Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2015 M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 18 novembre 2015 ;
2°) d'annuler la décision en date du 21 juin 2013 prise par le préfet des Hauts-de-Seine, confirmée par décision implicite du ministre de l'intérieur en date du 24 septembre 2013 ;
3°) de faire droit à sa demande d'acquisition de la nationalité française ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il remplit les conditions exigées par les articles 21-16 et 21-17 du code civil ;
- le rejet est entaché d'une erreur de droit dès lors que le ministre a rejeté la demande en se fondant sur la teneur de l'entretien accordé en 2007, à l'occasion d'une précédente demande de naturalisation, et non sur les propos tenus par M. A...en 2013 à l'occasion de la présente demande ;
- il est entaché d'une erreur de fait car M. A...n'a pas fréquenté la mosquée de Massy mais celle d'Anthony ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation car le ministre n'est pas fondé à reprocher au requérant d'avoir orienté l'entretien de 2013 sur le respect des valeurs républicaines.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 janvier 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les conclusions en annulation sont irrecevables en ce qu'elles concernent le refus opposé par le préfet des Hauts-de-Seine ;
- les autres moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Francfort, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien, a sollicité l'acquisition de la nationalité française auprès du préfet des Hauts-de-Seine, lequel a rejeté sa demande par décision du 21 juin 2013 ; que, sur recours de M.A..., le ministre de l'intérieur a confirmé ce refus par une décision du 24 juillet 2013 ; que M. A...relève appel du jugement en date du 18 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des refus opposés par le préfet des Hauts-de-Seine et par le ministre de l'intérieur ;
Sur les conclusions à fins d'annulation :
2. Considérant qu'en application des dispositions de l'article 45 du décret du 30 décembre 1993 susvisé, les décisions par lesquelles le ministre statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont déférées ; que M. A...doit dès lors être regardé comme recherchant l'annulation du seul refus implicitement opposé par le ministre de l'intérieur à sa demande de naturalisation ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; et qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicité, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que son degré d'intégration dans la société française ;
4. Considérant qu'il ressort du mémoire en défense de l'administration que, pour rejeter la demande de naturalisation présentée par M.A..., le ministre de l'intérieur s'est fondé d'une part sur les renseignements obtenus sur le comportement de l'intéressé à l'occasion d'une précédente demande, formée en 2007, dont il ressortait que M. A...avait clairement défendu la primauté des principes de l'islam sur les valeurs de la République et, d'autre part, sur la circonstance que l'intéressé fréquentait une mosquée connue pour accueillir divers groupes radicaux ;
5. Considérant, en premier lieu, que la demande de naturalisation formée par M. A...n'ayant pas été rejetée du fait de son irrecevabilité au regard des dispositions des articles 21-16 et 21-17 du code civil, l'invocation de ces dispositions est inopérante à l'encontre du refus en litige ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que les renseignements obtenus à l'occasion d'une précédente demande de naturalisation sur le comportement de M. A...en 2007, clairement incompatible avec le loyalisme envers la France, étaient suffisamment récents pour pouvoir être pris en compte sans erreur de droit par le ministre de l'intérieur ;
7. Considérant, enfin, que si M. A...soutient, pour justifier de son évolution, qu'il ne fréquente pas une mosquée salafiste, contrairement aux renseignements recueillis par la direction générale de la sécurité intérieure, il n'en apporte aucun début de démonstration ; que dans ces conditions, et alors que l'intéressé aurait orienté l'entretien préalable à sa naturalisation sur le respect de la femme et des valeurs républicaines, le ministre de l'intérieur n'a commis ni erreur de fait ni erreur manifeste d'appréciation en rejetant la demande formée par M. A...pour les motifs énoncés au point 4 ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Considérant qu'en tout état de cause il n'appartient pas au juge administratif de faire droit à une demande d'acquisition de la nationalité française ; que les conclusions présentées en ce sens par le requérant ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande M. A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président,
- M. Mony, premier conseiller,
- Mme Massiou, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 décembre 2016.
L'assesseur le plus ancien,
A. MONYLe président-rapporteur,
J. FRANCFORT
Le greffier,
F. PERSEHAYE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT03695