Vu :
- la Constitution de la République française et notamment son article 53-1 ;
- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Francfort, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Les faits, la procédure :
1. M. A... B..., de nationalité soudanaise, né le 1er janvier 1991, venant du Darfour dont il est originaire, est entré irrégulièrement sur le territoire français le 5 septembre 2017. Il a sollicité l'asile auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine le 3 novembre suivant. La consultation du fichier " Eurodac " faite sur la base de son relevé d'empreintes digitales a révélé que celles-ci avaient été enregistrées en Italie le 15 juillet 2017, rendant cet Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile en application des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Les autorités italiennes ont été saisies, le 10 novembre 2017, d'une demande de prise en charge de M. B... sur le fondement des dispositions du 1 de l'article 13 de ce règlement. Elles ont implicitement accepté le 11 janvier 2018, en application du 7 de l'article 22 du même règlement, leur responsabilité dans le traitement de cette demande d'asile, le constat de cet accord ayant été dressé et transmis le 15 janvier suivant. Par deux arrêtés du 22 février 2018, notifiés le même jour, le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé que M. B... ferait l'objet d'un transfert aux autorités italiennes et serait par ailleurs assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... a demandé au tribunal l'annulation de l'arrêté de transfert. Le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel du jugement du 1er mars 2018 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a, d'une part annulé l'arrêté du 22 février 2018 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé du transfert en Italie de M. B... et d'autre part mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. B...en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté du 22 février 2018 :
2. Aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. Il résulte des dispositions précitées que lorsque le délai de six mois fixé pour l'exécution de la mesure de transfert a été interrompu par l'introduction d'un recours suspensif, il recommence à courir à compter de la décision juridictionnelle statuant sur ce recours.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet d'Ille-et-Vilaine pour procéder à l'exécution de sa décision de transférer M. B...vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes. Ce délai a recommencé à courir intégralement à compter du jugement de rejet du 1er mars 2018 rendu par ce magistrat et n'a fait l'objet d'aucune prolongation. Par suite, la décision de transfert est devenue caduque sans avoir reçu de commencement d'exécution. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n°604-2013 rappelées ci-dessus. Le litige ayant perdu son objet en ce qui concerne l'arrêté de transfert, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement du 10 novembre 2017 en tant qu'il a annulé l'arrêté de transfert du 22 février 2018 et enjoint au préfet d'autoriser M. B... à solliciter l'asile en France.
Sur les conclusions à fins d'annulation du jugement en tant qu'il a mis à la charge de l'Etat une somme au titre des frais engagés pour l'instance :
5. Par l'article 4 du jugement attaqué le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a mis à la charge de l'Etat, sur le fondement des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros.
6. Dans les circonstances de l'espèce et dès lors que le premier juge n'a pas fait une appréciation manifestement exagérée des frais liés au litige, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'est pas fondé à demander l'annulation de cette disposition du jugement attaqué.
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet d'Ille-et-Vilaine tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Rennes du 1er mars 2018.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet d'Ille-et-Vilaine est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B.... Copie en sera transmise, pour information, à la préfète d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-rapporteur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 avril 2019.
Le rapporteur,
J. FRANCFORTLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT01281 2
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