Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 février 2020, Mme B... C..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 25 septembre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'erreur de droit dans la mesure où elle satisfait l'ensemble des conditions énoncées par les articles 21-16 et suivants du code civil ;
- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 février 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2020 du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative) du tribunal judiciaire de Nantes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la décision du 25 septembre 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation. Mme C... relève appel de ce jugement.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 27 du code civil : " Toute décision déclarant irrecevable, ajournant ou rejetant une demande d'acquisition, de naturalisation ou de réintégration par décret ainsi qu'une autorisation de perdre la nationalité française doit être motivée. ". La décision attaquée vise les articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 et mentionne que l'examen du parcours professionnel de Mme C..., apprécié dans sa globalité depuis son entrée en France, ne permet pas de considérer qu'elle a réalisé pleinement son insertion professionnelle puisqu'elle ne dispose pas de ressources suffisantes. Dans ces conditions, la décision attaquée comporte, avec suffisamment de précision, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait et doit, dès lors, être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". En vertu de l'article 27 du même code l'administration a le pouvoir de rejeter ou d'ajourner une demande de naturalisation. En outre, aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande. ". Il appartient ainsi au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la demande. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle et d'autonomie matérielle du postulant.
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme C... bénéficiait d'un contrat unique d'insertion dans un lycée, en qualité d'auxiliaire de vie scolaire, d'une durée déterminée d'une année, qui lui procurait un revenu mensuel de près de 700 euros. En outre, il n'est pas contesté que l'intéressée, mère d'un enfant à charge, percevait des prestations délivrées sur critères sociaux, notamment le revenu de solidarité active. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur, qui dispose d'un large pouvoir d'appréciation, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ajournant à deux ans sa demande de naturalisation afin de lui permettre de réaliser pleinement son insertion professionnelle et son autonomie matérielle.
5. En troisième lieu, la circonstance que la demande de naturalisation présentée par Mme C... remplirait toutes les conditions de recevabilité prévues par les dispositions du code civil pour lui permettre d'accéder à la nationalité française est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée qui a été prise, non sur le fondement de ces dispositions, mais sur celles de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993. De même, la requérante ne saurait utilement invoquer l'article 21-13 du code civil qui ne constitue pas le fondement légal de la décision attaquée. Enfin, Mme C... ne saurait utilement invoquer les orientations générales des circulaires du ministre de l'intérieur des 12 mai 2000, 12 octobre 2012 et 21 juin 2013, qui sont dépourvues de valeur réglementaire.
6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Il suit de là que ses conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme Buffet, président-assesseur,
- Mme A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mars 2021.
Le rapporteur,
C. A...
Le président,
T. CELERIER
La greffière,
C. POPSE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00472