Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 25 mai 2015, complétée par un mémoire enregistré le 26 avril 2016, M. A... C..., représenté par MeB..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler partiellement ce jugement du 26 mars 2015 du tribunal administratif en ce qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions, en particulier en ce qui concerne l'injonction au ministre de la rétablir dans l'ensemble de ses droits et avantages ;
2°) d'enjoindre au ministre de la défense de le réintégrer dans ses fonctions, droits et prérogatives dont il a été privé par les effets de la décision du 11 janvier 2012, sans délai, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M.C... soutient que :
- le tribunal administratif n'a pas tiré toutes les conséquences des motifs l'ayant conduit à annuler la décision du 10 mai 2012s'étant substituée à la décision du 11 janvier 2012 en rejetant le surplus de ses conclusions de première instance ;
- la disparition de l'ordonnancement juridique de la décision du 11 janvier 2012 impliquait d'en faire également disparaître les effets, en dehors de quoi la décision du tribunal équivaut à faire renaître l'interdiction de vol prononcée à son encontre ;
- une telle situation serait contraire au principe de sécurité juridique et au bon fonctionnement du service public ;
- la circonstance que la commission de recours des militaires se soit déclarée à tort incompétente ne saurait avoir pour effet de le priver de toute possibilité de former un recours contentieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2016, le ministre de la défense conclut à l'annulation, par la voie de l'appel incident, de l'article 1er du jugement, la décision du 10 mai 2012 du président de la commission de recours des militaires déclinant sa compétence ne pouvant selon lui être regardée comme s'étant substituée à celle du 11 janvier 2012, et au rejet pour irrecevabilité du recours contentieux formé par M. C...contre la décision du 11 janvier 2012, ce recours n'ayant pas été précédé du recours administratif préalable obligatoire pour les militaires.
Vu l'ordonnance du 27 avril 2016 reportant la clôture d'instruction au 27 mai 2016 à 12 heures, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'instruction sur la sécurité aérienne n°5 DEF/EMM/OPL/EMPL du 18 mai 1998 modifiée ;
- le code de la défense ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mony,
- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant M.C....
1. Considérant que le commandant de la force de l'aéronautique navale a décidé le 11 janvier 2012 d'arrêter définitivement de vol sur tous les types d'aéronefs le lieutenant de vaisseauC... ; que ce dernier a, d'une part, formé un recours préalable contre cette décision devant la commission de recours des militaires, et, d'autre part, formé un recours contentieux contre cette décision devant le Conseil d'Etat ; que le président de la commission de recours des militaires a, le 10 mai 2012, rejeté le recours de M. C...au motif que la commission n'était pas compétente pour connaître d'une mesure relevant de l'exercice du pouvoir disciplinaire ; que, par un arrêt en date du 19 décembre 2012, le Conseil d'Etat a pour sa part renvoyé le jugement de la requête de M. C...au tribunal administratif de Rennes ; que, par un jugement en date du 26 mars 2015, le tribunal administratif a jugé en son article 1er, qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande d'annulation de la décision du 11 janvier 2012, la décision du 10 mai 2012 s'y étant selon lui substituée, annulé cette dernière décision en son article 2 et rejeté en son article 4 le surplus des conclusions de M. C...tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de le réintégrer dans l'ensemble de ses droits et avantages ; que M. C...relève appel de ce jugement en tant que celui-ci comporte cet article 4 rejetant ces dernières conclusions ; que, par la voie de l'appel incident, le ministre de la défense conclut pour sa part à l'annulation de l'article 1er du jugement et au rejet de la requête de M.C... ;
Sur l'appel incident du ministre de la défense :
2. Considérant que les conclusions d'appel de M. C...sont exclusivement dirigées contre l'article 4 du jugement attaqué, en tant que celui-ci rejette le surplus de ses conclusions de première instance tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de la défense de le réintégrer dans l'ensemble de ses droits et prérogatives ; que le ministre de la défense ne pouvait donc, dans le cadre d'un appel incident, et sauf à soulever, au-delà du délai d'appel, un litige distinct, demander, le 11 avril 2016, l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué prononçant un non lieu à statuer sur les conclusions en annulation de la décision du 11 janvier 2012 ; que, par suite, les conclusions du ministre de la défense tendant à l'annulation de l'article 1er du jugement attaqué sont irrecevables ;
Sur les conclusions de M.C... :
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision prise à l'encontre de M. C...ne constitue ni une des sanctions professionnelles limitativement énumérées à l'article R. 4137-115 du code de la défense pouvant être infligées à titre disciplinaire aux militaires ni, ainsi d'ailleurs que l'a jugé le Conseil d'Etat dans sa décision du 19 décembre 2012, une sanction disciplinaire ; que la mesure prise à l'encontre de M.C..., intervenue notamment au visa de l'instruction sur la sécurité aérienne n°5 DEF/EMM/OPL/EMPL du 18 mai 1998 modifiée constitue une mesure de sécurité aéronautique prise à des fins de protection, ainsi que le font apparaître les diverses observations opérées à son sujet sur sa manière de servir accompagnant la demande de réorientation présentée le 29 avril 2011 par le commandant de la flottille 23 F où il était alors affecté, en raison d'une insuffisante maîtrise technique en matière de pilotage d'aéronefs, attestée notamment par deux comptes-rendus de vol datant des 16 et 23 mars 2011, à l'issue desquels M. C...avait été arrêté de vol, dès le 25 mars, par le commandant de la flottille ;
4. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.C..., l'annulation par le tribunal administratif de la décision du 10 mai 2012 du président de la commission de recours des militaires, n'impliquait pas pour autant nécessairement qu'il soit, eu égard aux motifs de la décision de l'arrêter de vol, de nouveau autorisé à voler ; que les conclusions en injonction présentées en première instance tendant à ce qu'il soit rétabli dans ses fonctions, droits et prérogatives sans délai faisaient seulement obligation au tribunal administratif de préciser que la commission de recours des militaires, qui s'était initialement déclarée à tort incompétente dès lors que la mesure prise à l'encontre de M. C...n'avait pas un caractère disciplinaire, demeurait saisie du recours de M. C...formé contre l'arrêt de vol pris à son encontre ; que la décision du tribunal annulant la décision du 10 mai 2012 impliquait ainsi seulement que cette commission examine à nouveau, au fond, le recours formé par l'intéressé contre l'interdiction de vol prononcée dont il a fait l'objet, et transmette son avis au ministre de la défense afin que celui-ci puisse statuer valablement et définitivement sur le recours de M.C... ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commission de recours des militaires d'examiner à nouveau, sauf à ce qu'elle se soit, à la date du présent arrêt, prononcé sur ce dossier, le recours formé devant elle par M. C...le 11 mars 2012, et de le transmettre, avec son avis, au ministre de la défense ;
Sur les conclusions en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que réclame M. C...au titre des frais qu'il a exposés non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : L'article 4 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 26 mars 2015 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions à fin d'injonction présentées par M.C....
Article 2 : La commission des recours des militaires demeure saisie du recours de M. C...contre la décision du 11 janvier 2012 portant interdiction de vol, sous réserve qu'elle ne se soit pas déjà prononcée sur ce dossier à la date du présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions d'appel incident du ministre de la défense sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. A... C...et au ministre de la défense.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2017, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président,
- M. Francfort, président assesseur,
- M. Mony, premier conseiller,
Lu en audience publique le 18 avril 2017.
Le rapporteur,
A. MONY
Le président,
H. LENOIRLe greffier,
C. GOY
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N° 15NT01624