- d'enjoindre au ministre de l'éducation nationale de rejeter le recours administratif formé par Mme C... D... contre la sanction de révocation du 31 mai 2017.
Par un jugement n° 1806630 du 12 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la requête présentée par l'établissement public Sorbonne Université.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 12 février 2019 et 24 avril 2019, l'établissement public Sorbonne Université, représenté par Me B..., demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1806630 du Tribunal administratif de Paris en date du 12 décembre 2018 et de mettre la somme de 3 500 euros à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'établissement public Sorbonne Université soutient que :
- la minute du jugement n'a pas été signée par les magistrats qui l'ont rendue en violation des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé qu'elle n'avait pas d'intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté du 23 février 2018 substituant à la révocation la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans assortie d'un sursis d'un an ;
- la procédure est irrégulière, car la délibération du 19 décembre 2017 de la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État est intervenue après l'expiration du délai de deux mois à compter du jour de la saisine de la commission de recours, en méconnaissance de l'article 15 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- le caractère contradictoire de la procédure disciplinaire a été méconnu ;
- le ministre a méconnu sa compétence en se croyant lié par l'avis émis par la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État ;
- la sanction d'exclusion temporaire de fonction pendant une durée de deux ans assortie d'un sursis d'un an est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er février 2021, le ministre de l'éducation nationale conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens soulevés par Sorbonne Université sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour Sorbonne Université.
Une note en délibéré présentée par le ministre de l'éducation nationale a été enregistrée le 12 février 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... D..., attachée d'administration de l'État depuis le 1er septembre 1984, était affectée à la direction des ressources humaines de l'université Pierre et Marie Curie à Paris depuis le 1er septembre 2003. Par un arrêté du 31 mai 2017, le ministre de l'éducation nationale l'a révoquée à compter du 6 juin 2017. Ce même 6 juin 2017, M. D... a exercé un recours auprès de la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État. Par une délibération du 19 décembre 2017, la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État a émis l'avis de substituer à la sanction de révocation celle d'exclusion temporaire de fonctions pendant une durée de deux ans assortie d'un sursis d'un an. Par un arrêté du 23 février 2018 prenant effet au 6 juin 2017, le ministre de l'éducation nationale a substitué la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans avec un sursis d'un an à la sanction de révocation. Par un jugement n° 1806630 du 12 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la requête formée par l'établissement public Sorbonne Université contre l'arrêté du 23 février 2018 et la délibération de la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État du 19 décembre 2017. L'établissement public Sorbonne Université doit être regardé comme faisant appel de ce jugement en tant seulement qu'il rejette ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale a substitué la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pendant une durée de deux ans assortie d'un sursis d'un an à la sanction de révocation.
Sur la régularité du jugement :
2. Le président de l'université Pierre et Marie Curie, qui est un élu du conseil d'administration de cet établissement public, a initié la procédure disciplinaire à l'encontre de Mme D..., fonctionnaire de l'État affectée dans les services de cette université, en saisissant le ministre de l'éducation nationale d'une demande de sanction disciplinaire. En application de l'article L. 712-2 du code de l'éducation " le président de l'université (...) 4° (...) a autorité sur l'ensemble des personnels de l'université ". L'établissement Sorbonne Université, né de la fusion entre les universités Pierre et Marie Curie et la Sorbonne, et qui s'est substitué à l'université Pierre et Marie Curie, justifie donc d'un intérêt à agir à l'encontre de la sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un fonctionnaire de l'État affecté dans ses services. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen tiré de l'irrégularité du jugement, l'établissement Sorbonne Université est fondé à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale a substitué la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pendant une durée de deux ans assortie d'un sursis d'un an à la sanction de révocation.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par l'établissement Sorbonne Université à l'encontre de l'arrêté du 23 février 2018 du ministre de l'éducation nationale.
4. Aux termes de l'article 15 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire, " Cet avis ou cette recommandation doit intervenir dans le délai de deux mois à compter du jour où la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État a été saisie. / Ce délai est porté à quatre mois lorsqu'il est procédé à une enquête ". Aux termes de l'article 17 du même décret : " (...) Le délai du recours contentieux ouvert contre la décision prononçant la sanction disciplinaire est suspendu jusqu'à notification soit de l'avis de la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État déclarant qu'il n'y a pas lieu de donner suite à la requête qui lui a été présentée, soit de la décision définitive du ministre ".
5. En premier lieu, la requérante soutient que l'avis ou la recommandation du 19 décembre 2017 de la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État est intervenue postérieurement à l'expiration du délai d'une durée de deux mois courant à compter du jour de la saisine de cette commission, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 15 du décret du 25 octobre 1984. Toutefois, la méconnaissance de ce délai de deux mois pour émettre un avis ou une recommandation n'est pas prescrit à peine de nullité de la sanction définitive prononcée par l'autorité administrative. Ce moyen ne peut dès lors qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, la circonstance que la commission de recours du Conseil supérieur de la fonction publique de l'État a statué au-delà du terme du délai de deux mois prévu par l'article 15 du décret du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'État n'a pas eu pour effet de priver Mme D... du droit à un recours juridictionnel effectif garanti par l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article 17 du même décret que le délai du recours contentieux ouvert contre la décision prononçant le licenciement de l'intéressée est suspendu jusqu'à la notification de l'avis de la commission de recours. Le moyen tiré du caractère vicié de la procédure à raison de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure disciplinaire ne peut donc qu'être écarté.
7. En troisième lieu, il résulte des termes de l'arrêté du 23 février 2018 que le ministre de l'éducation nationale s'est approprié la proposition émise par la commission de recours du conseil supérieur de la fonction publique de l'État du 19 décembre 2017 sans s'estimer lié par cet avis. Le moyen tiré de ce que le ministre de l'éducation nationale aurait méconnu sa compétence ne peut donc qu'être écarté.
8. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il est reproché à Mme D... des absences injustifiées, des négligences dans son travail, le refus d'exécuter les ordres de sa hiérarchie ainsi qu'un comportement inapproprié à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques et de certaines de ses collègues. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier qu'en trente-quatre années de carrière dans les services de l'éducation nationale, Mme D... n'a été sanctionnée qu'une seule fois par un blâme pour des faits en partie similaires en 2010. Dans ces conditions, en l'absence d'engagement de toute autre procédure disciplinaire que celle ayant conduit à l'infliction d'une sanction du premier groupe, la sanction d'exclusion temporaire pendant deux ans assortie d'un sursis d'une année apparaît proportionnée à la gravité des faits reprochés et en considération de l'ensemble de la carrière de l'intéressée. Le moyen tiré de ce que les faits reprochés auraient justifié la sanction de révocation, soit la plus sévère dans l'échelle des sanctions disciplinaires doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que l'établissement Sorbonne Université n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 23 février 2018 du ministre de l'éducation nationale.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à Sorbonne Université une somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris du 12 décembre 2018 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions présentées par l'établissement Sorbonne Université contre l'arrêté du 23 février 2018 du ministre de l'éducation nationale.
Article 2 : La demande présentée par l'établissement Sorbonne Université devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentées devant la Cour est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Sorbonne Université et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée à Mme C... D....
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 mars 2021.
Le rapporteur,
I. A...Le président,
S.L. FORMERY
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 19PA00710