Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 29 décembre 2017, la société SAAT, représentée par
Me B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1700143 du 28 septembre 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) de prononcer la condamnation demandée ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Nouméa la somme de 350 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les modalités de calcul du prélèvement communal ne sont pas conformes à l'article 890 du code des impôts de Nouvelle Calédonie, issu de la délibération n° 91/CP du 20 septembre 1996 relative à des prélèvements sur les établissements des jeux de hasards, et qui renvoie aux dispositions applicables au prélèvement territorial qui s'applique au produit net des jeux ;
- le jugement attaqué n'a pas motivé les raisons pour lesquels le tribunal a estimé que l'article 890 du code des impôts de Nouvelle Calédonie prévoyait un prélèvement territorial sur le produit brut des jeux ;
- la commune a méconnu les dispositions législatives et règlementaires prévues au code des impôts de la Nouvelle-Calédonie et les dispositions de la loi organique statutaire n° 99-209 du 19 mars 1999 en prélevant une taxe dont l'assiette de calcul ne repose sur aucune base légale ;
- elle a subi un préjudice matériel équivalent au montant des sommes illégalement prélevées pour la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2016.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 août 2018, la commune de Nouméa, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société australe d'animation touristique (SAAT) la somme de 6 000 euros au titre de
l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie n'a pas statué sur tous les moyens soulevés par la commune de Nouméa ;
- l'irrecevabilité manifeste de la demande de la société australe d'animation touristique n'est pas contestée ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 9 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au
23 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 91/CP du 20 septembre 1996 relative à des prélèvements sur les établissements des jeux de hasards (JONC 22 octobre 1996) ;
- le code des impôts de la Nouvelle Calédonie ;
- le code de justice administrative dans sa rédaction applicable en Nouvelle-Calédonie.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Magnard,
- et les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société australe d'animation touristique (SAAT) a pour objet social l'exploitation de maisons de jeux et de casinos, et plus spécialement d'un établissement de jeux de bingo sur le territoire de la commune de Nouméa. Au motif que les modalités de calcul du prélèvement communal sur le produit des jeux ne correspondaient pas aux dispositions législatives édictées et que la commune de Nouméa, en prélevant une taxe dont l'assiette de calcul ne dispose d'aucune base légale, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, la société australe d'animation touristique (SAAT) a demandé le versement d'une indemnisation en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la faute commise, et dont elle a évalué le montant à la somme de 514 271 783 francs CFP. Par la présente requête, elle relève appel du jugement du 28 septembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle Calédonie a rejeté cette demande.
2. Aux termes de l'article 890 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie : " Le cahier des charges, approuvé par le conseil municipal de la commune d'implantation d'un établissement de jeux de hasard régulièrement autorisé, peut comporter une clause instituant au profit de ladite commune un prélèvement sur le produit des jeux au maximum égal à 10 % de la même base que le prélèvement opéré au profit de la Nouvelle-Calédonie avec abattement à la base de 30 %. Le prélèvement est liquidé et contrôlé, sur une déclaration fournie et certifiée par l'administration fiscale, selon les mêmes procédures que la taxe territoriale. Il est recouvré par le comptable de la commune. ".
3. La société requérante fait valoir que le cahier des charges en date du 22 août 2013, applicable à compter du 1er mai 2011, et dont procèdent les impositions en litige, en ce qu'il prévoit en son article 3 un prélèvement égal à 10 % du produit brut des jeux, diminué d'un abattement au taux de 30 %, est contraire aux dispositions précitées de l'article 890 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie qui instituerait, au profit de la commune, un prélèvement sur le produit net des jeux. Il résulte toutefois de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la délibération n° 91/CP du congrès du territoire du 20 septembre 1996 dont elles sont issues, que le prélèvement sur le produit des jeux dont s'agit était celui précédemment institué par les cahiers des charges autorisant l'exploitation d'établissement de jeux, lesquels prévoyaient un prélèvement de 10 % sur le produit brut avec un abattement de 30 %, ainsi que par la délibération n° 26/CP du congrès du territoire du 23 juillet 1985, laquelle prévoyait un prélèvement de 7 % sur le produit brut. Si la société requérante fait valoir que la base à retenir pour l'établissement de ce prélèvement est le produit net de l'activité, le prélèvement opéré au profit de la Nouvelle-Calédonie étant établi sur les produits nets ainsi qu'il résulte des dispositions des articles 626 et 647 du code des impôts, une telle argumentation est dépourvue de portée dès lors que les dispositions de l'article 890 du code des impôts prévoient l'application d'un abattement forfaitaire de 30 % représentatif de charges. Ainsi, et contrairement à ce qui est soutenu, les modalités de calcul du prélèvement communal en litige sont conformes aux dispositions de l'article 890 du code des impôts de Nouvelle Calédonie issues de la délibération n° 91/CP du 20 septembre 1996. En l'absence de faute commise dans la détermination de ces modalités, la société requérante ne saurait demander la condamnation de la commune de Nouméa à la réparation du préjudice subi en conséquence d'une telle faute.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que la société requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges, qui ont suffisamment motivé leur jugement et qui, dès lors qu'ils rejetaient la demande qui leur était soumise, n'étaient pas tenus de statuer sur tous les moyens de la commune de Nouméa, ont rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Nouméa qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande la société requérante au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société requérante le versement des sommes que demande la commune de Nouméa au titre de ces mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société australe d'animation touristique (SAAT) est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Nouméa tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL australe d'animation touristique (SAAT) et à la commune de Nouméa.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brotons, président de chambre,
- Mme Appèche, président assesseur,
- M. Magnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 mars 2019.
Le rapporteur,
F. MAGNARDLe président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre des Outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA03993