Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 septembre 2020 et 4 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Néraudau, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 juin 2020 en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert ;
2°) d'annuler cet arrêté du 26 mai 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui remettre une attestation de demandeur d'asile en procédure normale ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ;
4°) à titre subsidiaire, de saisir la cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, si des questions d'interprétation des stipulations de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 subsistent ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance des articles 7 et 3.2 du règlement du 26 juin 2013 soulevé dans son mémoire du 8 juin 2020 ; en outre, ce mémoire, qui a été communiqué au préfet, n'est pas visé ; le premier juge n'a pas davantage répondu au motif tiré de l'insuffisance de la décision contestée au regard du risque d'éloignement en Ethiopie compte tenu de l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre ;
- l'arrêté contesté méconnaît les articles 13 du RGPD et 29 du règlement n° 603/2013 dit Eurodac dès lors que ses empreintes ont été relevées avant l'entretien individuel et donc avant la remise de la brochure relative à ce règlement ;
- cette décision est insuffisamment motivée en droit en ce qu'elle ne vise pas l'accord conclu le 26 octobre 2004 entre la communauté européenne et la Suisse et ne mentionne pas le critère de détermination de l'Etat responsable alors qu'en vertu de l'article 7.2 du règlement du 26 juin 2013 c'est l'Italie qui devait être reconnue comme tel ; cette décision devait en outre indiquer s'il s'agissait d'une prise en charge ou d'une reprise en charge ; elle devait également rappelé que les membres de sa famille bénéficiaient d'une protection particulière en Erythrée et en Angleterre et faire état des risques de renvoi par ricochet dans ce pays ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;
- les stipulations de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 ont été méconnues dès lors que les brochures d'information ne lui ont pas été remises au PADA ;
- il n'est pas établi que les prescriptions de l'article 5 du même règlement ont été respectées notamment en ce qui concerne la confidentialité de l'entretien et la qualité de l'agent qui a conduit cet entretien, qui ne l'a interrogé ni sur les raisons de son départ de Suisse, ni sur les craintes en cas de transfert vers ce pays ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dès lors qu'en application des dispositions des articles 3.2 et 7.2 du règlement précité l'Italie devait être regardée comme l'Etat responsable ; s'il a fait l'objet d'une décision de relocalisation, cette circonstance n'est pas prévue par le règlement Dublin III ;
- cette décision est contraire aux articles 4 de la charte des droits fondamentaux de l'union européenne et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; la présomption de traitement correcte de sa demande d'asile par la Suisse doit être renversée pour les ressortissants érythréens ayant fui leur pays pour échapper au service militaire obligatoire ; sa situation relevait d'une clause d'exclusion prévue par la loi suisse, qui exclut d'une protection au titre de l'asile les déserteurs ; il est exposé à un risque de renvoi par ricochet en Erythrée dans la mesure où la décision lui refusant l'asile qui porte en même temps éloignement vers son pays d'origine est devenue définitive ;
- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 ; en sa qualité de demandeur d'asile et compte tenu de son parcours migratoire, sa situation présente une vulnérabilité certaine ; souffrant d'une hépatite B, il fait l'objet d'un suivi médical en France ; il risque d'être exposé à des traitements inhumains et dégradants en Erythrée, où la situation ne cesse de se dégrader ; les autorités suisses ne seront pas en mesure d'examiner correctement sa situation compte-tenu de la dégradation de la situation sanitaire dans ce pays.
Par un mémoire en défense et une lettre enregistrés les 9 et 23 octobre 2020, le préfet de Maine-et-Loire indique que la décision de transfert de M. A... a été exécutée et conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Les pièces déposées pour M. A... le 29 mars 2021 à 15h n'ont pas été communiquées.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord signé le 26 octobre 2004 par la Communauté européenne et la Suisse approuvé par une décision du Conseil du 28 janvier 2008 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- et les observations de Me Neraudeau, représentant M. A....
Une note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2021, a été produite pour M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant érythréen, relève appel du jugement du 11 juin 2020 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 mai 2020 portant transfert vers la Suisse.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Le jugement attaqué vise la requête et le mémoire présentés les 4 et 8 juin 2020 pour M. A... en omettant de mentionner, et de répondre, au moyen nouveau tiré de la méconnaissance des articles 7 et 3.2 du règlement du 26 juin 2013 soulevé dans ce dernier mémoire qui a été communiqué au préfet. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que ce jugement est irrégulier à raison de ce motif.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer sur les conclusions de la demande présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif de Nantes en tant qu'elles sont dirigées contre l'arrêté portant transfert vers la Suisse pris à son encontre.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de transfert aux autorités suisses :
4. En premier lieu, l'arrêté portant transfert de M. A... aux autorités suisses a été signé, pour le préfet de Maine-et-Loire et par délégation, par Mme B..., directrice de l'immigration et des relations avec les usagers. Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 8 octobre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 11 octobre 2019, le préfet de Maine-et-Loire a donné délégation à Mme B... pour signer " j) les décisions d'application du règlement Dublin III (arrêtés de transfert, assignations à résidence) ". Contrairement à ce que soutient le requérant, aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au préfet de Maine-et-Loire d'accorder une délégation pour signer les décisions prises en application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 uniquement aux agents du pôle régional Dublin installé au sein des services de sa préfecture. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que cet arrêté vise la nomination de l'agent bénéficiaire de la délégation. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.
5. En deuxième lieu, est suffisamment motivée une décision de transfert qui mentionne le règlement du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application.
6. L'arrêté en litige, qui porte transfert de M. A... aux autorités suisses, mentionne les textes dont il fait application, notamment les articles 7-2 et 18 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 et les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, qui constituent son fondement légal. S'il ne vise pas l'accord conclu le 26 octobre 2004 entre l'Union européenne, la Communauté européenne et la Confédération suisse étendant l'application des règlements " Dublin ", " Eurodac ", " Modalités d'application d'Eurodac " et " Modalités d'application de Dublin " aux relations entre les Etats membres de l'Union européenne et la Suisse, une telle circonstance ne révèle pas une insuffisance de motivation en droit dès lors que cet accord, en tant qu'il concerne les procédures de transfert aux autorités suisses, ne se substitue pas au règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 mais ne fait qu'en étendre le champ d'application territorial. En outre, l'arrêté litigieux précise que les empreintes digitales de l'intéressé ont été enregistrées dans le fichier Eurodac en Suisse le 6 octobre 2017 et en Italie le 11 mai 2017, qu'il a déposé une demande de protection internationale en Suisse et que l'Italie a indiqué que la Suisse avait accepté la responsabilité de l'examen de la demande d'asile de l'intéressé le 30 août 2017 et qu'en conséquence il avait été transféré en Suisse le 5 octobre 2017. Cette décision ajoute que les autorités suisses, saisies le 11 février 2020, ont fait connaître leur accord explicite de reprise en charge de M. A... le jour même. Cet arrêté mentionne par ailleurs les conditions d'entrée en France de l'intéressé, la date de dépôt de sa demande d'asile à la préfecture de la Loire-Atlantique et les démarches effectuées dans ce cadre ainsi que la présence de membres de sa famille en Ethiopie. Par suite, et alors même que le préfet ne précise pas que sa demande d'asile présentée en Suisse a été rejetée et qu'elle était assortie d'une obligation de quitter le territoire helvétique et qu'il ne fait pas état des risques allégués par l'intéressé d'être éloigné vers son pays d'origine, cette décision est suffisamment motivée en droit et en fait.
7. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à ce qui a été dit au point 6, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle et familiale de M. A.... Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 visé ci-dessus : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'État membre responsable (...); /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; /e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune (...). Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. / 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. ". Enfin selon les dispositions de l'article 5 du même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) ".
9. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations, l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 citées au point précédent constitue pour le demandeur d'asile une garantie.
10. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. A... s'est vu remettre, le 10 février 2020, lors de l'enregistrement de sa demande d'asile dans les services de la préfecture de la Loire-Atlantique, et à l'occasion de son entretien individuel, les brochures A et B conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, et qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées. Ces documents, dont les pages de garde ont été signées par l'intéressé le jour même, sont rédigés en tigrigna, langue que l'intéressé a déclaré comprendre ainsi que cela ressort des termes du compte-rendu de l'entretien individuel sur lequel il a également apposé sa signature. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé d'une garantie au motif que l'information qui lui a été donnée par les services préfectoraux aurait dû l'être dès son passage le 6 février 2020 dans la structure de pré-accueil. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à l'information du demandeur d'asile énoncé à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.
11. En cinquième lieu, l'article 29 du règlement n° 603/2013 du 26 juin 2013 dispose que : " 1. Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1, est informée par l'État membre d'origine par écrit et, si nécessaire, oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend: / a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46/CE, et de son représentant, le cas échéant; / b) de la raison pour laquelle ses données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (UE) n o 604/2013, conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple, quant au fait que les États membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives; / c) des destinataires des données; / d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées; / e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que des données inexactes la concernant soient rectifiées ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1. / 2. Dans le cas de personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, les informations visées au paragraphe 1 du présent article sont fournies au moment où les empreintes digitales de la personne concernée sont relevées (...) 3. Une brochure commune, dans laquelle figurent au moins les informations visées au paragraphe 1 du présent article et celles visées à l'article 4, paragraphe 1, du règlement (UE) n o 604/2013 est réalisée conformément à la procédure visée à l'article 44, paragraphe 2, dudit règlement. / La brochure est rédigée d'une manière claire et simple, et dans une langue que la personne concernée comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend. / La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres peuvent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces informations spécifiques aux États membres portent au moins sur les droits de la personne concernée, sur la possibilité d'une assistance de la part des autorités nationales de contrôle, ainsi que sur les coordonnées des services du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle (...) ".
12. Par ailleurs, l'article 13 du règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données dispose que : " 1. Lorsque des données à caractère personnel relatives à une personne concernée sont collectées auprès de cette personne, le responsable du traitement lui fournit, au moment où les données en question sont obtenues, toutes les informations suivantes : / a) l'identité et les coordonnées du responsable du traitement et, le cas échéant, du représentant du responsable du traitement ; / b) le cas échéant, les coordonnées du délégué à la protection des données ; / c) les finalités du traitement auquel sont destinées les données à caractère personnel, ainsi que la base juridique du traitement ; / d) lorsque le traitement est fondé sur l'article 6, paragraphe 1, point f), les intérêts légitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par un tiers ; / e) les destinataires ou les catégories de destinataires des données à caractère personnel, s'ils existent ; et / f) le cas échéant, le fait que le responsable du traitement a l'intention d'effectuer un transfert de données à caractère personnel vers un pays tiers ou à une organisation internationale, et l'existence ou l'absence d'une décision d'adéquation rendue par la Commission ou, dans le cas des transferts visés à l'article 46 ou 47, ou à l'article 49, paragraphe 1, deuxième alinéa, la référence aux garanties appropriées ou adaptées et les moyens d'en obtenir une copie ou l'endroit où elles ont été mises à disposition ; / 2. En plus des informations visées au paragraphe 1, le responsable du traitement fournit à la personne concernée, au moment où les données à caractère personnel sont obtenues, les informations complémentaires suivantes qui sont nécessaires pour garantir un traitement équitable et transparent : / a) la durée de conservation des données à caractère personnel ou, lorsque ce n'est pas possible, les critères utilisés pour déterminer cette durée ; b) l'existence du droit de demander au responsable du traitement l'accès aux données à caractère personnel, la rectification ou l'effacement de celles-ci, ou une limitation du traitement relatif à la personne concernée, ou du droit de s'opposer au traitement et du droit à la portabilité des données ; / c) lorsque le traitement est fondé sur l'article 6, paragraphe 1, point a), ou sur l'article 9 point a), l'existence du droit de retirer son consentement à tout moment, sans porter atteinte à la licéité du traitement fondé sur le consentement effectué avant le retrait ; / d) le droit d'introduire une réclamation auprès d'une autorité de contrôle ; (...) 4. Les paragraphes 1, 2 et 3 ne s'appliquent pas lorsque, et dans la mesure où, la personne concernée dispose déjà de ces informations ".
13. A la différence de l'obligation d'information instituée par le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 a uniquement pour objet et pour effet de permettre d'assurer la protection effective des données personnelles des demandeurs d'asile concernés, laquelle est garantie par l'ensemble des Etats membres relevant du régime européen d'asile commun. La méconnaissance de cette obligation d'information dans une langue comprise par l'intéressé ne peut être utilement invoquée à l'encontre des décisions par lesquelles la France remet un demandeur d'asile aux autorités compétentes pour examiner sa demande. Dans ces conditions, M. A... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 du 26 juin 2013 et de l'article 13 du règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016.
14. En sixième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013 : " Entretien individuel : 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / 2. (...) / 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les Etats membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'Etat membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".
15. Il ressort des pièces du dossier que l'entretien individuel dont M. A... a bénéficié le 10 février 2020 a été mené par un agent de la préfecture de la Loire-Atlantique assisté d'un interprète en langue tigrigna et qu'il a, au cours de cet entretien, exposé sa situation familiale, son parcours personnel et fait part de ses observations notamment sur sa situation familiale et sa santé. Il a confirmé, à l'issue de cet entretien, avoir compris les informations qu'il a reçues en application de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Dès lors, l'absence d'indication de l'identité et de la qualité précise de l'agent ayant conduit l'entretien sur le résumé de celui-ci, qui mentionne toutefois qu'il a été mené par un agent qualifié de la préfecture dont les initiales sont indiquées, n'a pas privé l'intéressé de la garantie que constitue le bénéfice de cet entretien. Enfin, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'entretien en question n'aurait pas été mené dans des conditions permettant d'en garantir la confidentialité. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que l'entretien dont il a bénéficié n'aurait pas été mené dans des conditions conformes aux dispositions de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
16. En septième lieu, aux termes de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du
26 juin 2013 : " 1. Les Etats membres examinent toute demande de protection internationale présentée par un ressortissant de pays tiers ou par un apatride sur le territoire de l'un quelconque d'entre eux (...). La demande est examinée par un seul Etat membre, qui est celui que les critères énoncés au chapitre III désignent comme responsable (...) 2. Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ".
17. Par ailleurs, aux termes de l'article 7 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre (...) ". Aux termes de l'article 18 de ce règlement : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de: (...) b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre (...) ".
18. Il ressort des pièces du dossier que la première demande d'asile de M. A... a été enregistrée en Italie le 11 mai 2017. Par conséquent, il résulte des dispositions précitées du 2 de l'article 7 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 que l'Etat membre responsable en vertu de ce règlement devait effectivement être l'Italie. Postérieurement au dépôt de cette demande d'asile M. A... a cependant déposé une nouvelle demande d'asile auprès des autorités suisses, qui ont accepté de l'instruire. La Suisse, qui en outre a donné son accord explicite en vue de la reprise en charge de l'intéressé, est devenue l'Etat membre responsable de sa demande d'asile. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le requérant, la Suisse, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, ne présente aucune défaillance systémique dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs d'asile. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision contestée serait contraire aux articles 3.2 et 7.2 précités du règlement du 26 juin 2013 ne peuvent qu'être écartés.
19. En huitième lieu, eu égard à ce qui a été dit aux points 6 et 18, l'arrêté de transfert litigieux n'est pas entaché de l'erreur de fait alléguée.
20. En neuvième lieu, pour démontrer qu'il risque d'être reconduit en Erythrée immédiatement après son transfert en Suisse, et qu'il sera soumis dans ce pays à un traitement inhumain et dégradant, M. A... soutient qu'il a quitté son pays d'origine pour échapper au service militaire rendu obligatoire dans ce pays sans limite d'âge, que plusieurs membres de sa famille ont obtenu la protection internationale en Ethiopie ou au Royaume-Uni et que la loi suisse exclut les déserteurs de la protection au titre de l'asile. Il se prévaut d'un courrier du 24 janvier 2020 du secrétariat d'Etat aux migrations suisse qui indique que sa demande d'asile présentée le 5 octobre 2017 est rejetée et que, s'il ne quitte pas la Suisse dans le délai imparti, il pourra être placé en détention et renvoyé sous la contrainte dans son pays d'origine. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que cette décision présente un caractère définitif, après que toutes les possibilités de recours aménagées par le droit interne suisse ont été épuisées. Par ailleurs, il n'est pas davantage établi que M. A... ne serait pas en mesure de faire valoir auprès des autorités suisses tout élément nouveau relatif à l'évolution de sa situation personnelle et à la situation qui prévaut en Erythrée, ni que les autorités suisses n'évalueront pas d'office les risques réels de mauvais traitements auxquels il serait exposé en cas de renvoi dans son pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de ce que, compte tenu de ce risque, l'arrêté de transfert méconnaîtrait les articles 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
21. En dernier lieu, aux termes de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'Etat membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'Etat membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...) ".
22. Si M. A... se prévaut du fait qu'il est atteint d'une hépatite B, les documents médicaux qu'il produit se bornent à attester qu'un traitement médicamenteux lui a été prescrit pour cette affection sans faire état de son impossibilité à se rendre en Suisse pour poursuivre ses soins. Par ailleurs, sa seule qualité de demandeur d'asile et son parcours migratoire ne suffisent pas à établir qu'il présenterait une vulnérabilité particulière rendant impossible ou difficile son transfert. Dans ces conditions, le requérant n'établit pas qu'en ne dérogeant pas aux critères de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et en prononçant son transfert aux autorités suisses, le préfet de Maine-et-Loire aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. Par suite ce moyen ne peut qu'être écarté.
23. Il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A... tendant à l'annulation de la décision du 26 mai 2020 portant transfert vers la Suisse ainsi que ses conclusions d'appel ne peuvent qu'être rejetées.
Sur le surplus des conclusions :
24. Les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. A... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2005357 du tribunal administratif de Nantes en date du 11 juin 2020 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la requête de M. A... dirigées contre l'arrêté du 26 mai 2020 du préfet de Maine-et-Loire portant transfert vers la Suisse.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. A... tendant à l'annulation de la décision de transfert mentionnée à l'article 1er ainsi que le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2021 à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 avril 2021.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
O. GASPON
La greffière,
P. CHAVEROUX
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT02869