Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 avril 2021 sous le n°21NT00993, le ministre de l'intérieur demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 février 2021.
Il soutient que :
- les documents présentés à l'appui de la demande de visas, sont de supposés actes originaux lesquels comportent un champ " déclarant " et différents volets qui doivent être remis à différents destinataires et non des extraits d'acte ; ils ne sont pas conformes à l'article 176 du code civil guinéen, qui leur est applicable, en ce qu'il ne sont pas signés par le déclarant ;
- les actes de naissance F... D... et Kadiatou A..., qui sont jumelles, ont été dressés le même jour à quelques heures d'écart mais dans deux registres différents et avec une numérotation présentant un écart de 200 numéros, circonstance qui paraît invraisemblable ;
- aucun jugement de déchéance de l'autorité parentale du père n'est produit ; les témoignages relatifs à l'impossibilité de prouver sa disparition ou d'ester en justice ne sont pas convaincants ;
- les passeports, établis sur la base de documents frauduleux ne constituent pas des actes d'état civil ;
- les autres éléments du dossier sont insuffisants pour établir la filiation par possession d'état.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 juin 2021, Mme C... A..., agissant en son nom et pour le compte de l'enfant mineur E... A..., Mme D... A... et Mme B... A..., représentées par Me Pollono, concluent au rejet de la requête, à ce que soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer les visas sollicités, à ce que l'astreinte soit liquidée à hauteur de 100 euros par jour de retard et à ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à leur conseil qui renoncera, dans cette hypothèse, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, ou, si la demande d'aide juridictionnelle est rejetée ou s'il n'y est que partiellement fait droit, à leur profit en application des dispositions de ce dernier article.
Elles soutiennent que :
- les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.
Vu :
- le recours n° 21NT00992, enregistré le 7 avril 2021 par lequel ministre de l'intérieur a demandé l'annulation du jugement n° 2006945 du 15 février 2021 du tribunal administratif de Nantes.
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Douet,
- et les observations de Me Pollono, représentant Mmes A....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 222-25 du même code : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
2. En l'état de l'instruction, aucun des moyens invoqués par le ministre de l'intérieur à l'appui de sa requête ne paraît être de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.
3. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes.
Sur les conclusions présentées par Mmes A... à fin d'injonction et celles tendant à la liquidation de l'astreinte prononcé par le jugement :
4. La présente ordonnance n'implique pas le prononcé d'une injonction autre que celle déjà prononcée par les premiers juges, dès lors qu'il appartient au ministre de prendre les mesures nécessaires pour délivrer les visas sollicités.
5. Enfin, eu égard à l'office du juge du sursis à exécution d'une décision juridictionnelle, consistant à se prononcer en l'état de l'instruction et à titre provisoire, les conclusions tendant à la liquidation de l'astreinte citées ci-dessus et présentées par Mmes A... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
6. Mme A..., qui demande l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doit être regardée comme demandant également le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire. Elle est admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire en application de l'article 20 de la loi susvisée du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui doit être regardé comme la partie perdante dans la présente instance, le versement à Me Pollono, avocate de Mme A..., d'une somme de 1 000 euros. Conformément aux dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée, le recouvrement en tout ou partie de cette somme vaudra renonciation à percevoir, à due concurrence, la part contributive de l'Etat.
DECIDE :
Article 1er : Mme A... est admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête du ministre de l'intérieur est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par Mmes A... sont rejetées.
Article 4 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à Me Pollono en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Me Pollono renoncera, si elle recouvre cette somme, à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 5 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'intérieur, à Mme C... A..., Mme D... A... et Mme B... A....
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 9 juillet 2021.
La présidente-rapporteure,
H. DOUET
La greffière,
A. LEMÉE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21NT00993 2