Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juillet 2017, M.C..., représenté par Me B..., doit être regardé comme demandant à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 mars 2017 ;
2°) d'annuler, d'une part, la décision du 18 février 2014 par laquelle le préfet du Val-de- Marne a rejeté sa demande de naturalisation et, d'autre part, la décision du 21 août 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours dirigé contre la décision du 18 février 2014 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au ministre de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, en assortissant cette injonction d'une astreinte de 75 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions attaquées sont insuffisamment motivées ;
- le préfet et le ministre ont commis une erreur manifeste d'appréciation et n'ont pas procédé à un examen réel de sa situation individuelle :
c'est à tort que le préfet et le ministre ont refusé de faire droit à sa demande de naturalisation au motif qu'il aurait présenté à l'appui de sa demande un acte de naissance togolais falsifié ;
aucun élément ne permet d'affirmer, comme l'ont relevé les services de police, que les timbres fiscaux apposés sur son acte de naissance sont des faux ;
le rapport d'analyse ayant conduit les services de police a estimé que les timbres fiscaux étaient faux n'a pas été versé aux débats ;
le modèle de timbre fiscal prétendument authentique qui aurait été pris pour établir la comparaison n'est pas annexé au bordereau produit ;
une enquête concernant son épouse concernant les mêmes faits a été classée sans suite au motif que l'infraction était insuffisamment caractérisée ;
l'acte de naissance produit est un acte de naissance togolais dont mention est faite dans le certificat de nationalité togolaise et qui a servi de fondement à l'établissement de son passeport ;
- le ministre n'a pas examiné les autres éléments de nature à justifier la filiation et corroborant les mentions figurant dans l'acte de naissance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2017, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n°93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique
Considérant ce qui suit :
1. Par sa présente requête M.C..., ressortissant togolais, doit être regardé comme demandant à la cour d'annuler, d'une part, la décision du 18 février 2014 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de naturalisation et, d'autre part, la décision du 21 août 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours dirigé contre la décision du 18 février 2014 du préfet du Val-de-Marne.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il résulte des dispositions de l'article 45 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 que les décisions par lesquelles le ministre statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont déférées. Ainsi, les conclusions du requérant dirigées contre la décision préfectorale du 18 février 2014 sont irrecevables.
3. En premier lieu, aux termes de l'article 27 du code civil : " Toute décision déclarant irrecevable, ajournant ou rejetant une demande d'acquisition, de naturalisation ou de réintégration par décret ainsi qu'une autorisation de perdre la nationalité française doit être motivée ".
4. La décision du ministre de l'intérieur contestée vise les dispositions des articles 45 et 48 du décret du 30 décembre 1993 et fait état de la circonstance que le requérant a produit, lors de la constitution de son dossier de naturalisation, un acte de naissance togolais délivré le 24 janvier 2012 qui s'est avéré être falsifié après vérification auprès des services de police spécialisés. Par suite, elle énonce les considérations de droit et les éléments de fait propres à la situation personnelle de l'intéressé qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée et que les éléments relatifs à la situation individuelle de l'intéressé n'auraient pas été examinés doit dès lors être écarté.
5. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger ". Aux termes de l'article 48 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient au postulant, s'il le juge opportun, de formuler une nouvelle demande ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.
6. Pour rejeter la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. C..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur le motif tiré de ce que le requérant avait produit, lors de la constitution de son dossier de naturalisation, un acte de naissance togolais, délivré le 24 janvier 2012, qui s'est avéré être falsifié après vérification auprès des services de police spécialisés.
7. Le ministre de l'intérieur fait valoir que l'analyse, par la police aux frontières, de l'acte de naissance produit dans le cadre de la demande de naturalisation du requérant a révélé que le timbre fiscal apposé sur l'acte n'était pas conforme. Il produit, à l'appui de ses affirmations, un bordereau d'analyse documentaire de la police aux frontières signé par un analyste de la police nationale. Le requérant ne produit aucun élément de nature à remettre en cause les constatations effectuées par cet agent spécialisé dans la fraude documentaire de la police aux frontières. En se bornant à soutenir que son visa d'entrée en France, sa carte de résident ainsi que son passeport ont été délivrés au vu de l'acte en cause, le requérant ne conteste pas utilement son caractère inauthentique. Dans ces conditions, eu égard au large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, le ministre de l'intérieur a pu, sans erreur manifeste d'appréciation, rejeter la demande de M.C..., au motif qu'il avait produit à l'appui de celle-ci un acte inauthentique. Il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment de la décision litigieuse, que le ministre n'aurait pas examiné les autres éléments de nature à justifier la filiation pour authentifier les mentions figurant dans l'acte de naissance.
8. Il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. C..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, ces conclusions ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...demande au titre des frais liés au litige.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président de chambre,
- M. Pons, premier conseiller,
- M. Bouchardon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 avril 2018.
Le rapporteur,
F. PONS
Le président,
J. FRANCFORT
Le greffier,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°17NT02371