Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2021 sous le n° 21PA00405, M. A..., représenté par Me David, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2009077 du 24 décembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 29 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de sa demande d'asile dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une attestation de demande d'asile et un formulaire de demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement n'est pas signé et est intervenu plus de quinze jours après la saisine du Tribunal ;
- l'arrêté attaqué émane d'une autorité incompétente ;
- il est insuffisamment motivé et se trouve entaché d'un défaut d'examen ;
- l'arrêté attaqué a été pris en violation des articles 4 et 5 du règlement 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- il a été pris en violation des articles 3, 6 et 8 du même règlement ;
- c'est à tort que le recours à l'interprète a eu lieu par téléphone ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement mentionné ;
- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observation.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2021/005165 du 22 février 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
II. Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2021 sous le n° 21PA00406, M. A..., représenté par Me David, demande à la Cour :
1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun n° 2009077 en date du 24 décembre 2020 et de l'arrêté de transfert du 29 septembre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- le jugement n'est pas signé et est intervenu plus de quinze jours après la saisine du Tribunal ;
- l'arrêté attaqué émane d'une autorité incompétente ;
- il est insuffisamment motivé et se trouve entaché d'un défaut d'examen ;
- il a été pris en violation des articles 4 et 5 du règlement 604/2013 ;
- il a été pris en violation des articles 3, 6 et 8 du même règlement ;
- c'est à tort que le recours à l'interprète a eu lieu par téléphone ;
- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement mentionné ;
- il a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit d'observation.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2021/005166 du 22 février 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
Les parties ont été informées par la Cour, dans les instances mentionnées, que les décisions à intervenir étaient susceptibles d'être fondées sur un moyen relevé d'office, tiré du défaut d'objet des requêtes visées ci-dessus à raison de l'expiration du délai de transfert en cause au terme du délai de six mois suivant la notification du jugement entrepris.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi sur l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Simon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes de M. A... tendent à l'annulation et au sursis à exécution du même jugement, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
2. M. A..., ressortissant afghan demande à la Cour l'annulation du jugement du 24 décembre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Melun a rejeté le recours formé contre la décision préfectorale du 29 septembre 2020, désignant les autorités allemandes responsable de l'examen de sa demande d'asile et décidant son transfert à ces autorités, ainsi que l'annulation de ladite décision.
3. Aux termes de l'article 29, paragraphe 1, du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".
4. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code applicable au litige : " (...) II. - Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert ou lorsque celle-ci est notifiée alors que l'étranger fait déjà l'objet d'une telle décision de placement en rétention ou d'assignation à résidence, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévu au III de l'article L. 512-1. (...) ".
5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date de notification à l'autorité administrative du jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.
6. Il ressort des pièces du dossier que le délai de six mois prévu par l'article 29 du règlement susvisé n° 604/2013, interrompu par la saisine du tribunal administratif de Melun le 6 novembre 2020, a recommencé à courir à la date de notification du jugement du 24 décembre 2020 du Tribunal au préfet du Val-de-Marne, intervenue le même jour. Le préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense, ne s'est pas prévalu, dans ce délai, d'un autre motif d'interruption ou d'un motif de prorogation. Dans ces conditions, la France étant devenue responsable de la demande d'asile formée par M. A... le 24 juin 2020, la décision de transfert du 29 septembre 2020 n'est plus susceptible de recevoir exécution.
7. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a plus lieu, pour la Cour, de statuer sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 29 septembre 2020, ni sur celles tendant à l'annulation ou au sursis à exécution du jugement du 24 décembre 2020.
Sur les frais liés aux litiges :
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés à l'occasion des présentes instances par M. A... ou son conseil et non compris dans les dépens.
D E C I D E
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation et d'injonction de la requête n° 21PA00405 visée ci-dessus de M. A....
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution de la requête n° 21PA00406 visée ci-dessus de M. A....
Article 3 : Les conclusions présentées pour M. A... au titre des requêtes visées ci-dessus sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Soyez, président assesseur,
- M. Simon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 5 novembre 2021.
Le rapporteur,
C. SIMONLe président,
S. CARRERE La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA00405, 21PA00406