Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 aout 2018, Mme B...D..., représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 21 mars 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 mars 2018 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a décidé sa remise aux autorités allemandes en vue de l'examen de sa demande d'asile ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de l'autoriser à demander l'asile en France et lui délivrer une attestation en qualité de demandeur d'asile dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'arrêté du 15 mars 2018 est insuffisamment motivé, le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;
- l'arrêté contesté méconnaît l'article 16 et 17-1 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 au motif de son âge et du fait qu'elle est à la charge de son second fils majeur lequel bénéficie sur le sol français de la protection subsidiaire et y réside régulièrement ;
Par un courrier enregistré le 3 octobre 2018, le préfet d'Ille-et-Vilaine a indiqué, en réponse à une demande de la cour, que Mme B...D...devait être regardée comme ayant pris la fuite.
Mme B...D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B...D..., ressortissante de nationalité somalienne, est, selon ses déclarations, entrée en France le 19 décembre 2017. Elle a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 2 janvier 2018 auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine. En application du règlement UE n°603-2013 du 26 juin 2013, les empreintes digitales de l'intéressée ont été relevées et transmises à l'unité centrale " Eurodac ". Il est alors apparu qu'elles avaient été enregistrées en Allemagne à deux reprises les 2 novembre 2011 et 29 juin 2015. Les autorités allemandes, saisies le 16 janvier 2018 d'une demande de reprise en charge sur le fondement du b) du paragraphe 1 de l'article 18 du règlement UE n°604/2013, ont accepté leur responsabilité par un accord implicite du 31 janvier 2018. Par un arrêté du 15 mars 2018, le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné le transfert de Mme B...D...aux autorités allemandes, responsables de l'examen de sa demande d'asile. Saisi par Mme B...D...d'une demande d'annulation de cette décision, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, l'arrêté en litige portant remise de Mme B...D...aux autorités allemandes comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles il se fonde. Il est, par suite, suffisamment motivé. Contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté contesté fait état de sa situation personnelle et le préfet d'Ille-et-Vilaine a procédé à un examen sérieux et complet de la situation de Mme B...D..., en relevant notamment que son fils majeur, M. F...A..., né le 10 octobre 1987, ne pouvait être considéré comme membre de la famille au sens du g) de l'article 2 du règlement (UE) n°604/2013.
3. En second lieu, aux termes de l'article 16 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 visé : " Personnes à charge - 1. Lorsque, du fait d'une grossesse, d'un enfant nouveau-né, d'une maladie grave, d'un handicap grave ou de la vieillesse, le demandeur est dépendant de l'assistance de son enfant, de ses frères ou soeurs, ou de son père ou de sa mère résidant légalement dans un des Etats membres, ou lorsque son enfant, son frère ou sa soeur, ou son père ou sa mère, qui réside légalement dans un Etat membre est dépendant de l'assistance du demandeur, les Etats membres laissent généralement ensemble ou rapprochent le demandeur et cet enfant, ce frère ou cette soeur, ou ce père ou cette mère, à condition que les liens familiaux aient existé dans le pays d'origine, que l'enfant, le frère ou la soeur, ou le père ou la mère ou le demandeur soit capable de prendre soin de la personne à charge et que les personnes concernées en aient exprimé le souhait par écrit. (...) ". Aux termes de l'article 17-1 du même règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. "
4. Si Mme B...D...fait valoir la présence en France de son fils majeur, M. F... A..., lequel bénéficie sur le sol français de la protection subsidiaire et y réside régulièrement à ce titre, sous couvert d'un titre de séjour valable du 25 aout 2017 au 24 aout 2018, elle n'établit pas l'intensité des liens familiaux avec ce dernier, alors qu'il n'est pas contesté que la requérante a vécu 7 ans en Allemagne où elle a sollicité l'asile et qu'il n'est ni soutenu ni même allégué qu'elle y aurait séjourné en étant à la charge de son fils précité. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... A...dispose en France d'un logement personnel ou de ressources financières lui permettant de prendre en charge Mme B...D.... Si le certificat médical du 19 mars 2018 produit atteste que l'état de santé de la requérante nécessite la présence d'une tierce personne à ses côtés, aucun élément ne permet d'attester que la présence de son fils à ses côtés serait indispensable. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de la requérante s'opposerait à son transfert en Allemagne ou que l'intéressée ne pourrait bénéficier d'une prise en charge appropriée à son état de santé dans ce pays. Dès lors, Mme B... D...n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article 16 et du paragraphe 1 de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme B...D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme B...D..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B...D...demande au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée à la préfète d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 27 mai 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- Mme Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 juin 2019.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°18NT03170