Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2017, M.A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du préfet du Val-de-Marne du 8 février 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de lui délivrer l'autorisation de travail sollicitée et, à défaut, dans ce même délai et sous la même astreinte, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A...soutient que :
- la décision contestée est entachée d'incompétence ;
- le préfet du Val-de-Marne, en ne mettant pas en oeuvre les dispositions de l'article 2 du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001, a entaché sa décision d'un vice de procédure ;
- le préfet du Val-de-Marne, en traitant sa demande présentée le 27 janvier 2017 non comme une nouvelle demande d'autorisation de travail mais comme un simple recours gracieux, a commis une erreur de droit ;
- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation dans l'application du 1° de l'article L. 313-10 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Boissy,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que M.A..., de nationalité malgache, titulaire d'une carte de séjour portant la mention " étudiant " valable du 29 octobre 2015 au 28 octobre 2016, a présenté, le 12 août 2016, une demande de carte de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puis, le 24 octobre suivant, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du même code ; que, par une décision du 2 décembre 2016, le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance de l'autorisation de travail sollicitée ; que le courrier du 27 janvier 2017 que l'intéressé a ensuite présenté a été analysé par le préfet du Val-de-Marne comme un recours gracieux et rejeté par une décision du 8 février 2017 ; que M. A... relève appel du jugement du 28 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 8 février 2017 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 410-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Pour l'application du présent titre, on entend par : / 1° Recours administratif : la réclamation adressée à l'administration en vue de régler un différend né d'une décision administrative ; / 2° Recours gracieux : le recours administratif adressé à l'administration qui a pris la décision contestée (...) " ;
3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. A..., le 2 décembre 2016, l'autorisation de travail qu'il avait d'abord sollicitée, pour un emploi à temps partiel au sein de l'entreprise Malia, rémunéré 1 027,94 euros bruts mensuels, le préfet du Val-de-Marne a notamment estimé que la rémunération proposée était inférieure au SMIC et ne remplissait pas les conditions posées par le 6° de l'article R. 5221-20 du code du travail ; qu'à la suite de ce refus, l'intéressé a présenté, le 27 janvier 2017, une demande d'autorisation de travail dans laquelle le poste proposé à M. A...était un poste à temps complet rémunéré 1 800,22 euros bruts mensuels ; que cette demande, par son contenu et ses termes mêmes, n'avait pas le caractère d'un recours gracieux, au sens de l'article L. 410-1 du code des relations entre le public et l'administration, mais celui d'une nouvelle demande ; que, d'autre part, il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet du Val-de-Marne n'a pas traité cette demande comme une nouvelle demande d'autorisation de travail mais l'a analysée comme un simple recours gracieux ; que le préfet n'a ainsi pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... et a dès lors entaché cette décision d'illégalité ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 février 2017 en litige et à demander l'annulation de ce jugement et de cette décision ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 de ce code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;
6. Considérant que si, compte tenu du motif retenu pour annuler la décision en litige, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet du Val-de-Marne délivre à M. A... l'autorisation de travail sollicitée, elle implique en revanche nécessairement qu'il procède au réexamen de sa demande ; que, dès lors, il y a lieu d'ordonner au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la demande d'autorisation de travail présentée par l'intéressé le 27 janvier 2017 dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a en revanche pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances particulières de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais que M. A... a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1701830 du tribunal administratif de Melun en date du 28 juin 2017 est annulé.
Article 2 : La décision du préfet du Val-de-Marne en date du 8 février 2017 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la demande d'autorisation de travail présentée par M. A...le 27 janvier 2017 dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre du travail.
Copie en sera transmise au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 23 mars 2018 à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- M. Auvray, président assesseur,
- M. Boissy, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 avril 2018.
Le rapporteur,
L. BOISSYLe président,
M. HEERSLe greffier,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre du travail en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 17PA02439 5