Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2020, Mme A..., représentée par Me E... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 mars 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que la décision l'assignant à résidence[CO3] ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire, d'une part, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour d'une durée minimale d'un mois, dans un délai de huit jours suivant la notification du jugement à intervenir et, d'autre part, de transmettre sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) pour examen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat[CO4] le paiement de la somme de 1 800 euros à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté de transfert :
- il n'est pas justifié de ce que le préfet de Maine-et-Loire aurait délivré l'information prévue par l'article 4 du règlement n° 604/2013/UE du 26 juin 2013, dès l'introduction de sa demande d'asile lors de son passage dans la structure de pré-accueil, une demande de protection internationale étant réputée introduite lorsqu'un document écrit, établi par une autorité publique et attestant qu'un ressortissant de pays tiers a sollicité la protection internationale, est parvenu à l'autorité chargée de l'exécution des obligations découlant de ce règlement ;
- les conditions de son entretien individuel n'ont pas respecté les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'agent qui a conduit l'entretien individuel n'était pas qualifié à cet effet ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17-1 du règlement n° 604/2013/UE du 26 juin 2013, dès lors que l'Italie connaît des dysfonctionnements sérieux dans le traitement des demandes d'asile et qu'elle est particulièrement vulnérable du fait de sa grossesse avancée et de son état de santé puisqu'elle est atteinte du virus de l'immunodéficience humaine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 août 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2020.
Vu la lettre du 11 septembre 2020 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert en raison de l'expiration du délai de 6 mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
Vu la réponse au moyen d'ordre public présentée par le préfet de Maine-et-Loire, enregistrée le 21 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante nigériane entrée irrégulièrement sur le territoire français le 24 novembre 2019, a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique le 16 décembre 2019. La consultation du fichier " Eurodac " a révélé que l'intéressée avait sollicité l'asile auprès des autorités italiennes préalablement au dépôt de sa demande d'asile en France et que ses empreintes digitales avaient été enregistrées en Italie les 8 mai 2014 et 22 décembre 2016. Les autorités italiennes ont été saisies le 18 décembre 2019 d'une demande de reprise en charge sur le fondement de l'article 18-1-b) du règlement (UE) n° 604/2013. Ces dernières ont implicitement accepté leur responsabilité. Le préfet de Maine-et-Loire a alors décidé de transférer Mme A... aux autorités italiennes par un arrêté du 6 janvier 2020. Mme A... a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Elle relève appel du jugement du 9 mars 2020 par lequel le magistrat désigné de cette juridiction a rejeté sa demande qu'elle renouvelle, et sollicite, en outre, l'annulation de la décision l'assignant à résidence.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert :
2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".
3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet de Maine-et-Loire pour procéder à l'exécution de la décision de transférer Mme A... vers l'Italie a été interrompu par la saisine du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir intégralement à compter du jugement du 9 mars 2020 rendu par ce dernier et il ne ressort pas des pièces du dossier que ce délai ait fait l'objet d'une prolongation ou que cet arrêté aurait reçu exécution pendant sa période de validité. Par suite, l'arrêté en cause est caduc à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile de l'intéressée, sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604-2013 rappelées. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre " la décision d'assignation à résidence " :
5. Les conclusions présentées contre " la décision d'assignation à résidence ", alors qu'au demeurant il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... a fait l'objet d'une telle mesure sur le fondement du 1° bis de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui ne sont assorties d'aucun moyen ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.
Sur les autres conclusions :
6. Les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme A... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 janvier 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités italiennes en vue de l'examen de sa demande d'asile.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 19 mars 2021, où siégeaient :
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gelard, premier conseiller,
- M. B..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 avril 2021.
Le rapporteur,
F. B...Le président,
O. COIFFET
Le greffier,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
[CO1]
[CO2]Mme Pi n'a en Pi demandé l'annulation que de l'arrêté portant transfert !!!
[CO3] Ces dernières conclusions sont nouvelles en appel : MOP irrecevables
[CO4]Il faut nécessairement requalifier les choses
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No 20NT02062