Par une requête et un mémoire de production de pièces, enregistrés le 3 juillet et le 31 août 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1410664 du 10 juin 2015 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2014 du préfet de Seine-et-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il remplit les conditions fixées par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il remplit les conditions fixées par les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée le 10 août 2015 au préfet de Seine-et-Marne qui n'a produit aucun mémoire en défense.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Bonneau-Mathelot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., de nationalité marocaine, a sollicité du préfet de Seine-et-Marne le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de français. A cette occasion, il a produit des bulletins de salaires qui ont conduit, par ailleurs, le préfet à examiner sa demande au titre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 novembre 2014, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour en l'assortissant d'une obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et en fixant le pays à destination duquel il serait renvoyé à l'expiration de ce délai. M. A...relève appel du jugement du 10 juin 2015 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 9 de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / [...] ". Aux termes de l'article 3 dudit accord : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / [...] ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / [...] ".
3. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant qu'il porte sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation de la situation d'un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.
4. Il résulte de ce qui précède que le Tribunal administratif de Melun ne pouvait, pas plus que le préfet de Seine-et-Marne, examiner la demande de M. A...puis la rejeter en s'abstenant de substituer à cette base légale erronée celle tirée du pouvoir, dont dispose ce dernier, de régulariser ou non la situation d'un étranger dès lors que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir général de régularisation que lorsqu'elle examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Dans ces conditions, la décision attaquée, prise à tort sur le fondement de l'article L. 313-14 et motivée par la circonstance que M. A...ne pouvait prétendre à une admission exceptionnelle dès lors qu'il n'avait pas été en mesure de produire l'engagement de versement par son employeur de la taxe au profit de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que la demande complétée d'autorisation de travail pour un salarié étranger, trouve un fondement légal dans l'exercice par le préfet du pouvoir de régularisation discrétionnaire dont il dispose, ainsi qu'il a été dit au point 3 ci-dessus. Ce fondement légal peut être substitué au fondement erroné retenu par le préfet de Seine-et-Marne ainsi qu'il a été dit au point 4.
6. Il ressort des pièces versées au dossier que M.A..., qui réside en France depuis 2008, a séjourné régulièrement en France sous couvert d'un titre de séjour en qualité de conjoint de ressortissant français l'autorisant à travailler. A ce titre, il établit par la production de contrats de travail et de quelques bulletins de paie y afférents, avoir exercé une activité professionnelle auprès de différentes sociétés de nettoyage en qualité d'agent de service soit au titre de contrats de travail à durée déterminée, pour quelques jours et quelques heures hebdomadaires, soit au titre de contrats de travail à durée indéterminée, à temps partiel ou à temps complet, dont celui conclu avec la société SEMS, au demeurant non visé par les autorités compétentes à la date à laquelle il a déposé sa demande. Par suite, le fait que M. A...soit titulaire d'un contrat de travail n'est pas suffisant à lui seul pour justifier que sa situation sur le territoire français puisse être régularisée. M. A...ne peut davantage faire valoir la circonstance qu'il a travaillé jusqu'à 50 heures hebdomadaires, démontrant ainsi sa capacité et volonté d'intégration, étant, par ailleurs, observé que M. A...est divorcé et sans charge de famille en France et qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toutes attaches avec son pays d'origine où il a résidé jusqu'à l'âge de 34 ans. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour.
7. En second lieu, M.A..., qui n'a pas sollicité son admission au séjour au titre des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut utilement en invoquer le bénéfice.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Luben, président,
- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,
- Mme Bernard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2016.
Le rapporteur,
S. BONNEAU-MATHELOTLe président,
I. LUBEN
Le greffier,
A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA02627