient pas été portés à la connaissance du préfet, la décision préfectorale attaquée est entachée d'une erreur de fait ayant eu une incidence sur sa légalité.
3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la décision refusant à Mme C...la délivrance d'un titre de séjour est illégale. Cette illégalité est de nature à en entraîner l'annulation ainsi que celle, par voie de conséquence, de la décision l'obligeant à quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination. Mme C...est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
4. Le présent arrêt implique seulement, eu égard au motif qui le fonde, que le préfet du Calvados réexamine la situation de MmeC.... Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans cette attente, de munir l'intéressée d'une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me B...de la somme demandée au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 23 février 2018 et les décisions du 1er octobre 2017 du préfet du Calvados refusant la délivrance à Mme C...d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Calvados de réexaminer la situation de Mme C...dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans cette attente, de munir l'intéressée d'une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par Mme C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 15 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Dussuet, président de chambre,
- M. Degommier, président assesseur,
- Mme Picquet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 mars 2019.
Le rapporteur,
P. PICQUET
Le président,
J-P. DUSSUET
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT01254