Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 24 septembre 2017, M. B...A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 20 avril 2017 du magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 mars 2017 du préfet d'Indre-et-Loire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- il ne ressort pas des pièces du dossier que les principaux éléments de l'arrêté, rédigé en français, lui auraient été communiqués dans une langue qu'il comprend, alors qu'il ne parle que l'arabe ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 2 de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- cet arrêté méconnaît les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- cet arrêté est entaché d'un vice de procédure car l'agent habilité à mener l'entretien prévu par l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 n'est pas identifiable, il n'est pas établi qu'il s'agisse d'une personne qualifiée et les mentions de la fiche d'entretien ne permettent pas de le vérifier, enfin aucune pièce n'établit qu'un interprète était présent lors de l'entretien.
M. B...A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er septembre 2017.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2017, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B...A...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Francfort a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B...A..., ressortissant soudanais né le 27 mars 1992, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 15 août 2016. Le 12 septembre 2016, il a déposé une demande d'asile auprès de la préfecture de Seine-Saint-Denis. La consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes avaient été relevées par les autorités italiennes le 8 juillet 2016. Saisies d'une demande de prise en charge le 9 novembre 2016, les autorités italiennes l'ont acceptée par un accord implicite constaté le 10 janvier 2017. Par un arrêté du 28 mars 2017, le préfet d'Indre-et-Loire a ordonné la remise de M. B...A...aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile. Le requérant relève appel du jugement du 20 avril 2017 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, le moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que l'arrêté du préfet d'Indre-et-Loire du 20 avril 2017 ait été communiqué au requérant dans une langue qu'il comprend est sans effet sur la légalité de la décision contestée puisqu'il ne concerne que la notification de celle-ci. En tout état de cause, et alors que M. B...A...a pu exercer un recours contentieux contre l'arrêté de transfert il ressort des pièces du dossier que la notification de cet arrêté a été faite le 28 mars 2017 en arabe, langue que comprend l'intéressé, avec l'aide d'un traducteur bénévole.
3. En deuxième lieu, l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, (...) 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend (...)".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. B...A...s'est vu remettre le 12 septembre 2016 en préfecture, lors de l'entretien individuel organisé pour le dépôt de sa demande d'asile, tant le guide du demandeur d'asile qu'une information spécifique sur la mise en oeuvre du règlement Dublin III, rédigés en langue arabe, qu'il a déclaré comprendre. La circonstance que la signature figurant sur le compte-rendu d'entretien et les documents d'information est différente de celle qu'il a porté, ultérieurement, sur le procès-verbal de notification de l'arrêté contesté et sur sa demande d'aide juridictionnelle ne permet pas, à elle seule, de démontrer que le requérant n'aurait pas reçu l'information prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à l'information dû au demandeur d'asile doit être écarté.
5. En troisième lieu, la méconnaissance de l'obligation d'information prévue par les dispositions du I de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013, qui a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, ne peut être utilement invoquée à l'encontre de la décision portant remise aux autorités italiennes.
6. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) 2. La décision visée au paragraphe 1 contient des informations sur les voies de recours disponibles, y compris sur le droit de demander un effet suspensif, le cas échéant, et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours et à la mise oeuvre du transfert et comporte, si nécessaire, des informations relatives au lieu et à la date auxquels la personne concernée doit se présenter si cette personne se rend par ses propres moyens dans l'Etat membre responsable. Les Etats membres veillent à ce que des informations sur les personnes ou entités susceptibles de fournir une assistance juridique à la personne concernée soient communiquées à la personne concernée avec la décision visée au paragraphe 1, si ces informations ne lui ont pas encore été communiquées. 3. Lorsque la personne concernée n'est pas assistée ou représentée par un conseil juridique ou un autre conseiller, les Etats membres l'informent des principaux éléments de la décision, ce qui comprend toujours des informations sur les voies de recours disponibles et sur les délais applicables à l'exercice de ces voies de recours, dans une langue que la personne concernée comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend ".
7. L'arrêté contesté précise que le transfert vers l'Italie de M. B...A...sera effectué dans un délai de six mois à compter de l'accord des autorités de ce pays, que ce délai peut être porté à douze mois en cas d'emprisonnement et à dix-huit mois en cas de fuite. Contrairement à ce que soutient le requérant, cet arrêté mentionne le lieu auquel il doit se présenter s'il se rend en Italie par ses propres moyens. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 26 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
8. En cinquième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B...A...a bénéficié d'un entretien individuel, avec l'assistance d'un interprète bénévole en langue arabe, au cours duquel il a notamment pu exposer son parcours depuis son pays d'origine et sa situation personnelle. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.
9. Il résulte de ce qui précède que M. B...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er octobre 2018.
Le rapporteur,
J. FrancfortLe président,
H. LenoirLa greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 17NT029592