Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 20PA03248 le 5 novembre 2020, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2 à 4 du jugement n° 2014426/8 du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que le premier juge s'est fondé sur une méconnaissance des dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 pour annuler son arrêté dès lors qu'il ressort des pièces produites en première instance que M. B... s'est vu remettre la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne, quel pays sera responsable de ma demande d'asile ' " et la brochure B intitulée " Je suis sous procédure Dublin, qu'est-ce que cela signifie ' ", dont les premières pages ont été signées par l'intéressé ; ces brochures ont été éditées en langue pachtou, langue dont M. B... a déclaré qu'il la comprenait ; par suite, il ne saurait être regardé comme ayant été privé d'une garantie et l'arrêté en litige n'est pas entaché d'un vice de procédure ;
- les autres moyens soulevés par M. B... en première instance ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 20PA03286 le 9 novembre 2020, le préfet de police demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 2014426/8 du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris.
Il soutient que les conditions fixées par l'article R. 811-15 du code de justice administrative sont en l'espèce remplies.
La requête a été communiquée à M. B... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du
26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du
26 juin 2013 ;
- le règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 de la Commission, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;
- la directive n° 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... B..., ressortissant afghan, a présenté le 28 juillet 2020 une demande de protection internationale. La consultation du système " Eurodac " ayant fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées le 4 mars 2019 par la Belgique, le préfet de police a saisi le 29 juillet 2020 les autorités de ce pays d'une demande de reprise en charge sur le fondement de l'article 18 1 d) du règlement (UE) n° 604/2013. Par un accord explicite du 11 août 2020, les autorités belges ont accepté leur responsabilité. Par un arrêté du
9 septembre 2020, le préfet de police a ordonné le transfert de l'intéressé aux autorités belges. Le préfet de police relève appel du jugement du 8 octobre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de
M. B..., cet arrêté et demande, en outre, à la Cour d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.
2. Les requêtes susvisées n° 20PA03248 et n° 20PA03286, présentées par le préfet de police tendent respectivement à l'annulation et au sursis à l'exécution du même jugement du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
3. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier de premier instance transmis à la Cour par le tribunal administratif de Paris que M. B... s'est vu remettre contre signature, le 28 juillet 2020, l'ensemble des informations nécessaires au suivi de sa demande d'asile et à l'engagement de la procédure de transfert, et tout particulièrement, la brochure d'information sur le règlement " Dublin III " contenant une information générale sur la demande d'asile et le relevé d'empreintes (brochure A) et le guide du demandeur d'asile en France, ainsi que la brochure d'information pour les demandeurs d'asile dans le cadre de la procédure " Dublin III " (brochure B) et la brochure d'information, rédigée par la Commission nationale de l'informatique et des libertés, relative à la base de données " Eurodac ", rédigés en langue pachtou, langue que l'intéressé a déclaré comprendre et parler. Il ressort des pièces du dossier que ces brochures, dont M. B... a signé la première page sans émettre aucune réserve, lui ont été remises dans leur intégralité ainsi que cela ressort des mentions apposées sur chacune d'elles. Si M. B... a soutenu devant le tribunal qu'il n'aurait pas reçu les éléments d'information requis par les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et qu'il ne sait pas lire sa langue maternelle, il ressort des pièces du dossier que lors de l'entretien individuel réalisé en langue patchou, il a confirmé comprendre les termes de cet entretien et n'a émis aucune réserve quant à la compréhension du patcho ou un éventuel illettrisme, ni lors de la remise des brochures dans cette langue. Par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a annulé l'arrêté du 9 septembre 2020 au motif qu'il méconnaissait les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.
5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal :
6. En premier lieu, par un arrêté n° 2020-00508 du 16 juin 2020 régulièrement publié le 23 juin 2020 au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris, le préfet de police a donné délégation à Mme D... A..., attachée principale d'administration de l'Etat, signataire de l'arrêté en litige, pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers et par suite les décisions de transfert. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 9 septembre 2020 doit être écarté.
7. En deuxième lieu, en application de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de transfert dont fait l'objet un ressortissant de pays tiers ou un apatride qui a déposé auprès des autorités françaises une demande d'asile dont l'examen relève d'un autre Etat membre ayant accepté de le prendre ou de le reprendre en charge doit être motivée, c'est-à-dire qu'elle doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement.
8. Selon l'avis n° 420900 du 7 décembre 2018 du Conseil d'Etat, lorsqu'une personne a antérieurement présenté une demande d'asile sur le territoire d'un autre Etat membre, elle peut être transférée vers cet Etat, à qui il incombe de la reprendre en charge, sur le fondement des b), c) et d) du paragraphe 1 de l'article 18 du chapitre V et du paragraphe 5 de l'article 20 du chapitre VI du règlement (UE) n° 604/2013. Cet avis expose en outre qu'est suffisamment motivée, au sens des dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision de transfert qui mentionne le règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et comprend l'indication des éléments de fait sur lesquels l'autorité administrative se fonde pour estimer que l'examen de la demande présentée devant elle relève de la responsabilité d'un autre Etat membre, une telle motivation permettant d'identifier le critère du règlement communautaire dont il est fait application. L'avis précise à titre d'exemple que, s'agissant d'un étranger ayant, dans les conditions posées par le règlement, présenté une demande d'asile dans un autre Etat membre et devant, en conséquence, faire l'objet d'une reprise en charge par cet Etat, doit être regardée comme suffisamment motivée la décision de transfert qui, après avoir visé le règlement, relève que le demandeur a antérieurement présenté une demande dans l'Etat en cause, une telle motivation faisant apparaître qu'il est fait application du b), c) ou d) du paragraphe 1 de l'article 18 ou du paragraphe 5 de l'article 20 du règlement.
9. La décision de transfert en litige vise, notamment, le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique que M. B..., de nationalité afghane, a demandé l'asile en France le 28 juillet 2020, que la comparaison de ses empreintes digitales au moyen du système " Eurodac " a révélé qu'il avait sollicité l'asile auprès des autorités belges le
4 mars 2019 et que les autorités belges doivent être regardées comme responsables de sa demande d'asile, précise que ces autorités ont été saisies le 29 juillet 2020 d'une demande de reprise en charge de l'intéressé en application de l'article 18-1-b du règlement (UE) n° 604/2013 et ont fait connaître leur accord le 11 août 2020 sur le fondement de l'article
18-1-d de ce règlement. Ainsi la décision expose, de façon suffisamment précise, les considérations de droit et de fait qui ont conduit le préfet de police à estimer, sur le fondement des dispositions de l'article 18-1-d du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, que la Belgique est responsable de l'examen de la demande d'asile de M. B.... Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision contestée ne satisferait pas à l'exigence de motivation posée à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
10. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a procédé à l'examen particulier de la situation de M. B....
11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) . 3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. ". Aux termes de l'article 35 du même règlement : " 3. Les autorités visées au paragraphe 1 reçoivent la formation nécessaire en ce qui concerne l'application du présent règlement ". Enfin, aux termes des dispositions de l'article 4 de la directive " procédure " n° 2013/32/UE : " 4. Lorsqu'une autorité est désignée conformément au paragraphe 2, les États membres veillent à ce que le personnel de cette autorité dispose des connaissances appropriées ou reçoive la formation nécessaire pour remplir ses obligations lors de la mise en oeuvre de la présente directive ".
12. La conduite de l'entretien par une personne qualifiée en vertu du droit national constitue, pour le demandeur d'asile, une garantie. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du compte-rendu de cet entretien, que M. B... a bénéficié d'un tel entretien le 28 juillet 2020 dans les locaux de la préfecture de police et que cet entretien a été réalisé en présence d'un interprète en langue patchou, langue que l'intéressé a déclaré comprendre, comme il a déjà été dit. M. B... a ainsi eu la possibilité de faire part de toute information pertinente relative à la détermination de l'Etat responsable. Par ailleurs, M. B... ne fait état devant la Cour d'aucun élément laissant supposer que cet entretien ne se serait pas déroulé dans les conditions garantissant la confidentialité, prévues par les dispositions précitées de l'article 5 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. En outre, si le résumé de l'entretien individuel, dont l'intéressé a eu connaissance comme l'atteste l'apposition de sa signature, ne mentionne pas le nom et la qualité de l'agent qui a conduit l'entretien, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été reçu par un agent du 12ème bureau de la direction de la police générale en charge de l'asile à la préfecture de police. Dès lors que l'entretien de M. B... a été mené par une personne qualifiée au sens du 5 de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013, l'absence d'indication de l'identité de l'agent ayant conduit l'entretien est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie dès lors qu'elle n'a pas privé M. B... de la garantie tenant au bénéfice de cet entretien et à la possibilité de faire valoir toutes observations utiles et, en l'espèce, n'a pas été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision prise. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions des articles 5 et 35 du règlement (UE) n° 604/2013 et de l'article 4 de la directive " procédure " n° 2013/32/UE du 26 juin 2013 doit être écarté.
13. En cinquième lieu, il résulte des dispositions de l'article 23 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride que, lorsque l'autorité administrative saisie d'une demande de protection internationale estime, au vu de la consultation du fichier Eurodac prévue par le règlement (UE) n° 603/2013 relatif à la création d'Eurodac, que l'examen de cette demande ne relève pas de la France, il lui appartient de saisir le ou les Etats qu'elle estime responsable de cet examen dans un délai maximum de deux mois à compter de la réception du résultat de cette consultation. À défaut de saisine dans ce délai, la France devient responsable de cette demande. Selon l'article 25 du même règlement, l'Etat requis dispose, dans cette hypothèse, d'un délai de deux semaines au-delà duquel, à défaut de réponse explicite à la saisine, il est réputé avoir accepté la reprise en charge du demandeur.
14. Le préfet de police a versé au dossier l'accusé de réception, émis par le point d'accès des autorités belges le 29 juillet 2020, de la demande de reprise en charge de la demande d'asile de M. B.... Ainsi, le préfet de police justifie avoir saisi les autorités belges dans le délai imparti. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 23 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et des articles 15, 18 et 19 du règlement (CE) n° 1560/2003 du 2 septembre 2003 doit être écarté. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que, par un accord explicite du 11 août 2020, les autorités belges ont accepté leur responsabilité.
15. En sixième lieu, M. B... soutient que l'arrêté en litige serait dépourvu de base légale dès lors que le préfet de police ne pouvait saisir les autorités belges sur le fondement des dispositions du b) de l'article 18-1 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, ces autorités ayant déjà rejeté sa demande d'asile ainsi qu'il le faisait valoir lors de son entretien. Cependant, il ressort des motifs de l'arrêté que le préfet de police a fondé la décision de transfert en litige sur les dispositions de l'article 18-1-d du règlement n° 604/2013, ainsi qu'il a été dit au point 11. Par suite, le moyen tiré du défaut de base légale doit être écarté comme manquant en fait.
16. En septième lieu, si M. B... soutient qu'il a pénétré dans l'Union européenne en entrant par la Grèce, aucun élément au dossier, en particulier issu du système " Eurodac " n'étaye les déclarations de l'intéressé quant à son passage par la Grèce. Par suite, en tout état de cause, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait entaché d'illégalité l'arrêté en litige en estimant que les autorités belges étaient responsables de sa demande sur le fondement de l'article 18-1-d du règlement n° 604/2013 et leur a adressées une demande de reprise en charge
17. En huitième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 susvisé du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Enfin, aux termes de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
18. Si M. B... entend soutenir qu'en cas de transfert vers la Belgique, il serait exposé à un risque de subir des traitements inhumains ou dégradants dès lors que les autorités belges ont rejeté sa première demande d'asile et qu'il sera renvoyé en Afghanistan, l'arrêté en litige a seulement pour objet de renvoyer l'intéressé en Belgique et non dans son pays d'origine. Or la Belgique, Etat membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En outre, M. B... ne justifie pas de raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Belgique dans la procédure d'asile, et n'établit pas que l'examen de sa demande d'asile par les autorités de cet Etat ne satisferait pas à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. Et, à supposer que le rejet de sa demande d'asile par les autorités belges ait été définitif, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autorités belges n'évalueront pas, avant de procéder à un éventuel éloignement de l'intéressé, les risques auxquels il serait exposé en cas de retour en Afghanistan. Par suite, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard du pouvoir qui lui est conféré par les dispositions précitées de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013.
19. En neuvième et dernier lieu, M. B... n'assortit pas le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige méconnaîtrait les stipulations de la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés de précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.
20. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 9 septembre 2020 décidant la remise aux autorités belges de M. B..., lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. B... et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et à demander en conséquence l'annulation de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution du jugement :
21. La Cour se prononçant, par le présent arrêt, sur la requête n° 20PA03248 du préfet de police tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris du
8 octobre 2020, il n'y a plus lieu de statuer sur la requête n° 20PA03286 par laquelle le préfet de police sollicitait de la Cour le sursis à exécution de ce jugement.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20PA03286 du préfet de police.
Article 2 : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2014426/8 du 8 octobre 2020 du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 3 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2021.
La présidente de la 8ème chambre,
H. VINOT La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°s 20PA03248, 20PA03286