Par une requête, quatre mémoires complémentaires et des pièces, enregistrés les
24 janvier 2017, 21 mars 2017, 9 juillet 2017, 10 juillet 2017 et 1er février 2019, M. D...et le syndicat Solidaires Assemblée Nationale et la fédération Solidaires des institutions de l'Etat, représentés par MeB..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1511218/5-2 du
24 novembre 2016 ;
2°) d'annuler les notations de M. D...depuis 1982 ;
3°) d'annuler les propositions d'inscription au tableau d'avancement au grade de technicien de l'hôtellerie établies lors de la réunion du comité d'avancement du 16 avril 2015, ainsi que le procès-verbal de cette réunion ;
4°) d'annuler la décision du 1er juin 2015 par laquelle le comité d'avancement a refusé de reconnaitre l'illégalité des propositions d'inscription du 16 avril 2015 ;
5°) d'annuler l'arrêté du président et des questeurs de l'Assemblée nationale du
4 juin 2015 portant inscription au tableau d'avancement pour le grade de technicien de l'hôtellerie ;
6°) d'ordonner au Président de l'Assemblée nationale d'inscrire M. D...sur ce tableau d'avancement et de transformer les contrats de droit privé des personnels de l'association chargée des restaurants de l'Assemblée nationale en contrats de droit public.
Ils soutiennent que :
- les décisions attaquées méconnaissent le principe d'égalité, dans la mesure où
M. D...aurait dû être regardé comme mis à disposition de l'association chargée des restaurants de l'Assemblée nationale (AGRAN), de la même manière que les fonctionnaires de l'Assemblée nationale relevant de l'article 58 bis du règlement intérieur de cette assemblée, et ainsi être noté par son supérieur hiérarchique au sein de cette association.
- les décisions attaquées méconnaissent l'article 84 du règlement intérieur de l'Assemblée nationale dans la mesure où les convocations dans lesquelles figurent les listes des fonctionnaires inscriptibles auraient dû être adressées au comité d'avancement au moins un mois avant sa tenue.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mars 2017 et un mémoire enregistré le
31 octobre 2017, l'Assemblée nationale représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ;
- le règlement intérieur sur l'organisation des services portant statuts du personnel de l'Assemblée nationale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme d'Argenlieu,
- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,
- les observations de MeC..., pour l'Assemblée nationale,
- et les observations de M. F...pour le syndicat Solidaires Assemblée nationale.
Considérant ce qui suit :
1. M. D...fonctionnaire de l'Assemblée nationale depuis 1982, a atteint le grade de chef de rang hors classe. Il était inscriptible au tableau d'avancement pour l'accès au grade de technicien de l'hôtellerie, au titre de l'année 2015/2016. Toutefois, après un examen de son dossier, les membres de la commission d'avancement qui s'est tenue le 16 avril 2015, ont rejeté sa demande et ont proposé à l'unanimité l'inscription au tableau d'avancement de l'un de ses collègues. L'intéressé a déposé un recours gracieux contre cette décision, qui a été expressément rejeté le 1er juin 2015. Par un arrêté du 4 juin 2015, le tableau d'avancement pour l'année 2015/2016 pour l'accès au grade de technicien de l'hôtellerie a été fixé, conformément aux propositions du comité d'avancement du 16 avril 2015. Par un jugement du 24 novembre 2016 dont M.D..., le syndicat Solidaires Assemblée nationale et la fédération Solidaires des institutions de l'Etat font appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation des notations de M. D...depuis 1982, des propositions d'inscription au tableau d'avancement au grade de technicien de l'hôtellerie faites lors de la réunion du comité d'avancement du 16 avril 2015, ainsi que du procès-verbal de cette réunion, de la décision du
1er juin 2015 par laquelle le comité d'avancement a refusé de reconnaître l'illégalité des propositions d'inscription du 16 avril 2015, de l'arrêté du président et des questeurs de l'Assemblée nationale du 4 juin 2015 portant inscription au tableau d'avancement pour le grade de technicien de l'hôtellerie et enfin, qu'il soit enjoint au président de l'Assemblée nationale d'inscrire M. D...sur ce tableau d'avancement et de transformer les contrats de droit privé des personnels de l'association chargée des restaurants de l'Assemblée nationale en contrats de droit public.
Sur la recevabilité des conclusions aux fins qu'il soit enjoint au président de l'Assemblée nationale de transformer les contrats de droit privé des personnels de l'association chargée des restaurants de cette assemblée en contrats de droit public :
2. Les requérants persistent en appel à demander qu'il soit ordonné au président de l'Assemblée nationale de transformer les contrats de droit privé des personnels de l'association chargée des restaurants de cette assemblée en contrats de droit public. Ces conclusions à fin d'injonction, qui ne sont au demeurant assorties d'aucun moyen de droit, ayant été formulées à titre principal sont à ce titre irrecevables et doivent, par conséquent, être rejetées.
Sur les conclusions aux fins d'annulation sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité :
3. Aux termes de l'article 58 bis du règlement intérieur sur l'organisation des services portant statuts du personnel de l'Assemblée nationale : " Les fonctionnaires appartenant aux corps des administrateurs, des secrétaires des débats, des rédacteurs des débats et des administrateurs-adjoints comptant au moins quatre années de services effectifs dans leur corps peuvent, dans l'intérêt du service, être mis à disposition de Parlements étrangers, d'institutions européennes, d'organisations internationales, du Conseil économique et social, d'organismes juridictionnels et d'autorité. L'article 81 de ce texte précise que : " Les fonctionnaires sont notés chaque année par leur directeur de service et, selon l'organisation des services, par leur(s) supérieur(s) hiérarchique(s) direct(s) ". L'article 84 de ce même règlement dispose que : " Le Comité d'avancement tient chaque année, en principe avant le 1er avril, deux réunions destinées à l'élaboration des différents tableaux d'avancement. Les représentants de l'administration et les délégués des catégories reçoivent du service des Ressources humaines les listes des fonctionnaires inscriptibles un mois au moins avant chaque réunion du Comité ". Enfin, l'article 145 dudit règlement prévoit que : " 1. Les employés des restaurants sont mis à la disposition de l'Association chargée de la gestion des restaurants de l'Assemblée nationale. ".
4. En premier lieu, M. D...fait valoir qu'ayant été mis " à disposition " de l'association chargée de gérer les restaurants de l'Assemblée nationale au sens de l'article 58 bis précité du règlement intérieur de cette assemblée, il aurait dû être noté par son responsable hiérarchique au sein de cette association et non par un fonctionnaire de l'assemblée. Il en déduit que ses notations étaient illégales et qu'en conséquence toutes les décisions contestées qui en découlent auraient dû être annulées.
5. D'une part, l'article 58 bis précité, relatif à la mise à disposition de certains fonctionnaires de l'assemblée, vise uniquement les corps d'administrateurs, de secrétaires des débats, de rédacteurs des débats et d'administrateurs-adjoints, dont M. D...ne relève pas. Si les appelants entendent néanmoins se prévaloir du principe d'égalité en vue de bénéficier de ces dispositions, ce principe n'est pas transposable en l'espèce, dans la mesure où il n'a vocation à s'appliquer qu'entre agents appartenant à un même corps ou à un même cadre d'emplois et placés dans une situation identique.
6. D'autre part, si M. D...fait encore valoir qu'il ne pouvait qu'être mis " à disposition " de l'association en cause, celle-ci étant une entité autonome de l'assemblée, ceci ne ressort pas des pièces du dossier. Ladite association a en effet été créée par l'Assemblée nationale dans le seul but de rendre un service de restauration aux personnes y travaillant, les locaux de l'Assemblée nationale ayant d'ailleurs été mis gratuitement à sa disposition. Cette assemblée contribue en outre de manière substantielle au budget de l'association en assurant notamment la rémunération d'une partie de ses employés et en lui allouant annuellement une subvention d'équilibre. Enfin, le conseil d'administration de cette association est composé exclusivement de fonctionnaires de l'assemblée. Dans ces conditions, eu égard aux conditions de sa création, à son objet, à son financement et à l'influence des représentants de l'assemblée en son sein, l'association chargée de gérer les restaurants de l'Assemblée nationale ne peut être regardée comme constituant une véritable entité autonome de l'Assemblée nationale. Ce faisant, la notation de M. D...n'avait pas à être faite par son responsable hiérarchique au sein de l'association, mais par un directeur de service de l'assemblée, en application des dispositions précitées de l'article 81 du règlement intérieur sur l'organisation des services portant statuts du personnel. Par suite, le moyen tiré de ce que cet article aurait été méconnu doit être écarté.
7. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que les convocations pour le comité d'avancement du 16 avril 2015 auxquelles étaient jointes les listes des fonctionnaires inscriptibles ont été adressées aux membres de ce comité le 5 mars 2015. Si M. D...fait valoir que ces listes ont été mises à jour sur le site internet le 3 avril 2015, soit moins d'un mois avant la tenue de la réunion du comité, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette mise à jour aurait entraîné une modification des listes initialement transmises aux membres du comité d'avancement. Par suite, le moyen tiré de ce que l'article 84 précité du règlement intérieur sur l'organisation des services portant statuts du personnel de l'Assemblée nationale aurait été méconnu doit être écarté.
8. Il s'ensuit que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur leur recevabilité, les conclusions de M.D..., du syndicat Solidaires Assemblée nationale et de la fédération Solidaires des institutions de l'Etat tendant à l'annulation de ses notations depuis 1982, des propositions d'inscription au tableau d'avancement au grade de technicien de l'hôtellerie faites lors de la réunion du comité d'avancement du 16 avril 2015, du procès-verbal de cette réunion, de la décision du 1er juin 2015 par laquelle le comité d'avancement a refusé de reconnaître l'illégalité des propositions d'inscription du 16 avril 2015 et de l'arrêté du président et des questeurs de l'Assemblée nationale du 4 juin 2015 portant inscription au tableau d'avancement pour le grade de technicien de l'hôtellerie doivent être rejetées. Par voie de conséquence, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au président de l'Assemblée nationale d'inscrire
M. D...sur le tableau d'avancement de l'année 2014/2015 doivent être rejetées
9. Il résulte de ce qui précède que M.D..., le syndicat Solidaires Assemblée nationale et la fédération Solidaires des institutions de l'Etat ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté leur demande.
Sur les frais de justice :
10. Les dispositions énoncées par l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Assemblée nationale, qui n'est pas la partie perdante, la somme que demandent les appelants sur le même fondement au titre des frais exposés par eux non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit à la demande présentée par l'Assemblée nationale sur le même fondement et de mettre à la charge de M.D..., du syndicat Solidaires Assemblée nationale et de la fédération Solidaires des institutions de l'Etat, solidairement, une somme de 1 500 euros.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M.D..., du syndicat Solidaires Assemblée nationale et de la fédération Solidaires des institutions de l'Etat est rejetée.
Article 2 : M.D..., le syndicat Solidaires Assemblée nationale et la fédération Solidaires des institutions de l'Etat verseront solidairement à l'Assemblée nationale une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D..., au syndicat Solidaires Assemblée nationale, à la fédération Solidaires des institutions de l'Etat et au Président de l'Assemblée nationale.
Délibéré après l'audience du 19 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Even, président de chambre,
- Mme Hamon, président assesseur,
- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 mars 2019.
Le rapporteur,
L. d'ARGENLIEULe président,
B. EVENLe greffier,
S. GASPAR
La République mande et ordonne au Premier ministre en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA00348