Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 22 juin 2015, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1424062 du 10 mars 2015 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2014 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à Me D..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'ayant pas examiné s'il pouvait prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement que l'asile ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du même code ;
- elle viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour, qui en constitue le fondement légal ;
- elle est insuffisamment motivée dès lors que la décision portant refus de titre de séjour l'est également ;
- elle méconnait les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, qui en constitue le fondement légal ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Amat a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. A..., ressortissant ivoirien né le 15 mai 1974 et entré en France en 2010 selon ses déclarations, y a sollicité l'asile ; que par une décision du 30 novembre 2012, confirmée le 7 avril 2014 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), l'Office français de protection de réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande ; que M. A...relève appel de l'ordonnance du 10 mars 2015 par laquelle le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er juillet 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de titre de séjour qui, d'une part, vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions des articles L. 314-11 (8°), L. 313-13 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, précise que la reconnaissance de la qualité de réfugié a été refusée à l'intéressé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale et que celui-ci n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. " ; que contrairement à ce que soutient M. A..., ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer au préfet, lorsqu'un étranger s'est vu refuser la reconnaissance du statut de réfugié et le bénéfice de la protection subsidiaire, d'examiner d'office s'il pourrait être admis au séjour sur un autre fondement ; que, par conséquent, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article L. 742-7, au motif que le préfet de police n'a pas recherché si M. A...pouvait prétendre à un titre de séjour sur un autre fondement que celui de l'asile, ne peut qu'être écarté ;
4. Considérant, en troisième lieu, que si M. A...invoque le bénéfice des dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions dans la mesure où il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait présenté une demande de titre de séjour sur ce fondement ;
5. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
6. Considérant que M. A...fait valoir qu'il a l'ensemble de sa vie privée et familiale sur le territoire français où il réside avec sa femme, MmeC..., et leur fille née en avril 2013, alors qu'il n'a plus d'attaches dans son pays d'origine ; que, toutefois, l'intéressé, qui a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de trente-six ans, n'établit pas la réalité et la durée de la vie commune qui allègue ; qu'en effet, il se borne à produire un certificat établi le 18 mars 2015 par le Samu social de Paris attestant qu'il est hébergé dans des structures hôtelières avec Mme C... et la jeune E...A...depuis juin 2014 et un avis d'imposition sur les revenus de 2013 établi aux deux noms ; qu'il ne produit ni de pièce d'identité de la personne qu'il présente comme sa femme, ni de certificat de mariage, ni de certificat de naissance de sa fille ; qu'en outre il n'établit pas la régularité du séjour en France de Mme C... ; que, dans ses conditions, la décision en litige n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour pour demander l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) " ;
9. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'obligation de quitter le territoire français n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision de refus de titre de séjour qui, comportant les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde, était elle-même suffisamment motivée ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 ;
10. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'implique pas en elle-même la fixation du pays de renvoi ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article L. 513-2 est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et doit être écarté ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi ;
12. Considérant, en deuxième lieu, que la décision fixant le pays de destination comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde et est suffisamment motivée ;
13. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que si M. A...fait valoir que lui et son épouse ont été victimes de violences dans leur pays d'origine en raison de leur engagement politique, il ne produit aucun élément probant à l'appui de ces allégations générales et peu circonstanciées quant aux risques qu'il encourt personnellement en cas de retour en Côte d'Ivoire ; qu'au surplus, il est constant que le statut de réfugié lui a été refusé par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Gouès, premier conseiller,
- Mme Amat, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 11 février 2016.
Le rapporteur,
N. AMATLa présidente,
S. PELLISSIERLe greffier,
E. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02460