2°) d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté du 12 septembre 2016 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 600 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté attaqué est entaché d'un défaut de motivation ;
- il a été pris sans examen complet de sa situation personnelle ;
- il méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée et a été prise sans un examen complet de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 novembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de M. F...ne sont pas fondés.
M. F...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 4 mai 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.F..., ressortissant ivoirien né le 14 mars 1972, est entré en France le 26 mars 2012 muni d'un visa Schengen mention " tourisme " délivré par les autorités consulaires italiennes ; qu'il a sollicité le 27 juin 2016 son admission au séjour au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par un arrêté du 12 septembre 2016, le préfet de police a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que M. F...relève appel du jugement du 1er mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions contenues dans cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation du refus de délivrer le titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :
2. Considérant, en premier lieu que, selon les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, la motivation " doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'en l'espèce, l'arrêté attaqué mentionne de façon précise les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il fait application et les faits qui fondent le rejet de la demande, à savoir l'existence d'un traitement approprié permettant la prise en charge du requérant dans le pays dont il est originaire ; qu'il examine aussi, en mentionnant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les éléments relatifs à sa vie privée et familiale ; qu'il révèle ainsi un examen approfondi de la situation personnelle du requérant et est suffisamment motivé ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;
4. Considérant que M. F...est atteint d'un diabète de type II ainsi que d'un glaucome ; qu'il soutient, notamment en produisant des rapports médicaux, que le traitement pour ces maladies n'est pas disponible en Côte-d'Ivoire, pays dont il est originaire ; que, pour prendre l'arrêté litigieux, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du 5 avril 2016 du médecin-chef de la préfecture de police de Paris selon lequel, si l'état de santé de M. F... nécessitait une prise en charge dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
5. Considérant, d'une part, que l'attestation du Dr C...en date du 17 février 2016, ainsi que le certificat du Dr E...du 8 octobre 2016, versés au dossier par le requérant, indiquant que les traitements des pathologies de M. F...ne sont pas disponibles en Côte-d'Ivoire sont peu circonstanciés et ne sont donc pas de nature à remettre en cause l'avis du médecin-chef ; que le rapport médical remis au médecin-chef le 19 février 2016 fait état d'un besoin de Janumet, Diamicron, Atorvastatine et Bipreterax ; qu'il ressort des éléments produits en appel par le préfet de police que figurent sur la liste nationale des médicaments essentiels disponibles en Côte-d'Ivoire l'Atorvastatine, les substances actives du Janumet et du Diamicron, ainsi que des hypertenseurs de la même classe que le Bipreterax ;
6. Considérant, d'autre part, que le requérant se prévaut de " circonstances humanitaires exceptionnelles " en soutenant que l'accès aux soins n'est pas effectif dans son pays d'origine du fait du manque d'infrastructures et du coût élevé des soins ; que, toutefois, il ressort des documents versés au dossier par le préfet de police qu'il existe en Côte-d'Ivoire des infrastructures d'ophtalmologie et de diabétologie ; que le requérant ne verse pas de pièces corroborant ses allégations relatives au coût élevé du traitement en Côte-d'Ivoire ainsi qu'aux caractéristiques du système de protection sociale ivoirien ; que, par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F... justifierait de " circonstances humanitaires exceptionnelles " justifiant son admission au séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que si M. F...réside en France depuis 2012, il y est célibataire et sans charge de famille, et n'y justifie pas d'une réelle insertion professionnelle ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a résidé jusqu'à l'âge de 40 ans et où réside sa soeur ; que, par suite, le préfet a pu lui refuser un titre de séjour et l'obliger à quitter le territoire français sans porter à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises et sans méconnaitre les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision fixant le pays de destination :
9. Considérant que l'arrêté litigieux énonce avec suffisamment de précision les considérations de droit et de fait qui fondent la décision fixant le pays de destination ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision doit être écarté ;
10. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacés ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'ainsi qu'il a été dit aux points 5 et 6, il existe un traitement approprié aux pathologies dont souffre M. F...en Côte-d'Ivoire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu'un retour en Côte-d'Ivoire l'exposerait, en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à un traitement inhumain ou dégradant doit être écarté ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2016 ; que sa requête d'appel, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'Etat n'étant pas partie perdante, doit être rejetée ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police de Paris.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Pellissier, présidente de chambre,
- M. Diémert, président assesseur,
- M. Legeai, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 avril 2018.
Le rapporteur,
A. LEGEAI La présidente,
S. PELLISSIER Le greffier,
M. B...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02048