Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 4 janvier 2019, M.C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. C... de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 6.7 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il ne peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié en Algérie, en raison notamment des pénuries de stock de médicaments dont il a besoin dans les pharmacies algériennes ;
- le préfet de police s'est cru lié par l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les stipulations de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il justifie résider en France de manière continue depuis plus de dix ans ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 avril 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Mantz.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 28 janvier 1959, entré en France le 22 décembre 1993 selon ses déclarations, a été mis en possession d'un titre de séjour pour soins, valable du 1er décembre 2014 au 1er août 2015, régulièrement renouvelé et valable en dernier lieu jusqu'au 29 août 2017. Il en a demandé le renouvellement le 16 novembre 2017. Par un arrêté en date du 20 août 2018, le préfet de police de Paris a refusé à M. C... le renouvellement de ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de renvoi. Monsieur C...relève appel du jugement du 6 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an pourtant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1° au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) 7° au ressortissant algérien, résident habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'un exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".
3. En premier lieu, il ressort des certificats médicaux établis par le docteurB..., maître de conférence des universités-praticien hospitalier, notamment ceux des 12 février 2014, 14 août 2014 et, en dernier lieu, du 6 juin 2016, que M. C... présente un asthme sévère avec trouble ventilatoire obstructif, nécessitant un traitement par anticorps anti-IgE et un suivi spécialisé régulier. Ces certificats mentionnent en outre que " le traitement lourd tel qu'il est nécessaire actuellement ne pourrait être poursuivi dans le pays d'origine ". Toutefois, ces certificats, rédigés en termes peu circonstanciés s'agissant de l'impossibilité alléguée pour M. C... de recevoir des soins adaptés à la pathologie dont il est atteint en Algérie, pas plus que les documents généraux produits, issus de sources informatiques non vérifiées, faisant état d'une pénurie de médicaments contre l'asthme ou de certains traitements pour enfants asthmatiques dans les pharmacies algériennes, ne sont de nature à remettre en cause les termes de l'avis émis le 22 avril 2018 par le collège des médecins de l'OFII selon lequel l'intéressé peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans ce pays. La teneur de cet avis, par lequel le préfet de police ne s'est pas estimé lié, est en outre corroborée par les pièces produites par celui-ci en première instance, mentionnant l'existence de neuf cabinets de pneumologie à Alger, ville d'origine du requérant, ainsi que de plusieurs centres de prélèvements rattachés à l'institut d'analyses médicales Pasteur. Le référentiel algérien des médicaments, également produit, atteste en outre de la disponibilité en Algérie des médicaments Xolair, contenant l'anticorps anti-IgE, Zithromax, Singulair et Ventoline. La disponibilité de Symbicort 400, Nasonex, Bricanyl et Cortancyl n'est en outre pas contestée. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police a pu, sans méconnaître les stipulations précitées ni entacher sa décision d'erreur d'appréciation, estimer que l'état de santé de M. C... n'impose pas son maintien sur le territoire français dès lors qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers l'Algérie. Par suite, le refus de titre de séjour contesté ne méconnait pas les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien.
4. En second lieu, M. C... reprend en appel, à l'identique, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien modifié. Le requérant n'apportant pas d'élément de nature à remettre en cause l'appréciation motivée qui a été portée à bon droit par les premiers juges, il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs par le tribunal administratif, au point 5 du jugement attaqué.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
5. En premier lieu, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour. Lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement.
6. M. C... invoque les stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 aux termes desquelles : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1. Au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ", dès lors qu'il soutient résider en France de manière continue depuis plus de dix ans. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant ne produit aucune pièce pour la période située entre le 10 juillet 2008, date d'une ordonnance du docteurA..., avoisinant celle du début de la période de dix ans antérieure à la décision attaquée, prévue par les stipulations susvisées de l'article 6.1 de l'accord franco-algérien modifié, et le 25 juillet 2009, date de l'attestation, émanant du consul d'Algérie, du dépôt d'une demande de passeport par l'intéressé. L'absence de toute pièce durant cette période de plus d'un an, à supposer même probante l'ordonnance précitée, est de nature à faire obstacle à l'établissement du caractère habituel de la résidence en France de l'intéressé au titre de cette période. Ainsi, faute pour le requérant de justifier d'une résidence en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté, le moyen tiré de la méconnaissance desdites stipulations ne peut qu'être écarté.
7. M. C... ne peut utilement soulever le moyen tiré de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, qui ne fixe par elle-même aucun pays de destination.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. Le moyen de la requête tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être regardé comme dirigé en réalité également contre la décision fixant l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement.
9. Si M. C... soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains et dégradants au regard du défaut de prise en charge de sa pathologie en Algérie, il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans ce pays. Il s'ensuit que le moyen doit, en tout état de cause, être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera délivrée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 7 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, président de chambre,
- Mme Julliard, présidente-assesseure,
- M. Mantz, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 juin 2019.
Le rapporteur,
P. MANTZ
Le président,
M. HEERS,
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA00028 5