Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 mars 2018, le centre communal d'action sociale de Guéméné-sur-Scorff, représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 janvier 2018 ;
2°) de rejeter la demande de Mme F... présentée devant le tribunal administratif de Rennes ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire les demandes indemnitaires de Mme F... ;
4°) de mettre à la charge de Mme F... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en premier lieu, les premiers juges ont entaché leur jugement d'une erreur d'appréciation en estimant qu'il ne pouvait pas obtenir le règlement par compensation du trop-perçu de rémunération versé à Mme F... ; la compensation des créances réciproques entre l'agent et l'administration peut être opérée de plein droit par le comptable public dès lors qu'il est établi que le recouvrement des sommes dues est poursuivi ;
- en second lieu, une réponse ministérielle a indiqué que le titre de recettes n'est soumis à aucun formalisme particulier mais doit porter à la connaissance du débiteur le montant et la nature des sommes dues et lui donner toute indication relative au paiement ; les renseignements donnés au débiteur doivent être de nature à lui permettre de discuter utilement des bases de calcul de la somme mentionnée sur le titre exécutoire émis à son encontre ; les courriers échangés entre le CCAS et Mme F... en juillet et août 2012 démontrent qu'un accord de principe était intervenu entre les parties quant à la récupération de l'indu par compensation ; ces courriers qui portent clairement à la connaissance de l'intéressée les bases et les modalités de calcul des sommes dues ainsi que leur nature ainsi que les modalités de paiement doivent, en conséquence, être analysés comme des titres de recette ; le recouvrement a été mis en oeuvre par une compensation opérée directement sur le salaire de l'intéressée en retenant une partie de sa rémunération ;
- à titre subsidiaire, le CCAS ne devait rémunérer que 161,09 heures complémentaires à Mme F.... En retenant un arriéré de traitement de 225,09 heures complémentaires, le tribunal a commis une erreur d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 22 juillet 2018, Mme F..., représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Guéméné-sur-Scorff la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable faute de décision autorisant le CCAS à ester en justice ;
- les moyens invoqués par le CCAS ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de Me A... substituant Me D..., représentant le CCAS de Guéméné-sur-Scorff, et Me G..., substituant Me C..., représentant Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., agent social de 1ère classe titulaire à temps non complet au CCAS de Guéméné-sur-Scorff, a, par lettre de son conseil du 8 juillet 2014, demandé à son employeur le règlement d'heures complémentaires travaillées en 2012 et 2013 et non payées. Par un courrier du 19 août 2014, le CCAS de Guéméné-sur-Scorff lui a fait savoir, d'une part, qu'il avait opéré une compensation entre les heures - 234 heures - qu'il lui avait indûment payées en 2012, alors qu'elle bénéficiait d'un congé de maladie, et les heures complémentaires effectuées depuis sa reprise de travail en juin 2012 et, d'autre part, qu'elle lui restait redevable de 64 heures de travail au 31 juillet 2014. Après avoir vainement sollicité, par lettre du 18 septembre 2014, le paiement des heures effectuées en 2012, 2013 et 2014 en complément de son service, Mme F... a demandé au tribunal administratif de Rennes la condamnation du CCAS de Guéméné-sur-Scorff à lui payer une somme de 2 581,79 euros représentant 303,74 heures complémentaires effectuées entre juin 2012 et décembre 2014.
2. Le CCAS de Guéméné-sur-Scorff relève appel du jugement du 19 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Rennes, retenant un arriéré de traitement de 225,09 heures complémentaires, l'a condamné à payer à ce titre à Mme F... le montant net dans la limite de 2 581,79 euros. Il ne conteste pas que Mme F... a effectivement accompli des heures en complément de son temps de service entre juin 2012 et décembre 2014 qu'il arrête à 161,09 heures dans ses écritures. Il soutient cependant de nouveau en appel que l'intéressée n'est pas fondée à en demander le paiement dès lors qu'elle est elle-même débitrice envers son employeur d'un trop-perçu de rémunération équivalent à 234 heures de travail.
3. En premier lieu, aux termes de l'article 105 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, relatif aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet : " Le traitement ainsi que les indemnités ayant le caractère de complément de traitement sont calculés au prorata du nombre d'heures hebdomadaires de service afférent à l'emploi ". Aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 20 mars 1991 portant dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet : " Les emplois permanents à temps non complet sont créés par délibération de l'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement. / Cette délibération fixe la durée hebdomadaire de service afférente à l'emploi en fraction de temps complet exprimée en heures. (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'une durée hebdomadaire de service servant de base au calcul de la rémunération d'un agent à temps non complet a été fixée par délibération du conseil municipal, le temps effectif de travail que l'agent accomplit par semaine doit correspondre à cette durée et que, s'il vient à être dépassé à l'initiative de la commune, l'intéressé peut prétendre à un complément de rémunération.
5. Il appartient à un comptable public d'opérer le cas échéant une compensation entre le montant des sommes dues à un agent et le montant des sommes dues par cet agent et dont le recouvrement est poursuivi. Si cette compensation ayant lieu de plein droit peut être opposée par le comptable sans qu'il soit besoin que l'autorité administrative compétente ait rendu exécutoire l'ordre de reversement, il ne résulte pas toutefois de l'instruction que le trop-perçu litigieux de rémunération de Mme F... ait fait l'objet d'une mise en recouvrement. Aucun titre exécutoire n'a notamment émis à l'encontre de l'intéressée. Si le CCAS se réfère à des courriers du 6 août et 29 août 2012 adressés à Mme F... qui démontreraient " qu'un accord de principe était intervenu entre les parties quant à la récupération de l'indu par compensation ", tant ces courriers que la preuve de leur notification n'ont jamais été versés aux débats et ne sauraient, en tout état de cause, être regardés comme valant émission d'un titre de perception à l'encontre de l'agent. Dans ces conditions, le CCAS de Guéméné-sur-Scorff n'est pas fondé à soutenir qu'il peut s'opposer au paiement des heures complémentaires accomplies par Mme F... au seul motif qu'elle aurait bénéficié d'un trop-perçu de rémunération.
6. En second lieu, il résulte de l'instruction, notamment du détail des heures de travail accomplies par Mme F... en 2012, 2013 et 2014, des justificatifs d'intervention et des bulletins de salaires produits par l'agent, que le nombre d'heures effectuées en complément de son temps de service entre les mois de juin 2012 et décembre 2014 peut effectivement être estimé à 225, 09 heures, contrairement à ce soutient le CCAS en appel qui n'apporte aucun élément aux débats permettant de déduire de ce montant, comme il l'avance, 64 heures.
7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par Mme F..., que le CCAS de Guéméné-sur-Scorff n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, il a été condamné à verser à Mme F... la somme de 2 581,79 euros.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mise à la charge de Mme F..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le CCAS de Guéméné-sur-Scorff au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de ce dernier le versement à Mme F... d'une somme de 1 000 euros au titre des mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête du CCAS de Guéméné-sur-Scorff est rejetée.
Article 2 : Le CCAS de Guéméné-sur-Scorff versera à Mme F... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre communal d'action sociale de Guéméné-sur-Scorff et à Mme E... F....
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. B..., président assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2019.
Le rapporteur
O. B...Le président
H. LENOIR
La greffière
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT01231 2