Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 août 2020, M. A... B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700188-1807696 du 24 janvier 2020 du tribunal administratif de Melun, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 42 du 16 juillet 2018 du maire de la commune de Villevaudé ;
2°) d'annuler l'arrêté n° 42 du 16 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Villevaudé a ordonné l'interruption des travaux autorisés sur une construction située route de Lagny, parcelle cadastrée ZA 319 ;
3°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation, et d'une contradiction dans ses motifs ;
- le jugement est insuffisamment motivé, en son point 15, s'agissant de la neutralisation partielle des motifs de l'arrêté attaqué qui aurait dû faire l'objet d'une annulation partielle s'agissant de l'aménagement d'une terrasse et l'élévation d'un mur de clôture ;
- l'arrêté litigieux a été pris au terme d'une procédure irrégulière, faute d'avoir respecté le caractère contradictoire de la procédure ;
- il est insuffisamment motivé ;
- il est entaché d'une erreur de droit et se fonde sur des faits matériellement inexacts, dès lors que les travaux étaient achevés et non en cours d'exécution ;
- l'administration ne pouvant légalement lui ordonner d'interrompre des travaux autorisés, l'arrêté devait distinguer ceux des travaux irréguliers qu'il entendait faire stopper.
Par un mémoire enregistré le 30 décembre 2020, le maire de la commune de Villevaudé représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B....
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 décembre 2020, le ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,
- et les observations de Me Playe, avocat du maire de la commune de Villevaudé.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 20 juin 2017, le maire de la commune de Villevaudé
(Seine-et-Marne) ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 22 mai 2017 par M. A... B..., à fin de réalisation de travaux sur une construction existante située route de Lagny sur une parcelle cadastrée ZA 319, et consistant en un changement de tuiles mécaniques brunes et de menuiseries en PVC blanc, en l'installation de volets roulants en PVC blanc, en un ravalement ton blanc cassé identique à l'existant et en l'aménagement de trois parkings en revêtement perméable. Par un arrêté n° 88 du 18 octobre 2017 dont l'exécution a été suspendue par le juge des référés du tribunal administratif de Melun par une ordonnance du 2 février 2018, puis par un second arrêté, n° 42, du 16 juillet 2018, le maire a enjoint à M. B... d'interrompre les travaux, au motif qu'ils n'étaient pas conformes à ceux qui avaient été autorisés par l'arrêté du 20 juin 2017. M. B... ayant demandé au tribunal administratif de Melun l'annulation de ces deux arrêtés, la juridiction saisie a, par un jugement du 24 janvier 2020, prononcé l'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de M. B.... Ce dernier relève appel de ce jugement devant la Cour, en tant seulement qu'il a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté n° 42 du 16 juillet 2018 du maire de Villevaudé.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. M. B... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation, que les premiers juges ont à tort procédé à une neutralisation des motifs de l'arrêté litigieux au lieu de prononcer une annulation partielle et qu'il est entaché d'une contradiction dans ses motifs. Ces moyens relèvent en réalité de la critique du bien-fondé du jugement et seront examinés à ce titre.
3. Le requérant soutient également que le jugement attaqué est insuffisamment motivé, en son point 15. Toutefois, les premiers juges, en considérant que, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aménagement d'une terrasse et l'élévation d'un mur de clôture contreviendraient à une disposition d'urbanisme applicable, le maire de Villevaudé a également motivé son arrêté sur les faits rappelés au point 14 du même jugement et qu'il aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur les non-conformités énoncées audit point 14, ont suffisamment motivé leur décision, sans préjudice de la question du bien-fondé de ladite motivation. Le moyen manque ainsi en fait et doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté litigieux :
S'agissant du caractère contradictoire de la procédure :
4. D'une part, aux termes du troisième alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme : " Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 du présent code a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux ". L'avant-dernier alinéa de ce même article dispose que : " Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux (...) ". Il résulte des dispositions législatives que le maire est en situation de compétence liée lorsqu'il ordonne l'interruption de travaux réalisés sans permis de construire ou au mépris d'une décision de justice ; en revanche, ces mêmes dispositions n'impliquent pas que le maire soit en situation de compétence liée lorsque, comme en l'espèce, il décide d'ordonner l'interruption des travaux qui ne sont pas conformes à ceux qui ont été autorisés. Il s'ensuit que, contrairement à ce que soutient la commune de Villevaudé, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure n'est pas inopérant.
5. D'autre part, en vertu de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 de ce code, au nombre desquelles figurent les décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police, ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites ou orales, sauf en cas de risque pour la sécurité ou la salubrité publiques imposant une procédure d'urgence en application de l'article L. 121-2.
6. Si les dispositions législatives précitées imposent que la personne invitée par courrier à faire valoir ses observations préalablement à l'édiction d'un arrêté la mettant en demeure d'interrompre des travaux soit informée des faits sur lesquels cet arrêté est susceptible de se fonder, elles n'obligent pas le maire à joindre le procès-verbal constatant les non-conformités reprochées à un tel courrier préalable.
7. Il ressort des pièces du dossier que, d'une part, M. B... avait mandaté son frère pour être présent lors de la visite réalisée le 24 avril 2018 par l'agent assermenté qui a rédigé le procès-verbal, et que, d'autre part, le maire de Villevaudé a précisé dans son courrier, reçu le 25 mai 2018 par l'intéressé, que lui étaient reprochés la démolition totale du bâtiment existant, la construction d'un pavillon en zone agricole, un changement d'emprise au sol, l'extension du projet de construction, la surélévation de la clôture et du pavillon, le gravillonnage de la moitié de la parcelle afin de créer une aire de stationnement pour caravanes et voitures, un changement de pentes du toit, la créations de deux terrasses devant et à l'arrière du pavillon, et que M. B... disposait d'un délai de huit jours pour faire valoir ses observations. Par ailleurs, le maire ne s'est pas fondé, pour prendre l'arrêté attaqué, sur d'autres faits que ceux énoncés dans ledit courrier précité. Dès lors, il en résulte que les exigences du caractère contradictoire de la procédure doivent être regardées comme ayant été respectées en l'espèce. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration manque en fait et doit être écarté.
S'agissant de la motivation :
8. D'une part, s'il résulte des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, aux termes duquel " ... le maire peut également, (...) ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. ", que l'arrêté du maire doit être motivé en fait et en droit, les mêmes dispositions n'imposent pas qu'y soit annexé le procès-verbal de constatation des infractions reprochées.
9. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux est pris au visa, notamment des articles L. 480-2 et suivants du code de l'urbanisme, de l'arrêté de non-opposition à déclaration préalable de travaux du 20 juin 2017, ainsi que du procès-verbal de constatation du
26 avril 2018. En outre, il énonce l'ensemble des infractions et non-conformités à la déclaration préalable de travaux constatées, ainsi que les étapes de la procédure suivie. Dès lors, l'arrêt, qui comporte les motifs venant au soutien de la décision, est suffisamment motivé en fait et en droit. Par suite, le moyen tiré du défaut de sa motivation manque en fait et doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté litigieux :
10. En premier lieu, M. B... soutient qu'à la date de la décision attaquée les travaux autorisés étaient terminés et que le maire ne pouvait dès lors pas prendre d'arrêté interruptif.
11. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et notamment des procès-verbaux de constatation du 26 avril 2018 et du 4 juillet 2018, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que les travaux étaient toujours en cours à chacune de ces dates. À ce dernier procès-verbal sont annexées des photographies, établissant notamment que le ravalement de la façade n'était pas achevé, ainsi que la présence d'une brouette et de graviers restant à étendre. Il s'ensuit que, le moyen tiré de l'erreur de droit et de l'inexactitude matérielle des faits doit être écarté.
12. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des photographies annexées aux différents procès-verbaux de constatation, notamment, que l'emprise du bâtiment principal a été modifiée, qu'une aile a été ajoutée au bâtiment, que sa charpente a été totalement modifiée et élevée, que les ouvertures ont été reconfigurées, que la couleur des menuiserie est marron et non blanche, que la surface gravillonné dédiée au parking représente tout l'avant de la parcelle, soit au moins 500 m², excédent largement les 37,5 m² nécessaires aux trois places de parking prévues. L'ensemble de ces travaux, dont le requérant ne peut sérieusement soutenir qu'ils ne sont pas étrangers à l'arrêté du 20 juin 2017 du maire de Villevaudé portant non-opposition à déclaration préalable, caractérisent des infractions aux règles d'urbanisme au sens et pour l'application de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux est entaché d'une erreur d'appréciation ne peut qu'être écarté.
13. En troisième lieu, le requérant soutient que, dès lors que l'aménagement d'une terrasse et l'élévation d'un mur de clôture ne méconnaissent aucune disposition d'urbanisme applicable, le maire ne pouvait légalement interrompre lesdits travaux, et que le tribunal administratif aurait donc dû, non pas prononcer sur ce point une neutralisation des motifs de l'arrêté litigieux, mais son annulation partielle.
14. Les dispositions, précitées, de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme ne sont applicables qu'aux travaux engagés sans la délivrance de l'autorisation requise par la législation et la réglementation en vigueur. Toutefois, elles n'imposent pas au maire, dans l'arrêté interruptif qu'il prend sur leur fondement, de distinguer expressément, parmi les travaux en cause, ceux qui sont constituent une infraction aux dispositions de l'article L. 480-4 du même code, de ceux dispensés de l'obligation d'obtention d'une autorisation préalable, alors même que ces derniers, généralement d'une ampleur moindre que les premiers, peuvent avoir été menés à l'insu de l'administration. L'arrêté interruptif est donc dépourvu de toute portée à l'égard de travaux qui ne constituent pas une infraction aux dispositions de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme, et n'est donc pas, sur ce point, entaché d'illégalité s'il omet de les exclure de son champ d'application. Par suite, le moyen qui est inopérant doit être écarté.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté n° 42 du 16 juillet 2018 par lequel le maire de la commune de Villevaudé a ordonné l'interruption des travaux autorisés sur une construction située route de Lagny, parcelle cadastrée ZA 319. Ses conclusions d'appel qui tendent à l'annulation dudit jugement et de cet arrêté doivent donc être rejetées.
Sur les frais du litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. B..., qui est la partie perdante dans la présente instance, en puisse invoquer le bénéfice. Ses conclusions en ce sens doivent donc être rejetées.
17. Faute pour la commune de Villevaudé d'être une partie à l'instance au sens et pour l'application de ces dispositions, dès lors que son maire, en faisant usage des dispositions de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, a agi en tant qu'autorité administrative de l'État, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... B... et les conclusions de la commune de Villevaudé fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de la transition écologique et à la commune de Villevaudé.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. D..., président-assesseur,
- M. Gobeill, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mars 2021.
Le président,
J. LAPOUZADE
La République mande et au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 20PA02393