Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 janvier 2018, M. et MmeE..., représentés par MeA..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1501745 du 15 novembre 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'administration a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales et le principe de loyauté, à défaut d'information et de communication des documents utilisés pour fonder le rehaussement ; l'administration ne leur a pas communiqué l'intégralité des documents visés dans la proposition de rectification et n'a pas fait état de l'ensemble des démarches effectuées, s'agissant notamment des informations répertoriées dans l'instruction de l'administration centrale aux services du 11 mars 2013 ; l'administration devait mentionner les informations obtenues dans le cadre des vérifications de comptabilité des sociétés en nom collectif et des fournisseurs et installateurs, ainsi que l'intégralité des informations obtenues par les différents droits de communication auprès d'Electricité de France (EDF) ; l'administration s'est abstenue de les informer de la possibilité éventuelle de report du bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année au cours de laquelle une demande complète de raccordement au réseau a été déposée et de la limitation du quantum de cette réduction d'impôt en fonction du prix d'acquisition des immobilisations, en méconnaissance du principe de l'égalité devant l'impôt, du respect du contradictoire et du principe de loyauté ;
- la " substitution de motifs " opérée par l'administration postérieurement à la proposition de rectification n'est qu'un procédé visant à permettre l'utilisation des informations relatives au prix de revient des centrales qu'elle s'est abstenue de leur communiquer avant la mise en recouvrement ;
- la réduction d'impôt instituée par les dispositions des articles 199 undecies B du code général des impôts et 95 Q de l'annexe II à ce code est acquise au titre de l'année de souscription au capital social d'une société qui a pour objet un projet d'investissement dans le domaine des énergies renouvelables et non à compter de la date à laquelle la centrale est raccordée au réseau public d'électricité ou de celle à laquelle une demande de raccordement a été faite ou un agrément du Consuel obtenu ; la réduction est acquise au titre de l'année de livraison et d'acquisition des équipements photovoltaïques s'intégrant dans une centrale ; les règles relatives à l'amortissement des immobilisations n'ont pas été respectées ; un panneau photovoltaïque peut fonctionner dès sa livraison ; une distinction doit être faite entre la réalisation d'une centrale photovoltaïque et l'acquisition d'équipements s'intégrant dans une telle centrale ; le schéma locatif mis en place ne prévoit pas d'engagement du locataire à se raccorder au réseau ; en conditionnant le bénéfice d'une réduction d'impôt au raccordement effectif des centrales louées au réseau ERDF, l'administration et les premiers juges ont méconnu l'article 199 undecies B du code général des impôts ;
- il résulte de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009, pour le développement économique des outre-mer, modifiant l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans ses articles 16 et 21, qu'un investissement productif dans le secteur de la production d'énergie renouvelable, est constitué par tout projet d'investissement comportant de manière alternative, soit l'acquisition, soit l'installation, soit l'exploitation d'équipements de production d'énergie ;
- l'administration a précisé l'année au titre de laquelle la réduction d'impôt est pratiquée dans l'instruction référencée 5 B-2-07 du 30 janvier 2007 ; cette instruction ajoute à la loi une condition non prévue par la loi du 22 juillet 2003 et est contraire au code civil ; la date de prise en compte de la réduction d'impôt pour les opérations relevant de l'article 217 undecies du code général des impôts doit être retenue ; elle correspond à la notion d'investissement productif tel que définie par l'instruction 4 H-2-07 ; la loi du 29 décembre 2010 commentée par une instruction 7 S 5-11 du 9 décembre 2011 a admis le bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année de souscription des parts sociales des sociétés agréées c'est-à-dire dès 2010 alors même qu'une mise en production d'énergie interviendrait en 2011 ;
- l'instruction du 12 septembre 2012 publiée au BOI-IS-GEO-10-30-20-20-2012 relative à la déduction au titre des investissements réalisés par les entreprises dans les DOM et autres collectivités françaises d'outre-mer selon laquelle la date de réalisation de l'investissement s'entend de la date à laquelle les fonds sont effectivement versés par le souscripteur ;
- ils se prévalent des énonciations de l'instruction du 12 septembre 2012 publiée au BOI-BIC-RICI 20-30-10-20 n° 140 ;
- les termes de la réponse du ministre de l'économie et des finances n° 18868 publiée le 4 juin 2013 ne leur sont pas opposables dès lors qu'elles ne sont pas conformes à la loi fiscale en ce qu'elles affirment que la réduction d'impôt est attribuée l'année de raccordement de la centrale photovoltaïque au réseau électrique ;
- le rescrit n° 2012/36 du 29 mai 2012 établit que le cycle complet de production n'impliquait pas que la société intervenant dans des projets d'investissement photovoltaïque ait accompli elle-même toutes les activités visées dans l'instruction 7 S 5-11 du 9 décembre 2011 mais seulement certaines d'entre elles ;
- une réponse ministérielle du 24 juin 2014 permet d'établir le caractère fluctuant de la notion d'investissement productif selon les bénéficiaires ;
- l'expertise qu'ils ont diligenté établit que techniquement, un panneau photovoltaïque est productif d'énergie, dès qu'il est livré et installé dans une zone exposée à la lumière solaire, la question du raccordement au réseau public d'électricité étant alors inopérante ;
- à titre subsidiaire, la réduction d'impôt doit leur être accordée au titre de l'année de la demande de raccordement au réseau public d'électricité ; les articles 36 et 98 de la loi du 29 décembre 2010 ne sont pas opposables, sauf à méconnaître le principe d'égalité devant l'impôt ; l'administration ne peut limiter la réduction au regard d'un prix de référence, en l'absence d'arrêté interministériel le prévoyant, sauf à méconnaître les articles 34 et 37 de la Constitution ;
- l'administration n'apporte pas la preuve d'une surfacturation.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. et Mme E...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lescaut,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme E...ont bénéficié, sur le fondement des dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts, d'une réduction d'impôt au titre de l'année 2010 à raison d'investissements réalisés à La Réunion sous la forme de centrales photovoltaïques par les sociétés en nom collectif (SNC) Sunlux 19, Sunlux 20, et Sunlux 21, dont ils sont associés. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause cette réduction d'impôt au motif que les investissements en cause n'avaient pas été réalisés avant le 31 décembre de cette année 2010. M. et Mme E...ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations d'impôts sur le revenu et de contributions sociales résultant de cette rectification. Ils relèvent appel du jugement du 15 novembre 2017 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". S'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure de redressement mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication, afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, elle n'est tenue à cette obligation d'information et de communication qu'en ce qui concerne ceux des renseignements qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements.
3. Il résulte de la proposition de rectification du 2 mai 2013 que l'administration, pour estimer que les investissements en litige ne pouvaient être regardés comme réalisés au titre de l'année 2010, a exercé son droit de communication auprès d'Electricité de France afin d'obtenir des informations sur les dates de dépôt de demandes de raccordement complètes des centrales photovoltaïques acquises par les sociétés dont M. et Mme E...étaient les associés. Et il est constant que ces éléments d'information mentionnés dans la proposition de rectification, qui comportaient l'identité du tiers ayant communiqué à l'administration les renseignements considérés et étaient d'une précision suffisante, ont été portés à la connaissance des contribuables. Les requérants ne sauraient, par ailleurs, utilement se prévaloir de la circonstance qu'une erreur matérielle ait pu, le cas échéant, être commise par EDF quant à la date de la demande de communication, laquelle est sans incidence sur l'obligation à laquelle est tenue le service. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que pour établir les motifs et le montant des rectifications contestées, l'administration aurait eu recours à d'autres éléments ni qu'elle aurait utilisé d'autres documents obtenus de tiers. L'administration n'était ainsi pas tenue de communiquer aux contribuables les documents visés dans l'instruction de l'administration centrale aux services du 11 mars 2013, les propositions de rectification adressées aux sociétés dont M. et Mme E...étaient les associés, les informations obtenues dans le cadre des vérifications de comptabilité des sociétés intervenant dans la réalisation des investissements et l'intégralité des informations obtenues par les différents droits de communication exercés auprès d'EDF concernant d'autres contribuables. Si les requérants soutiennent que l'administration s'est abstenue de les informer de la possibilité éventuelle de report du bénéfice de la réduction d'impôt au titre de l'année au cours de laquelle une demande complète de raccordement au réseau a été déposée et de la limitation du quantum de cette réduction d'impôt en fonction du prix d'acquisition des immobilisations, ces informations n'entrent pas dans le champ des dispositions précitées et ne sont pas de celles sur lesquelles s'est fondée l'administration pour établir le rehaussement en cause au titre de l'année 2010. Par suite, l'administration, qui n'était pas tenue d'indiquer les modalités d'exercice du droit de communication, et qui n'avait pas à communiquer aux contribuables les demandes adressées à EDF, s'est acquittée de ses obligations d'information et de communication au sens des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, tant en ce qui concerne la teneur que l'origine des renseignements utilisés, et n'a pas manqué à son devoir de loyauté.
4. En second lieu, il résulte de l'instruction que le supplément d'impôt mis à la charge de M. et Mme E... au titre de l'année 2010 résulte exclusivement de la remise en cause de la réduction d'impôt sur le revenu prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts dont ils se prévalaient à titre personnel à raison d'investissements productifs réalisés outre-mer. Ce supplément d'impôt ne procédant pas du rehaussement du résultat des sociétés, imposable entre les mains de leurs associés au prorata de leurs parts en application des dispositions de l'article 8 du code général des impôts relatif au régime d'imposition des sociétés de personnes, les requérants ne sauraient utilement reprocher à l'administration de ne pas avoir mentionné dans la proposition de rectification du 2 mai 2013 l'existence des propositions de rectification adressées aux sociétés dans lesquelles ils ont investi. M. et Mme E... ont, par ailleurs, bénéficié d'une procédure de rectification contradictoire au cours de laquelle ils ont été mis en mesure de contester les rectifications proposées par l'administration en apportant tous les éléments justificatifs qui leur paraissaient utiles et n'ont ainsi été privés d'aucune garantie.
5. En troisième et dernier lieu, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction fiscale référencée 13 L-6-06 du 21 septembre 2006, laquelle est relative à la procédure d'imposition.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la réduction d'impôt remise en cause au titre de l'année 2010 :
S'agissant de l'application de la loi fiscale :
6. Aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34 (...) ". Et aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II à ce code, dans sa rédaction alors en vigueur : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée, sous réserve des dispositions de la deuxième phrase du vingtième alinéa du I du même article, au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée (...) ". Aux termes de l'article 95 K de cette même annexe : " Les investissements productifs neufs réalisés dans les départements d'outre-mer (...) qui ouvrent droit à la réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts sont les acquisitions ou créations d'immobilisations corporelles, neuves et amortissables, affectées aux activités relevant des secteurs éligibles en vertu des dispositions du I de cet article ".
7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. Par suite, s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques installées sur les toits des habitations des particuliers et données en location à des sociétés en nom collectif en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et par suite productives de revenus qu'à compter de cette date.
8. Il résulte de l'instruction que les centrales photovoltaïques dans lesquelles avaient investi les SNC dont les requérants étaient associés n'étaient pas raccordées au réseau public d'électricité au 31 décembre 2010. Aucun certificat de conformité n'avait par ailleurs été délivré à cette même date par l'organisme agréé que constitue le Comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité. M. et Mme E... ne sauraient, à cet égard, utilement soutenir que les installations photovoltaïques sont susceptibles de fonctionner de manière autonome ni que la réduction d'impôt serait acquise au titre de l'année de souscription au capital social de la société qui réalise l'investissement ou au titre de l'année d'acquisition et de livraison des équipements destinés à être intégrés dans les centrales photovoltaïques. En se bornant également à se prévaloir de la date d'inscription des immobilisations à l'actif du bilan des sociétés en nom collectif, et de ce qu'un panneau photovoltaïque pourrait fonctionner sans être intégré à une centrale ainsi que des règles relatives à l'amortissement des immobilisations, les requérants n'apportent aucun élément de nature à infirmer le constat de fait sur lequel s'est fondée l'administration pour remettre en cause la réduction d'impôt en litige. Dans ces conditions, et dès lors que les installations photovoltaïques ne pouvaient ni être effectivement exploitées ni être productives de revenus au 31 décembre de l'année 2010, l'administration fiscale, qui n'a pas ajouté aux conditions fixées par la loi fiscale et n'a pas fondé les impositions sur la doctrine exprimée par la réponse ministérielle n° 18868 faite à M. D..., député, le 4 juin 2013, mais s'est bornée à mettre en oeuvre les conditions légales auxquelles les investissements sont soumis pour être regardés comme étant réalisés au sens des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, a pu à bon droit remettre en cause la réduction d'impôt en litige.
S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :
9. Aux termes, d'une part, de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. ".
10. D'autre part, selon le paragraphe n° 148 de l'instruction fiscale BOI 5 B-2-07 du 30 janvier 2007, relatif à l'année au titre de laquelle la réduction d'impôt est pratiquée : " Conformément aux dispositions du vingtième alinéa du I de l'article 199 undecies B, la réduction d'impôt est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Le premier alinéa de l'article 95 Q de l'annexe II prévoit que l'année de réalisation de l'investissement s'entend de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée, c'est-à-dire achevée, par l'entreprise ou lui est livrée au sens de l'article 1604 du code civil, ou est mise à disposition dans le cadre d'un contrat de crédit-bail (...)/ Conformément à cette règle, les immobilisations non achevées au 31 décembre d'une année ne peuvent donner lieu à une réduction d'impôt au titre de cette année alors même que l'entreprise, dans le cadre de laquelle cet investissement est réalisé, en devient propriétaire au fur et à mesure de leur fabrication ". Selon le paragraphe 22 de la même instruction fiscale, relatif aux investissements ouvrant droit à réduction d'impôt : " 22. Conformément aux dispositions du premier alinéa du I de l'article 199 undecies B et de l'article 95 K de l'annexe II, les investissements productifs dont l'acquisition, la création ou la prise en crédit-bail est susceptible d'ouvrir droit à réduction d'impôt doivent avoir la nature d'immobilisations neuves, corporelles et amortissables. La notion même d'investissement productif implique l'acquisition ou la création de moyens d'exploitation, permanents ou durables capables de fonctionner de manière autonome (...) ".
11. En premier lieu, il ne ressort pas des énonciations de cette instruction que l'administration ait entendu donner, en ce qui concerne le fait générateur de la réduction d'impôt, une interprétation du texte fiscal différente de celle qui figure aux points 7 et 8 ci-dessus, qui lui serait opposable sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
12. En deuxième lieu, M. et Mme E... ne sont pas davantage fondés à se prévaloir d'une interprétation de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 dont il n'a pas été fait application, ni des commentaires apportés sur cette nouvelle loi dans une instruction administrative du 9 décembre 2011, publiée sous la référence 7 S-5-11. Leur situation n'entre, par ailleurs, pas dans le champ du rescrit n° 2012/36 du 29 mai 2012.
13. En troisième lieu, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de l'instruction référencée 4 H-2-07 du 30 janvier 2007, applicable à la seule déduction d'impôt ouverte aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés pour les investissements réalisés outre-mer et dans le champ d'application de laquelle ils n'entrent pas. Si M. et Mme E... entendent enfin se prévaloir, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des instructions référencées BOI-BIC-RICI 20-30-10-20 n° 140 et BOI-IS-GEO-10-30-20-20-20-2012 du 12 septembre 2012, ces doctrines ne sont pas invocables dès lors qu'elles portent sur le mécénat ou les réductions d'impôt pour les dons en faveur d'oeuvres d'intérêt général ou d'organismes agréés, sur les dons au profit d'associations, ou encore sur l'application de l'article 217 undecies du code général des impôts. Enfin, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales d'une réponse ministérielle du 24 juin 2014 postérieure aux années en litige.
En ce qui concerne la réduction d'impôt applicable au titre des années 2011 et 2012 :
14. Aux termes du dix-septième alinéa de l'article 199 undecies B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'investissement litigieux : " La réduction d'impôt est de 50 % du montant, hors taxes et hors frais de toute nature, notamment les commissions d'acquisition, à l'exception des frais de transport, d'installation et de mise en service amortissables, des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique. Les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. (...) Ces taux sont majorés de dix points pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d'énergie renouvelable ".
15. L'administration a admis dans le cadre de sa décision du 4 décembre 2014 le principe de la réduction d'impôt afférente aux investissements réalisés par l'intermédiaire des SNC Sunlux 19, Sunlux 20, et Sunlux 21, au titre de l'année 2011, mais en a limité le montant à hauteur d'un prix de revient des centrales photovoltaïques qu'elle a fixé en prenant en compte un prix d'acquisition considéré comme normal.
16. Le montant des investissements productifs à prendre en compte pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier un associé d'une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 du code général des impôts ou d'un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C du même code est, en principe, calculé à partir de la valeur pour laquelle l'immobilisation en cause est inscrite au bilan de cette société en application de l'article 38 quinquies de l'annexe III à ce code. Toutefois, l'administration peut apporter la preuve que cette valeur est surévaluée par rapport au prix normal du marché. Dans ce cas, elle peut se fonder sur la valeur de l'immobilisation rectifiée, non seulement pour remettre en cause la déductibilité du montant des amortissements pratiqués par la société qui en est propriétaire, mais aussi pour calculer la réduction d'impôt dont peut bénéficier l'associé de la société en application de l'article 199 undecies B du code général des impôts.
17. D'une part, la faculté pour le pouvoir réglementaire, en vertu d'une habilitation législative, de plafonner par voie d'arrêté le prix de revient des investissements productifs servant de base à cette réduction d'impôt ne fait pas obstacle à la possibilité pour les services d'assiette de rectifier au besoin la valeur des investissements en tant qu'elle détermine l'importance de l'avantage fiscal dès lors qu'elle apparaît excessive au regard du prix habituel de marché des mêmes biens. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que seul le pouvoir règlementaire pouvait limiter la base de la réduction d'impôt doit être écarté. La circonstance que les requérants, qui ne sont pas recevables à contester la constitutionnalité de dispositions législatives en dehors de la procédure de question prioritaire de constitutionnalité, auraient, au cours de l'année 2011, déposé des demandes complètes de raccordement, est sans incidence sur le régime applicable.
18. D'autre part, l'administration, après avoir exercé son droit de communication auprès des autres fournisseurs d'installations comparables commercialisées dans le département de La Réunion, a constaté que le prix moyen pratiqué par watt-crête pour des centrales de gammes et de puissance comparables, commercialisées dans le département, s'élevait en moyenne, pour l'année en litige, à 4,54 euros hors taxes, montant nettement inférieur à ceux retenus pour le calcul des investissements réalisés par les SNC dont M. et Mme E...étaient associés. L'administration a, en conséquence, estimé que le prix de revient des centrales photovoltaïques servant de calcul aux amortissements déductibles ne pouvait excéder le prix total de 54 480 euros pour une centrale d'une puissance de 12 000 Wc et a, par suite, procédé aux rectifications correspondantes des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu en fonction du pourcentage de participation des requérants au sein des sociétés considérées.
19. En se bornant à soutenir que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la surévaluation du prix facturé, et en ne produisant aucun élément permettant d'expliquer cette différence de prix, M. et Mme E... ne critiquent pas sérieusement les termes de comparaison retenus par le service qui lui ont permis de constater l'existence d'une surévaluation du prix d'achat des centrales en cause. S'ils se prévalent des conditions contractuelles de l'offre de la société SFER, en particulier du surcoût lié à la garantie de vingt ans du matériel et à un crédit fournisseur de vingt ans, ils ne produisent aucun élément probant permettant d'en justifier. Dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a limité les droits à réduction d'impôt auxquels pouvaient prétendre les requérants à hauteur du prix de revient des centrales photovoltaïques admis par le service pour le calcul des amortissements déductibles des sociétés concernées.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Leurs conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...E...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et du département de Paris, pôle fiscal parisien 1.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Lescaut, premier conseiller,
- M. Doré, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 janvier 2019.
Le rapporteur,
C. LESCAUTLe président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
C. RENÉ-MINE
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00181