Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 septembre 2020, la commune de Bangor, représentée par la SELARL Le Roy - Gourvennec - Prieur, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'association pour l'application de la Loi Littoral dans le pays d'Auray devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) de mettre à la charge de l'association pour l'application de la Loi Littoral dans le pays d'Auray le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une contradiction de motifs ;
- le permis de construire n'a été délivré ni en méconnaissance de l'article L. 121- 8 du code de l'urbanisme ni en méconnaissance de l'article L. 121-13 du même code ; la partie ouest du lieu-dit constitue un noyau bâti dense, autour duquel s'articule une partie des constructions du village, alors même que la densité serait moindre à l'est.
Par un mémoire, enregistré le 4 janvier 2021, l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Bangor au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par la commune de Bangor ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- et les observations de Me C... F..., pour la commune de Bangor.
Une note en délibéré, présentée par l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray, a été enregistrée le 12 avril 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray, l'arrêté du 23 mars 2017 du maire de Bangor délivrant à M. B... un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain cadastré à la section ZX sous le n° 84, situé au lieu-dit " Domois ". La commune de Bangor relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le tribunal, après avoir décrit de façon très détaillée la situation du terrain et les caractéristiques du lieu-dit " Domois ", a jugé, d'une part, que ce lieu-dit ne pouvait être qualifié d'agglomération ou de village, au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, et constituait une zone d'urbanisation diffuse au sein de laquelle aucune nouvelle construction d'un bâtiment ne pouvait être autorisée, en application de ces dispositions, même en continuité avec d'autres, d'autre part, que la délivrance du permis de construire litigieux revient à ouvrir à la construction une zone non urbanisée et doit être regardée comme une extension de l'urbanisation non justifiée et non motivée par le plan d'occupation des sols de la commune de Bangor, ni conforme aux dispositions du schéma de cohérence territorial du Pays d'Auray, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Par suite, contrairement à ce qui est soutenu, le jugement attaqué est suffisamment motivé.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme alors applicable : " L'extension de l'urbanisation se réalise (...) en continuité avec les agglomérations et villages existants (...) ". Il résulte de ces dispositions, sous réserve des exceptions qu'elles prévoient, notamment pour les activités agricoles, que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. Aux termes de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (...) est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des cartes, photographies, plans et documents graphiques produits, que le lieu-dit " Domois ", situé à près de 3 kilomètres du centre-bourg de la commune de Bangor est entouré de vastes espaces demeurés à l'état naturel ou exploités à des fins agricoles. Il est également situé à environ 300 mètres du rivage, l'existence d'une covisibilité entre le terrain et la mer n'étant contestée par aucune des parties. Le lieu-dit " Domois " est composé d'une quarantaine de maisons d'habitation et d'une exploitation agricole, desservies par des voies publiques. Si la vingtaine de constructions de la partie ouest du lieu-dit est regroupée de part et d'autre d'une voie publique, elle comporte cependant en son milieu plusieurs parcelles non bâties. Quant aux constructions implantées dans la partie orientale du lieu-dit autour de trois voies publiques, elles sont édifiées de façon dispersée sur de larges terrains et, pour plusieurs d'entre elles, séparées des autres par des parcelles non bâties. Dès lors, en l'absence d'un nombre et d'une densité significatifs de constructions, le lieu-dit " Domois " ne peut être qualifié d'agglomération ou de village, au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, et constitue une zone d'urbanisation diffuse au sein de laquelle aucune nouvelle construction d'un bâtiment ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres. Par conséquent, c'est par une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme que le permis de construire litigieux a été délivré. Ainsi qu'il vient d'être dit, le projet de construction est également compris dans un secteur d'urbanisation diffuse qui ne se trouve pas en continuité avec les agglomérations ou villages existants. Par suite, il va opérer, dans un espace proche du rivage, une extension illégale de l'urbanisation. Dès lors, en délivrant le permis de construire contesté, le maire de Bangor a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Bangor n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'une contradiction de motifs, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray, l'arrêté du 23 mars 2017 du maire de Bangor délivrant à M. B... un permis de construire une maison d'habitation sur le terrain cadastré à la section ZX sous le n° 84, situé au lieu-dit " Domois ".
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Bangor demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bangor le versement de la somme de 1 500 euros à l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray au titre des frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Bangor est rejetée.
Article 2 : La commune de Bangor versera à l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bangor et à l'association pour l'application de la loi Littoral dans le pays d'Auray.
Copie en sera adressée à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 9 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme D..., présidente-assesseur,
- M. Frank, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2021.
Le rapporteur,
C. D...Le président,
T. CELERIER
La greffière,
C. POPSE
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 20NT02858