Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 avril 2015 et des mémoires enregistrés les 11 septembre 2015 et 14 mars 2016, Mme A..., représentée par la Selarl Raphaële Charlier, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1400114/1 du 11 décembre 2014 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision en date du 2 décembre 2013 par laquelle le président du gouvernement l'a titularisée dans le corps des infirmiers anesthésistes, au grade normal de deuxième classe 1er échelon relevant du statut particulier des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie, en tant que ce reclassement n'a été opéré qu'au 1er échelon de son grade ;
3°) de mettre à la charge du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie le versement de la somme de 1 100 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté litigieux ne prend pas en compte, à titre de bonification d'ancienneté, la formation qu'elle a effectuée en métropole pendant près de deux ans, en méconnaissance des dispositions de l'article 16 de la délibération n° 350 du 30 décembre 2002 et de l'article 31 de la délibération n° 133/CP du 27 février 2004 ;
- de nombreux arrêtés ont accordé une bonification d'ancienneté à des cadres de santé ayant effectué des formations en métropole ;
- c'est sur décision du directeur du centre hospitalier territorial du 16 juillet 2010 qu'elle a été autorisée à suivre une formation ;
- jusqu'en avril 2013, les fonctionnaires ayant suivi une formation avec des résultats satisfaisants ont bénéficié de la bonification d'ancienneté prévue à l'article 16 de la délibération du 30 décembre 2002 ;
- en application du principe de la confiance légitime, l'administration ne saurait modifier l'interprétation d'une disposition réglementaire et restreindre abusivement les droits des agents, alors que l'esprit du texte est d'encourager les agents à suivre des formations professionnelles ;
- le motif invoqué par l'administration pour justifier le rejet de prise en compte de la bonification de formation de l'intéressée est constitutif d'une erreur manifeste d'appréciation ; le changement de corps n'a rien à avoir avec la bonification d'ancienneté ;
- l'administration commet une erreur de droit en lui opposant la circonstance qu'elle a pu accéder à un corps hiérarchiquement supérieur au corps dont elle est issue grâce à cette formation ;
- la circulaire du 30 juin 2014 du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ayant pour objet de préciser les conditions d'octroi des bonifications d'ancienneté ajoute de nouvelles conditions à celles prévues par l'article 16 de la délibération du 30 décembre 2012 ; le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a ainsi outrepassé ses compétences ; la compétence de principe appartient au congrès s'agissant des règles relatives au statut de la fonction publique ;
- que l'administration a commis un détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2015, et un autre mémoire enregistré le 16 octobre 2015, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par ordonnance du 15 mars 2016, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 mai 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 350 du 30 décembre 2002 fixant les conditions et modalités de prise en charge des frais de formation des agents titulaires et non titulaires de la fonction publique ;
- la délibération n° 133/CP du 27 février 2004 portant statut particulier des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stoltz-Valette,
- et les conclusions de M. Blanc, rapporteur public.
1. Considérant que MmeA..., infirmière diplômée d'Etat, a été autorisée par le directeur général du centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie à suivre une formation d'infirmier anesthésiste à Grenoble à compter du 1er octobre 2010 pour une durée de deux ans ; que, recrutée en qualité d'infirmière anesthésiste stagiaire à compter du 22 octobre 2012 par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, Mme A...a, par courrier du 12 juillet 2013, sollicité l'attribution d'une bonification d'ancienneté équivalente à la durée des études suivies au titre de la formation effectuée à Grenoble ; que, par un arrêté du 2 décembre 2013, elle a été titularisée au grade normal de deuxième classe 1er échelon à l'indice brut 440 à compter du 22 octobre 2013 ; qu'elle relève appel du jugement du 11 décembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, en tant qu'il l'a classée au grade normal de deuxième classe 1er échelon relevant du statut particulier des personnels paramédicaux de Nouvelle-Calédonie ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la délibération n° 350 du 30 décembre 2002 : " Les fonctionnaires, stagiaires ou titulaires, autorisés à suivre des formations d'une durée supérieure à 30 jours consécutifs en Nouvelle-Calédonie, en métropole ou à l'étranger, peuvent bénéficier d'une bonification d'ancienneté, si les résultats obtenus sont satisfaisants. (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que si l'octroi d'une bonification d'ancienneté pour l'accomplissement d'un stage de formation professionnelle est subordonné à l'obtention, par le fonctionnaire intéressé, de résultats satisfaisants à l'issue dudit stage, la circonstance que cette condition soit remplie n'entraîne aucune obligation à la charge de l'administration ; que celle-ci au contraire, peut se fonder, sous le contrôle du juge de l'excès du pouvoir, sur tout motif lui paraissant de nature à justifier le rejet de la demande dont elle est saisie aux fins considérées, dès lors qu'en retenant un tel motif elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, d'une erreur de droit, de fait ou d'un détournement de pouvoir ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour justifier son refus d'octroyer à Mme A...le bénéfice des dispositions précitées, l'administration s'est fondée sur la circonstance que la formation suivie et réussie par l'intéressée à Grenoble lui avait permis d'être recrutée sur titre dans le corps des infirmiers anesthésistes, hiérarchiquement plus élevé que le corps des infirmiers dont elle était issue ; qu'ainsi, en opposant à Mme A...le caractère satisfaisant des résultats obtenus par cette dernière pour lui refuser la bonification d'ancienneté qu'elle sollicitait, l'administration a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie le versement de la somme de 1 100 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1400114/1 du 11 décembre 2014 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et la décision du 2 décembre 2013 en tant qu'elle lui refuse une bonification d'ancienneté sont annulés.
Article 2 : La Nouvelle-Calédonie versera à Mme A...une somme de 1 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Copie en sera adressée au centre hospitalier territorial de Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Dalle, président,
- Mme Notarianni, premier conseiller,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.
Le rapporteur,
A. STOLTZ-VALETTELe président,
D. DALLE
Le greffier,
C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre des outre mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15PA01572