Par une requête et des mémoires enregistrés les 18 décembre 2020, 20 janvier, 16 mars et
3 juin 2021, la Sas Bp2r, représentée par Me Maud Bondiguel, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement n° 1821773/1-2 du 20 octobre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des rappels contestés devant ce tribunal ;
3°) de mettre à la charge " du directeur du contrôle fiscal Ile-de-France, es qualité " la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale, qui a remis en cause les crédits impôt recherche déclarés, au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, a méconnu le principe d'espérance légitime, les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le principe de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime ;
- s'agissant du crédit impôt recherche pour l'année 2010, la circonstance que le tribunal n'ait pas tenu compte de la position exprimée le 15 juin 2011 par la direction régionale de la recherche et de la technologie d'Ile de-France et de la caducité manifeste de l'analyse menée par l'expert désigné au cours de la vérification de comptabilité est suffisante pour infirmer le jugement attaqué et prononcer la décharge des rappels contestés ;
- en application des dispositions combinées du 4° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales et de celles de l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts, l'éligibilité au crédit impôt recherche des dépenses de recherche déjà exposées, décrites et chiffrées dans la demande de rescrit spécifique aux jeunes entreprises innovantes est, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, validée par l'octroi du statut de jeune entreprise innovante ; dans la mesure où l'administration ne conteste pas que les données qui lui ont été présentées en 2011 étaient complètes et sincères, la qualification de travaux de recherche a été définitivement validée pour l'année 2010 ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'administration fiscale, qui lui a remboursé la quote-part du crédit impôt recherche non imputé sur l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2010, n'avait pas pris en matière de crédit impôt recherche une position qui lui est opposable ;
- la réponse ministérielle n° 18984, publiée le 7 janvier 2021, à la question posée par le sénateur Canevet confirme que l'application du régime de la jeune entreprise innovante à une entreprise valide également, au titre de l'année considérée, l'éligibilité au crédit impôt recherche des opérations de recherche présentées dans le cadre du rescrit prévu au 4° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; la position prise par l'administration fiscale le 23 août 2011, en ce qui concerne son statut de jeune entreprise innovante, et validée à compter de l'exercice clos pour l'année 2010, fait obstacle à la remise en cause du crédit impôt recherche de l'année 2010 ;
- le courrier du 23 août 2011, qui renvoie à l'avis favorable du 15 juin 2011 du ministre chargé de la recherche au titre des dépenses éligibles au crédit impôt recherche, constitue une réponse favorable à la demande de rescrit qu'elle avait présentée dans le cadre des dispositions du B de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales ; cet avis du 15 juin 2011 n'est donc pas inopposable à l'administration fiscale dès lors qu'il a été incorporé à la position que l'administration fiscale exprimée dans son courrier du 23 août 2011 ; le dispositif du crédit impôt recherche porte sur l'année civile contrairement à celui des jeunes entreprises innovantes qui peut s'appliquer jusqu'en 2012 ainsi que cela ressort du courrier du 23 août 2011 ; le programme de recherche - développement de l'année 2010 étant achevé à la date de présentation de la demande de rescrit, la condition tenant à ce que la situation de l'entreprise ne se trouve pas ultérieurement modifiée ne peut s'appliquer en ce qu'elle ne concerne que le dispositif des jeunes entreprises innovantes ; si la position de l'administration a changé sur l'éligibilité au crédit impôt recherche des travaux menés en 2010, cette circonstance doit rester sans effet sur la période couverte par la décision de rescrit ;
- s'agissant du crédit impôt recherche 2011 et 2012, la circonstance que le tribunal n'ait pas tenu compte, notamment, du rapport d'expertise du 17 septembre 2016 et de la caducité manifeste de la position exprimée dans les rapports d'expertise des 30 juin 2015 (pour 2011), 20 mars 2014 et 25 juin 2015 (pour 2012) est suffisante pour infirmer le jugement attaqué et prononcer la décharge des rappels contestés ; il n'est pas contesté que, sur la base des travaux décrits par la société 4SH, qu'elle a réalisés pour elle en 2011 et 2012, et qui se recoupent manifestement avec les dossiers qu'elle a présentées au titre des crédits impôt recherche 2011 et 2012, le ministre chargé de la recherche a renouvelé, sans aucune réserve, l'agrément de la société ASH ; autrement dit, sur la même opération, une position a expressément été prise en ce qui concerne l'éligibilité des travaux menés au crédit impôt recherche par l'organisme d'Etat reconnu comme expert en ces domaines ;
- les textes n'exigent pas la présence de plus d'un ingénieur ou d'un docteur dans une équipe de recherche - développement ; elle emploie elle-même des ingénieurs et fait appel à un prestataire informatique, agréé en tant qu'organisme exécutant des travaux de recherche - développement en sous-traitance ; les compétences en personnel de la société 4SH ne sont pas contestables alors que cette société a présenté les travaux réalisés pour son compte pour bénéficier du renouvellement de son agrément au titre du crédit impôt recherche.
Par des mémoires en défense enregistrés les 24 février, 5 mai et 10 juin 2021, le ministre chargé des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par la Sas Bp2r ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 4 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 18 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts ;
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,
- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,
- et les observations de Me Simon, substituant Me Bondiguel, avocat de la Sarl Bp2r.
Considérant ce qui suit :
1. La Sarl Bp2r, qui exerce une activité de conseil dans le secteur du transport et de la logistique depuis 2005, date à laquelle elle a été créée, s'est spécialisée dans l'optimisation des organisations du transport. Elle a développé, depuis 2008, un projet reposant sur une solution logicielle dénommée SInergie qui a vocation à gérer une masse volumineuse et complexe de données, au titre duquel elle a présenté une demande de crédit d'impôt recherche pour les années 2010, 2011 et 2012. Au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet pour la période courant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, l'administration fiscale a remis en cause les crédits d'impôt recherche déclarés en application de l'article 244 quater B du code général des impôts. Par un jugement n° 1821773/1-2 du 20 octobre 2020, dont la société relève appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels d'impôt sur les sociétés mis à sa charge en conséquence de cette remise en cause.
Sur l'application de la loi fiscale :
2. Aux termes de l'article 244 quater du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 decies, 44 undecies, 44 duodecies, 44 terdecies et 44 quaterdecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. Le taux du crédit d'impôt est de 30 % pour la fraction des dépenses de recherche inférieure ou égale à 100 millions d'euros et de 5 % pour la fraction des dépenses de recherche supérieure à ce montant. / (...). / II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique, y compris la réalisation de prototypes ou d'installations pilotes. (...) ; / b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations. (...) ; / d) Les dépenses exposées pour la réalisation d'opérations de même nature confiées à : / 1° Des organismes de recherche publics ; / (...) ; / 6° Des associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association ayant pour fondateur et membre l'un des organismes mentionnés aux 1° ou 2° ou des sociétés de capitaux dont le capital ou les droits de vote sont détenus pour plus de 50 % par l'un de ces mêmes organismes. Ces associations et sociétés doivent être agréées conformément au d bis et avoir conclu une convention en application de l'article L. 313-2 du code de la recherche ou de l'article L. 762-3 du code de l'éducation avec l'organisme précité. (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / a. Les activités ayant un caractère de recherche fondamentale, qui pour apporter une contribution théorique ou expérimentale à la résolution des problèmes techniques, concourent à l'analyse des propriétés, des structures, des phénomènes physiques et naturels, en vue d'organiser, au moyen de schémas explicatifs ou de théories interprétatives, les faits dégagés de cette analyse ; / b. Les activités ayant le caractère de recherche appliquée qui visent à discerner les applications possibles des résultats d'une recherche fondamentale ou à trouver des solutions nouvelles permettant à l'entreprise d'atteindre un objectif déterminé choisi à l'avance. / Le résultat d'une recherche appliquée consiste en un modèle probatoire de produit, d'opération ou de méthode ; / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ".
3. Il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application du crédit d'impôt recherche eu égard aux conditions dans lesquelles sont effectuées ces opérations. S'il se prononce au vu des éléments avancés par l'une et l'autre partie, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci.
4. Il résulte de l'instruction, et notamment des propositions de rectifications des 15 décembre 2014 et 24 juillet 2015, que l'administration fiscale a, au vu des rapports d'expertise diligentés par le ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche les 20 mars 2014, 25 et 30 juin 2015, conclu à l'inéligibilité des travaux engagés par la Sarl Bp2r au cours des années en litige ainsi qu'à celle des dépenses de personnel, de sous-traitance et de veille technologique. L'administration fiscale a ainsi estimé que la solution SInergie avait été principalement conçue antérieurement à l'année 2010 et que les tâches et sous-tâches identifiées au cours des années 2010 à 2012 visaient à faire évoluer et à améliorer les performances techniques de cette plateforme automatisée, par l'utilisation d'outils informatiques accessibles à partir du savoir commun, et que les opérations en cause, confiées à la société 4 SH, en qualité de sous-traitant, correspondaient à des travaux de développement informatique et non à des opérations de recherche et développement.
5. La Sarl Bp2r, qui soutient que la validation de son statut de jeune entreprise innovante (JEI) ainsi que le remboursement des crédits d'impôt recherche demandés au titre d'années précédentes l'ont confortée dans son positionnement et lui ont procuré les moyens de poursuivre son développement, fait valoir que le revirement de l'administration fiscale au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, s'agissant de l'éligibilité des travaux et des dépenses engagées, a remis en cause l'espérance légitime qu'elle avait nourrie et qui peut être regardée comme un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il résulte, toutefois, de l'instruction, et notamment de l'avis de la direction régionale à la recherche et à la technologie (DRRT) du 15 juin 2011 et de la décision de la direction générale des finances publiques du 23 août 2011 que la société requérante a été informée de ce que certaines conditions afférentes au statut de JEI, qui lui était reconnu sur la base du dossier qu'elle avait déposé, ne pouvaient être vérifiées que postérieurement et que tout contrôle fiscal n'était pas exclu. Dans ces conditions, la Sarl Bp2r ne peut se prévaloir d'une espérance légitime ainsi que de la méconnaissance de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle ne peut davantage invoquer les principes de confiance légitime et de sécurité juridique, qui font partie des principes généraux du droit communautaire, qui ne trouvent à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire. Tel n'est pas le cas en l'espèce. Il suit de là que le moyen invoqué ne peut qu'être écarté.
6. S'agissant du crédit d'impôt recherche de l'année 2010, la Sarl Bp2r soutient que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur l'analyse de l'expert désigné par le ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche pour remettre en cause l'éligibilité au crédit d'impôt recherche des dépenses engagées. Elle fait ainsi valoir que la position exprimée par l'expert a été remise en cause non seulement par l'avis de la DRRT du 15 juin 2011, dont le tribunal n'a pas tenu compte, mais également par l'administration fiscale elle-même dans le cadre de la demande de remboursement du crédit d'impôt recherche 2013 qu'elle lui a présentée. Toutefois, la circonstance que la DRRT ait, dans le cadre de la demande de rescrit présenté par la Sarl Bp2r sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, validé " les aspects scientifiques et techniques des travaux présentés par la société, ainsi que les moyens associés tels qu'ils ont été décrits dans le présent dossier " et formulé un avis favorable à l'obtention du statut de jeune entreprise innovante (JEI) n'est pas suffisante, pour les motifs déjà indiqués au point précédent, pour établir qu'elle remplissait les critères d'éligibilité prévus à l'article 244 quater B précité du code général des impôts à raison des travaux réalisés au cours des années en litige. La circonstance que l'administration fiscale ait accueilli sa demande de remboursement du crédit d'impôt recherche de l'année 2013 n'est pas davantage suffisante dès lors que l'éligibilité des travaux menés dans le cadre de son projet SInergie au dispositif de l'article 244 quater B s'apprécie année par année. Dans ces conditions, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté.
7. S'agissant des crédits d'impôt recherche des années 2011 et 2012, si la Sarl Bp2r se prévaut de la décision du 21 mai 2014 par laquelle le ministre chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche a décidé d'accorder à la société 4 SH, qui a réalisé des travaux pour son compte en qualité de sous-traitant, l'agrément prévu au II de l'article 244 quater B du code général des impôts au titre des années 2014, 2015 et 2016, cette décision porte sur des années postérieures à celles en litige et n'est, au demeurant, pas suffisante à elle seule pour démontrer l'éligibilité des travaux et des dépenses engagés au titre des années 2011 et 2012, dès lors qu'elle se borne à reconnaître la capacité de la société 4 SH à mener des travaux de recherche, sans pour autant se prononcer sur la qualification, au regard des dispositions citées au point 2. ci-dessus, des travaux effectivement réalisés. Par ailleurs, la Sarl Bp2r soutient, à l'appui du rapport du 17 septembre 2016 de l'expert qu'elle a mandaté, que les travaux ainsi que les dépenses engagées sont bien éligibles en application de l'article 244 quater B du code général des impôts. Toutefois, si ce rapport souligne, ainsi que l'a relevé le tribunal, que la solution logicielle développée par la société supporte des fonctionnalités très puissantes et uniques en matière de modélisation, d'analyse et de simulation de coûts de flux regroupés et que le projet a permis d'apporter un progrès substantiel à l'état des connaissances en matière d'ingénierie logicielle, de solutions pilotage et de valorisation des activités de transport, il présente le projet dans son ensemble et ne contient aucun élément précis et détaillé sur les travaux menés au cours de chacune des années en litige, ou se borne à relever le caractère innovant des solutions mises en œuvre, sans pour autant identifier des avancées substantielles au regard des connaissances existantes, alors que l'expert mandaté par le ministère de la recherche relevait, dans ses différents rapports, que les travaux entrepris dans le cadre du projet SInergie reposaient sur un savoir commun pour atteindre les objectifs escomptés, permettant ainsi des améliorations logicielles accessibles à partir de ce savoir commun ainsi que des améliorations des performances de cet outil en l'adaptant à la volumétrie des données traitées, et que ces travaux correspondaient davantage à du développement informatique et non à des opérations de recherche et développement sans création d'un outil représentant une avancée substantielle des connaissances en l'absence d'état de l'art dédié à chaque tâche ou sous-tâche, de verrous spécifiques à leurs réalisations et d'incertitudes scientifiques et techniques à lever.
Sur la prise de position formelle :
8. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / (...) ". Aux termes de l'article L. 80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : / (...) ; / 4° Lorsque l'administration n'a pas répondu de manière motivée dans un délai de trois mois à un contribuable de bonne foi qui a demandé, à partir d'une présentation écrite précise et complète de la situation de fait, si son entreprise constitue une jeune entreprise innovante au sens de l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts. (...) ".
9. D'une part, la Sarl Bp2r se prévaut, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales de l'avis favorable émis le 15 juin 2011 par la DRRT et de la décision du 23 août 2011 par laquelle l'administration fiscale lui a indiqué qu'elle pouvait prétendre aux avantages fiscaux et sociaux attachés au statut de la JEI prévu par l'article 44 sexies-0 A du code général des impôts. Toutefois, tant l'avis de la DRRT que la décision de l'administration fiscale, qui réservent le bénéfice de ce statut à l'accomplissement de certaines conditions, n'ont eu ni pour objet ni pour effet de prendre formellement position sur l'éligibilité au crédit d'impôt recherche des travaux réalisés et des dépenses engagées au titre des années 2010, 2011 et 2012 ni, en tout état de cause, de dispenser la Sarl Bp2r d'établir qu'elle a effectivement réalisé les dépenses liées à des activités de recherche au titre desquelles elle réclame le bénéfice des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts. Dans ces conditions, la Sarl Bp2r ne peut se prévaloir d'une prise de position formelle. Elle ne peut davantage se prévaloir d'une prise de position tacite de l'administration à défaut d'invoquer des éléments de fait de nature à établir un faisceau d'indices révélant une telle prise de position. Il suit de là que le moyen ne peut qu'être écarté.
10. D'autre part, la Sarl Bp2r soutient que la société 4 SH, qui a réalisé les travaux de recherche au titre des années 2011 et 2012 en qualité de sous-traitant, a obtenu du ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche le 21 mai 2014, pour les années 2014, 2015 et 2016, le renouvellement de son agrément en tant qu'organisme exécutant des travaux de recherche et développement sur la base des travaux menés pour elle pendant ces deux années. Elle fait valoir que cet agrément est opposable à l'administration fiscale sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales. Toutefois, comme indiqué au point 7. du présent arrêt, cet agrément, qui reconnaît à une entreprise la qualité d'organisme exécutant des travaux de recherche et développement en tant qu'organisme de recherche privé, a pour seul objet la reconnaissance de la capacité de cette entreprise à mener ce type de travaux pour le compte de tiers et n'a pas pour effet de dispenser la société donneuse d'ordre d'établir que les travaux réalisés au cours des exercices concernés, correspondent à des activités de recherche au sens des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts. Dans ces conditions, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la Sarl Bp2r n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête d'appel, ensemble, en tout état de cause, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la Sarl Bp2r est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Bp2r et au ministre de de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- M. Magnard, premier conseiller,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2021.
Le rapporteur,
S. BONNEAU-MATHELOTLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA04070