Par un jugement n° 1919813/8 du 20 septembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé les arrêtés du 11 septembre 2019 et a enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 décembre 2019, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1919813/8 du 20 septembre 2019 du tribunal administratif de Paris dans toutes ses dispositions ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a reconnu comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 511-1-I et L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'il aurait dû examiner la possibilité de mettre en oeuvre une procédure de réadmission à destination de l'Italie dès lors que M. A..., qui n'a fait état de son titre de séjour italien que postérieurement à l'édiction de l'arrêté contesté, n'a jamais fait part de son souhait d'être réacheminé vers l'Italie ;
- les autres moyens soulevés par M. A... en première instance ne sont pas fondés.
La requête a été communiquée à M. A... qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 et modifiée par le règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le règlement (UE) n° 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 abrogeant le règlement (CE) n° 562/2006 établissant un code de l'Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant pakistanais, né le 1er janvier 1992 à Peshawar a été interpellé le 10 septembre 2019 à l'occasion d'un contrôle d'identité. Par deux arrêtés du 11 septembre 2019, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et a prononcé son encontre une interdiction de retour du territoire français pour une durée de douze mois. Le préfet de police relève appel du jugement du 20 septembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de M. A..., ses arrêtés du 11 septembre 2019.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
2. D'une part, en vertu du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dans plusieurs cas, notamment lorsqu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire ou qu'il s'y est irrégulièrement maintenu. Une telle mesure peut également être décidée, selon l'article L. 511-2 du même code, à l'égard de l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui n'a pas respecté les conditions d'entrée prévues dans le règlement n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 ou qui, en provenance directe d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen signée le 19 juin 1990, ne justifie pas être entré sur le territoire français ou s'y être maintenu conformément aux stipulations de cette convention.
3. D'autre part, l'article L. 531-1 du même code dispose que : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-2 à L. 512-5, L. 513-1 et L. 513-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 2121, L. 212-2, L. 311-1 et L. 3112 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne ". L'étranger est informé de cette remise par décision écrite et motivée et est mis à même de présenter des observations et d'avertir ou de faire avertir son consulat, un conseil ou toute personne de son choix avant l'exécution d'office de la remise. L'article L. 531-2 prévoit en ses deuxième, troisième et quatrième alinéas que de telles mesures de réadmission peuvent également être prises à l'encontre de l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux stipulations de cette convention que mentionne le deuxième alinéa de l'article L. 531-2, à l'encontre de l'étranger détenteur d'un titre de résident de longue durée-CE en cours de validité accordé par un autre Etat membre et qui n'a pas régularisé sa situation en France, enfin, à l'encontre de l'étranger détenteur d'une carte de séjour temporaire portant la mention " carte bleue européenne " en cours de validité accordée par un autre Etat membre de l'Union européenne lorsque lui est refusée en France la délivrance de la carte de séjour temporaire portant cette mention ou lorsque la " carte bleue européenne " qu'il détient expire ou lui est retirée durant l'examen de sa demande en France.
4. Selon l'avis n° 371994 du 18 décembre 2013 du Conseil d'Etat, il ressort de ces dispositions que le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre. Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 5311 ou des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 531-2, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagée l'autre. Cet avis précise que toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'Etat membre de l'Union Européenne ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une " carte bleue européenne " délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat.
5. Le préfet de police a pris à l'encontre de M. A... une obligation de quitter le territoire français, sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que l'intéressé ne pouvait justifier être entré régulièrement sur le territoire français et était dépourvu de titre de séjour en cours de validité. Le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cette décision et, par voie de conséquence, les décisions portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, fixation du pays de destination et interdiction de retour du territoire français pour une durée de douze mois au motif que M. A... disposant d'un titre de séjour en cours de validité expirant le 24 avril 2024 et ayant fait part aux services de police de son souhait d'être reconduit en Italie, le préfet de police ne pouvait, sans entacher sa décision d'une erreur de droit, obliger M. A... à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du I) de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans examiner s'il pouvait faire l'objet d'une procédure de réadmission.
6. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui est titulaire d'un titre de séjour italien en cours de validité, entrait dans le champ d'application des mesures de réadmission prévues aux articles L. 531-1 et L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressé n'est ni titulaire d'un titre de résident longue durée-CE ni d'une carte de séjour temporaire portant la mention " carte bleue européenne ". En outre, il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de l'audition de M. A... du 11 septembre 2019 que l'intéressé, qui a été invité à formuler toute observation utile et pertinente sur sa situation, n'a pas mentionné qu'il détenait un titre de séjour italien ni fait part de sa volonté de demander sa réadmission vers l'Italie, que l'intéressé a, au contraire, indiqué aux forces de l'ordre qu'en cas d'édiction d'une mesure d'éloignement à son encontre, il n'accepterait pas de quitter le territoire français. Dans ces conditions, et alors même que le titre de séjour italien de M. A... n'a été porté à la connaissance de l'autorité administrative par l'intéressé que le 15 septembre 2019, il n'appartenait pas au préfet de police d'examiner s'il y avait lieu de réadmettre M. A... en Italie. Au demeurant et en tout état de cause, il ressort des pièces produites en appel que le préfet de police a engagé le 19 septembre 2019 une procédure de remise de l'intéressé aux autorités italiennes et a obtenu le 20 septembre 2019 leur accord en vue de sa réadmission. Par suite, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé pour erreur de droit sa décision du 11 septembre 2019.
7. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Paris :
- En ce qui concerne les moyens communs aux décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi :
8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) ".
9. La décision contestée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et notamment le 1° du I de l'article L. 511-1. Elle précise que M. A..., de nationalité pakistanaise, ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et est actuellement dépourvu de titre de séjour en cours de validité, que l'intéressé ne s'est pas conformé aux dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, s'agissant de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, le préfet de police a précisé qu'il existait un risque que M. A... se soustrait à l'obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre dès lors qu'il ne pouvait justifier être entré régulièrement en France, qu'il ne justifie pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il a communiqué des renseignements inexacts et qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale et dès lors qu'il a explicitement fait part de son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. De même, la décision précise que compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale dès lors qu'il se déclare célibataire et sans charge de famille. Enfin, s'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, la décision relève que l'intéressé n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine ou dans le pays de résidence habituelle où il est effectivement réadmissible. Dans ces conditions, les décisions portant obligation de quitter le territoire français refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et fixation du pays de renvoi comportent l'énoncé suffisant des considérations de droit et de fait au sens des dispositions précitées et doivent être regardées comme étant suffisamment motivées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions contestées doit être écarté comme manquant en fait.
10. En second lieu, M. A... soutient que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen sérieux de sa situation notamment en ce qui concernait la possibilité de le réadmettre en Italie. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, le préfet de police n'était pas tenu, préalablement à l'édiction de la décision portant obligation de quitter le territoire français, d'examiner la possibilité de réadmettre M. A... en Italie. En outre, il ressort des pièces du dossier et en particulier des termes des décisions en litige que le préfet de police a procédé à un examen complet de la situation de l'intéressé avant de prendre les décisions contestées.
- En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 511-2 de ce code : " Le 1° du I et le a du 3° du II de l'article L. 511-1 sont applicables à l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne : (...) 2° Si, en provenance directe du territoire d'un Etat partie à la convention précitée signée à Schengen le 19 juin 1990, il ne peut justifier être entré sur le territoire métropolitain en se conformant aux stipulations de ses articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, et 21, paragraphe 1 ou 2, de cette même convention ". Aux termes de l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990 et modifiée en dernier lieu par l'article 2 du règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties Contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pour une durée n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours sur le territoire des autres Parties Contractantes, pour autant qu'ils remplissent les conditions d'entrée visées à l'article 5, paragraphe 1, points a), c) et e), du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (...) ". Aux termes de l'article 6 du règlement (UE) n° 2016/399 du Parlement européen et du Conseil du 9 mars 2016 qui reprend les dispositions de l'article 5 du règlement (CE) n° 562/2006 : " 1. Pour un séjour prévu sur le territoire des États membres, d'une durée n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours, ce qui implique d'examiner la période de 180 jours précédant chaque jour de séjour, les conditions d'entrée pour les ressortissants de pays tiers sont les suivantes : a) être en possession d'un document de voyage en cours de validité autorisant son titulaire à franchir la frontière qui remplisse les critères suivants : i) sa durée de validité est supérieure d'au moins trois mois à la date à laquelle le demandeur a prévu de quitter le territoire des États membres. Toutefois, en cas d'urgence dûment justifiée, il peut être dérogé à cette obligation ; ii) il a été délivré depuis moins de dix ans ; (...) / c) justifier l'objet et les conditions du séjour envisagé, et disposer de moyens de subsistance suffisants, tant pour la durée du séjour envisagé que pour le retour dans leur pays d'origine ou le transit vers un pays tiers dans lequel leur admission est garantie, ou être en mesure d'acquérir légalement ces moyens / e) ne pas être considéré comme constituant une menace pour l'ordre public, la sécurité intérieure, la santé publique ou les relations internationales de l'un des États membres et, en particulier, ne pas avoir fait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans les bases de données nationales des États membres pour ces mêmes motifs. ".
12. M. A... soutient que, en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de police aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen dès lors que justifiant d'un titre de séjour en cours de validité, délivré par les autorités italiennes et de moyens de subsistance suffisants, il pouvait circuler librement sur le territoire français pour une durée n'excédant pas 90 jours. Toutefois l'intéressé ne justifie pas d'un document de voyage en cours de validité tel qu'exigé par les stipulations précitées. En outre, il ressort des pièces du dossier, en particulier du procès-verbal d'audition, que M. A... a déclaré être sans domicile fixe et sans ressources. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen doit être écarté.
13. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 du présent arrêt, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, en l'obligeant à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
- En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
14. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire doit être écartée.
15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) / L'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ; / (...) h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. ".
16. M. A... fait valoir que c'est à tort que le préfet de police lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire dès lors qu'il justifiait d'un titre de séjour italien en cours de validité ainsi que de garanties de représentation suffisantes dès lors qu'il dispose d'une adresse stable. Toutefois, si M. A... justifie d'un titre de séjour en cours de validité, délivré par les autorités italiennes, il est constant que l'intéressé ne justifie d'aucun document de voyage. En outre, et même à supposer établie la circonstance qu'il serait hébergé chez un ami, ce qui ne constitue au demeurant pas un hébergement stable au sens des dispositions précitées de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort du procès-verbal d'audition, sans que ces éléments ne soient contestés par l'intéressé, que M. A... a communiqué aux services de police des informations inexactes sur son identité et a fait part de son intention de ne pas se conformer à la mesure d'éloignement qui pourrait être prise à son encontre. Dans ces conditions, le préfet de police pouvait, sans commettre d'erreur de droit, refuser à M. A... l'octroi d'un délai de départ volontaire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sera écarté.
17. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, en lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
- En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
18. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi doit être écartée.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Ou, en application d'un accord ou arrangement de réadmission communautaire ou bilatéral, à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; / 3° Ou, avec son accord, à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
20. M. A... soutient que le préfet de police ne pouvait fixer le Pakistan comme pays de renvoi dès lors qu'il y court des risques pour sa vie, d'ailleurs reconnus par les autorités italiennes qui lui ont accordé le bénéfice de la protection subsidiaire. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier des termes de la décision contestée que M. A..., qui n'a jamais fait part aux autorités administratives de la circonstance qu'il détenait un titre de séjour italien en cours de validité délivré au titre de la protection subsidiaire, " sera éloigné à destination du pays dont il a la nationalité ou qui lui a délivré un titre de voyage en cours de validité ou encore tout autre pays dans lequel il établit être légalement admissible ", que le préfet de police s'est donc conformé aux dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour. Au demeurant et en tout état de cause, il ressort des pièces produites en appel que le préfet de police a engagé le 19 septembre 2019 une procédure de remise de l'intéressé aux autorités italiennes et a obtenu le 20 septembre 2019 leur accord en vue de sa réadmission. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sera écarté.
- En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour du territoire français :
21. Aux termes de l'article III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'aile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".
22. En premier lieu, pour les motifs exposés ci-dessus, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, refus d'octroi d'un délai de départ volontaire et fixation du pays de destination n'étant entachées d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français, doit être écarté.
23. En deuxième lieu, la décision prononçant l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois à l'encontre de M. A... vise l'article L. 511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort également des termes de cette décision que le préfet de police a, pour fixer la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français, relevé que l'intéressé, qui a déclaré être entré en France depuis trois jours, ne peut être regardé comme se prévalant de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France dès lors que l'intéressé se déclare célibataire et sans enfant à charge. La décision est ainsi motivée au regard des critères tenant à la durée de la présence de l'intéressé sur le territoire français et à l'ancienneté des liens qu'il a entretenus avec la France. De même, il ressort des termes de la décision contestée que le préfet de police n'a pas entendu lui opposer l'existence d'une précédente mesure d'éloignement ni celle d'une menace à l'ordre public et que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Par ailleurs, le préfet de police n'est pas tenu d'indiquer les raisons pour lesquelles aucune circonstance humanitaire ne ressortait de la situation de l'intéressé. Dans ces conditions, et dès lors que la décision en litige comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fonde, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation sera écarté comme manquant en fait.
24. En troisième lieu, M. A... soutient que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois sur sa situation personnelle dès lors qu'impliquant un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, ce signalement aura des conséquences préjudiciables pour son droit au séjour dès lors qu'elle pourra impliquer un retrait de son titre de séjour par l'Italie. En outre, M. A... fait valoir qu'il justifie de circonstances humanitaires dès lors qu'il bénéficie d'un titre de séjour en Italie et que celui-ci lui a été délivré au titre de l'asile.
25. D'une part, la circonstance qu'il soit titulaire d'un titre de séjour italien ne fait pas obstacle à ce que le préfet de police prenne à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français dès lors qu'une telle décision, même si elle s'accompagne d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, n'implique pas nécessairement le retrait de son titre de séjour par les autorités italiennes, ni qu'il soit empêché d'accéder au territoire italien ou qu'il ne puisse y être admis, l'Italie ayant, par ailleurs, donné son accord le 20 septembre 2019 en vue de la réadmission de M. A.... D'autre part, M. A..., dont la seule détention d'un titre de séjour italien au titre de l'asile ne saurait constituer une circonstance humanitaire, ne justifie pas d'une ancienneté sur le territoire français, l'intéressé ayant déclaré être entré sur le territoire français trois jours avant son interpellation. En outre, M. A... ne justifie d'aucune attache en France, le requérant étant célibataire et sans charge de famille sur le territoire français. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, en prononçant à son encontre une interdiction de retour du territoire français pour une durée de douze mois, aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle. Par suite, le moyen sera écarté.
26. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé les arrêtés du 11 septembre 2019 et lui a enjoint de délivrer à M. A... un titre de séjour.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1919813/8 du 20 septembre 2019 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris, tendant à l'annulation des arrêtés du 11 septembre 2019, est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Luben, président de la formation de jugement,
- Mme B..., premier conseiller,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 avril 2021.
Le président de la formation de jugement,
I. LUBEN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA04239