Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er juillet 2017 et 10 juillet 2018, la société Parking Le relais de Ponthieu, représentée par la SELARL A...et Macagno, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 10 mai 2017 ;
2°) à titre principal de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 2 768 000 euros en réparation des préjudices allégués résultant d'une carence de la ville dans l'utilisation de ses pouvoirs de police, avec intérêts courant à compter de la date d'introduction de la demande devant le tribunal et capitalisation des intérêts ;
3°) à titre subsidiaire de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 1 216 450 euros en réparation des préjudices allégués ;
4°) de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 3 000 euros à verser à la requérante en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le maire à qui il appartient de prendre les mesures destinées à assurer la circulation à l'intérieur de l'agglomération n'a pas pris les mesures suffisantes pour empêcher un stationnement désordonné à proximité immédiate de la sortie du parking qu'elle exploite, les mesures prises telles que l'installation d'un panneau " parking", d'un panneau d'interdiction de stationnement, la mise en place de potelets anti-stationnements le long du trottoir ou la création d'une aire de livraison ont été dépourvues d'efficacité ;
- l'absence de mise en oeuvre de mesures supplémentaires constitue une faute de la part de la ville de Paris de nature à engager sa responsabilité ;
- cette faute lui a occasionné un préjudice résultant de la perte de chances de réaliser des bénéfices d'exploitation supplémentaires ; elle doit se voir indemniser pour le préjudice économique subi de ce fait ainsi que pour le préjudice moral qui en résulte.
Par un mémoire en défense enregistré le 14 juin 2018, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard Froger, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de la société Parking Le relais de Ponthieu une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 18 juin 2018 la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Labetoulle,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de MeA..., pour la société parking Le Relais de Ponthieu,
- et les observations de MeB..., pour la ville de Paris.
Une note en délibéré, enregistrée le 28 novembre 2018, a été présentée par MeA..., pour la société parking Le Relais de Ponthieu.
1. Considérant que la société parking Le Relais de Ponthieu exploite depuis le 1er mai 1995 un parking situé 25 rue de Ponthieu à Paris (75008) ; qu'elle a, par courrier du 7 novembre 2014, alerté la ville de Paris des difficultés qu'elle rencontrait dans l'exploitation de son activité du fait du stationnement anarchique dans la rue de Ponthieu et l'a mise en demeure de faire usage de ses pouvoirs de police ; que par courrier du 20 janvier 2015, le maire de Paris a indiqué qu'il avait pris les mesures nécessaires pour faire cesser cette situation en installant un panneau " P " et en créant à proximité du parking une zone de livraison supplémentaire au 34 rue de Ponthieu ; que la société requérante a néanmoins, par courrier du 31 mars 2015, adressé au maire de Paris une demande indemnitaire préalable tendant à la réparation des préjudices qu'elle allègue avoir subis du fait des problèmes de stationnement aux abords du parking qu'elle exploite ; que la ville ayant rejeté cette demande le 22 mai 2015, elle a sollicité du Tribunal administratif de Paris l'indemnisation des préjudices matériel et moral qu'elle aurait subis ; que le tribunal a rejeté cette demande par jugement du 10 mai 2017 dont elle interjette appel ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa version applicable au litige : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations " ; que selon l'article L. 2213-2 du même code : " Le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement : (...) 2° Réglementer l'arrêt et le stationnement des véhicules ou de certaines catégories d'entre eux, ainsi que la desserte des immeubles riverains (...) " ; qu' aux termes de l'article R. 417-10 du code de la route : " I. - Tout véhicule à l'arrêt ou en stationnement doit être placé de manière à gêner le moins possible la circulation. / II. - Est considéré comme gênant la circulation publique l'arrêt ou le stationnement d'un véhicule : 1° Sur les trottoirs, les passages ou accotements réservés à la circulation des piétons (...) " ;
3. Considérant que si la requérante entend invoquer une carence fautive de la ville dans l'exercice de ses pouvoirs de police, il est constant qu'à la suite de la demande présentée par la société requérante en 2015, le maire de Paris a pris diverses mesures tant pour rendre le parking exploité par la requérante plus visible en installant à son entrée un panneau d'affichage renforcé par la mise en place d'un panneau " P " en janvier 2015, et en prévoyant un abaissement du trottoir et un quadrillage du revêtement, que pour remédier à l'encombrement de la rue et au stationnement illicite aux abords de ce parking en interdisant le stationnement du côté des numéros impairs, donc du côté du parking, en matérialisant cette interdiction par l'installation d'un panneau d'interdiction de stationner " B6a1 " et d'un panneau " M6a " de mise en fourrière, qui indique que le stationnement ou l'arrêt est gênant au sens de l'article R. 471-10 du code de la route précité, et en créant en février 2015 une zone de livraison supplémentaire au 34 rue de Ponthieu afin de faciliter les chargements et déchargements ; qu'enfin ont été mis en place en janvier 2015 des potelets anti-stationnement le long du trottoir, pour empêcher matériellement l'arrêt des voitures sur le trottoir, ainsi que le long de l'entrée du parking pour en faciliter l'accès ; que si la requérante rappelle qu'elle avait demandé la mise en place d'autres mesures, il ne résulte pas de l'instruction, et elle ne soutient d'ailleurs plus sérieusement en appel que de telles mesures auraient été susceptibles d'être plus efficaces que celles prises par la ville pour mettre fin aux stationnements gênants ; qu'il n'est d'ailleurs pas établi que les mesures prises n'auraient pas permis d'améliorer la situation du stationnement aux abords du parking ; qu'en effet si les attestations de clients et les constats d'huissier en date des 29 juin 2015, 10 décembre 2015, 24 mars 2016 et 17 novembre 2016, produits par la requérante, font état de difficultés de circulation dans cette rue commerçante, proche des champs Elysées, empruntée par des véhicules de livraisons et étroite, il ne résulte pas de l'instruction que les difficultés d'accès au parking soient imputables à l'insuffisance des mesures mises en oeuvre par la ville de Paris, en matière d'aménagement urbain ou de répression des infractions ; qu'au demeurant, la société requérante n'établit pas l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre la faute alléguée et le préjudice réclamé, dans la mesure où si le document comptable retraçant l'évolution de son chiffre d'affaires depuis 2008 fait apparaitre certaines fluctuations, il en résulte qu'il n'a jamais été aussi élevé, en ce qui concerne les prestations de parkings proprement dites, qu'en 2015 et 2016, soit à partir de la mise en place des mesures prises par la ville de Paris ; que dans ces conditions, la société requérante ne démontre pas l'existence d'une carence fautive de la ville de Paris dans l'exercice de ses pouvoirs de police susceptible d'engager sa responsabilité à son égard ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Parking Le relais de Ponthieu n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que sa requête ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
5. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la ville de Paris, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par la société Parking Le relais de Ponthieu au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
6. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la société Parking Le relais de Ponthieu une somme de 1 500 euros à verser à la ville de Paris sur le même fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Parking Le relais de Ponthieu est rejetée.
Article 2 : La société Parking Le relais de Ponthieu versera à la ville de Paris une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parking Le relais de Ponthieu et à la ville de Paris.
Délibéré après l'audience du 27 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Labetoulle, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.
Le rapporteur,
M-I. LABETOULLELe président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
P. TISSERAND
La République mande et ordonne au préfet de la région île de France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02206