Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 février 2018, la SELARL Gauthier-Sohm, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Avenir Energie, représentée par Me Naim, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1503722 du 21 décembre 2017 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) de prononcer la décharge de l'amende litigieuse ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les vérifications de comptabilité se rapportant à la période du 1er mars 2011 au 30 juin 2011 et à la période postérieure au 1er mars 2012 sont irrégulières ;
- l'administration ne démontre pas que les factures litigieuses, qu'elle a refusé de prendre en compte pour le calcul de sa taxe déductible, auraient eu le caractère de factures de complaisance ;
- la qualification de factures de complaisance a été écartée par le juge pénal ;
- dans un arrêt du 25 janvier 2018, la Cour administrative d'appel de Paris a admis que la taxe facturée par les agents commerciaux auxquels elle recourait était déductible ;
- que s'agissant de la société " To Be Continued ", elle n'avait aucune connaissance de ce que cette société pouvait ne pas être le réalisateur de la prestation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que :
- les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition sont inopérants ;
- l'amende n'est maintenue qu'en ce qui concerne les sommes versées à la société To Be Continued ;
- l'amende restant en litige, assise sur les sommes versées à la société To Be Continued, est fondée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Dalle,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que la société Avenir Energie relève appel du jugement en date du 21 décembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge de l'amende d'un montant de 744 110 euros à laquelle elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 28 février 2011, sur le fondement du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts ;
Sur l'étendue du litige :
2. Considérant que, par décision en date du 2 juillet 2018, postérieure à l'introduction de la présente requête d'appel, le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a dégrevé à hauteur de la somme de 276 631 euros l'amende mise à la charge de la société Avenir Energie ; que les conclusions en décharge de la société Avenir Energie sont donc, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur l'amende restant en litige :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 1737 du code général des impôts : " I. - Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : /1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom (...) " ;
4. Considérant que la société Avenir Energie exerçait une activité de vente d'installation de pompes à chaleur et de panneaux photovoltaïques ; qu'elle recourait à des agents commerciaux pour commercialiser ses produits auprès de sa clientèle de particuliers ; qu'il ressort de la proposition de rectification du 1er décembre 2011, consécutive à la vérification de comptabilité ayant porté sur la période du 1er octobre 2009 au 28 février 2011, que l'administration a refusé à la société Avenir Energie le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures d'honoraires établies par les agents commerciaux et rejeté par voie de conséquence les demandes de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée présentées par la société Avenir Energie, au motif que ces factures étaient de complaisance ; que, pour le même motif, l'administration a mis à la charge de la société Avenir Energie l'amende prévue par les dispositions précitées de l'article 1737 du code général des impôts ; que, compte tenu du dégrèvement prononcé au point 2 qui précède, le litige ne porte plus que sur la fraction de l'amende correspondant aux sommes versées à la société To Be Continued, laquelle serait intervenue en qualité d'agent commercial au profit de la société Avenir Energie ;
5. Considérant que le moyen tiré de ce que les vérifications de comptabilité se rapportant à la période du 1er mars 2011 au 30 juin 2011 et à la période postérieure au 1er mars 2012 seraient entachées d'irrégularités est inopérant et ne peut qu'être écarté, dès lors que l'amende en litige ne procède pas de ces vérifications mais, comme il a été dit, de la vérification de comptabilité ayant porté sur la période du 1er octobre 2009 au 28 février 2011 ;
6. Considérant qu'il appartient à l'administration, lorsqu'elle a mis en recouvrement une amende fiscale sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1737, d'apporter la preuve que les faits retenus à l'encontre du redevable entrent bien dans leurs prévisions ; que l'administration a relevé dans la proposition de rectification du 1er décembre 2011 que la société To Be Continued ne disposait d'aucun salarié et d'aucune ligne téléphonique et que son siège social à Paris était une domiciliation commerciale ; que, par ces éléments, qui ne sont pas contestés par la société requérante, l'administration établit que la société To Be Continued n'a pu réaliser elle-même les prestations de démarchage qu'elle a facturées à la société Avenir Energie et que celle-ci ne pouvait l'ignorer ; qu'elle établit par suite le bien-fondé de l'amende assignée à la société Avenir Energie, en application des dispositions précitées du 1 du I de l'article 1737 du code général des impôts ;
7. Considérant que les extraits que cite la société requérante d'un jugement rendu le 24 avril 2017 par le tribunal correctionnel de Meaux ne font pas apparaître que les factures émises par la société To Be Continued n'auraient pas eu le caractère de factures de complaisance ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Avenir Energie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté le surplus de sa demande en décharge de l'amende en litige ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Avenir Energie sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Avenir Energie est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Gauthier-Sohm, en qualité de mandataire liquidateur de la société Avenir Energie et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 25 octobre 2018 à laquelle siégeaient :
M. Jardin, président de chambre,
M. Dalle, président assesseur,
Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 novembre 2018.
Le rapporteur, Le président,
D. DALLE C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA00459