Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 décembre 2019 et le 23 juillet 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1916119/1-2 du 26 novembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 juin 2019 du préfet de police ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de dix jours à compter de la notification du présent arrêt, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire est entachée d'illégalité par exception d'illégalité de la décision de refus de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 17 mars 1970, est entré en France le 25 juillet 2007 selon ses déclarations. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juin 2019, le préfet de police lui a refusé un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. A... fait appel du jugement du 26 novembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. La décision contestée vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'ensemble des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs à sa situation, notamment l'article L. 313-14. Elle rappelle le réexamen de sa situation, fait sur injonction du jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 novembre 2018, précise que M. A... n'accompagne pas sa demande d'un contrat de travail, et que quand bien même il l'aurait fait, cette circonstance ne constitue pas un motif exceptionnel et enfin indique ne pas porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ne pas l'exposer à des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée.
4. En deuxième lieu, il ressort des termes même de la décision, qui n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments dont se prévalait l'intéressé, que le préfet de police a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A... avant d'édicter les décisions dont la légalité est contestée. Par suite, le moyen tiré d'un défaut d'examen de sa situation personnelle doit être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".
6. Il résulte des dispositions précitées que l'article L. 313-14 permet la délivrance de deux titres de séjour de nature différente que sont, d'une part, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, d'autre part, la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". En présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner tout élément de situation professionnelle et personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande.
7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est arrivé en France le 25 juillet 2007, selon ses déclarations, et que l'ancienneté de son séjour depuis cette année doit être regardée comme établie. S'il fait valoir qu'il travaille en qualité d'employé de ménage depuis 2007, il n'en justifie aucunement en se bornant à produire trois bulletins de paie relatifs aux mois de septembre à novembre 2010, et un contrat de travail pour une entreprise de propreté, datant de mars 2008, assorti d'une déclaration d'embauche à l'URSSAF. S'il invoque également des activités associatives et des liens très importants tissés en France, notamment avec ses deux cousins de nationalité française, ces éléments, appréciés au regard de la durée de sa résidence habituelle en France, sont insuffisants et ne peuvent à eux seuls être regardés comme des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour. En outre, M. A... n'a joint à sa demande de titre de séjour ni contrat de travail ni promesse d'embauche. La circonstance que la commission du titre de séjour a émis un avis favorable est à cet égard sans incidence, dès lors que cet avis ne lie pas l'administration. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Si M. A... soutient que, compte tenu de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français, la décision querellée porte atteinte à sa vie privée et familiale, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans charge de famille et ne justifie pas d'une intégration personnelle et professionnelle particulière en France, la circonstance que deux de ses cousins soient présents sur le territoire ne suffisant pas à y caractériser sa vie privée et familiale. Il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que M. A... serait dépourvu de toute attache au Sénégal, pays où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de trente-sept ans. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par rapport aux buts poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
10. Enfin, pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas plus fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire prise à son encontre serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui lui a été opposée.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions de M. A... à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er: La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Hamon, président,
- M. C..., premier conseiller,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2020.
Le rapporteur,
A. C...Le président,
P. HAMON
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA04052 2