Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2018, MmeA..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 1700144 du 19 octobre 2017 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie en tant qu'il a limité à 50 000 francs CFP le montant de l'indemnité qui lui a été allouée ;
2°) de condamner la Nouvelle-Calédonie à lui payer une indemnité de 3 447 934 F CFP en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi ;
3°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie la somme de 300 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en refusant de la recruter sur titre, alors qu'elle remplissait les conditions de diplôme nécessaires et que l'emploi qu'elle occupait ne pouvait être occupé que par un fonctionnaire, la Nouvelle-Calédonie a commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité ;
- le préjudice directement lié à cette faute doit être réparé par l'allocation d'une indemnité de 2 947 934 francs CFP au titre de la différence entre les rémunérations perçues en qualité d'agent contractuel, puis de stagiaire et celles qu'elle aurait perçues en qualité d'ingénieur 1er grade et de 500 000 francs CFP au titre du préjudice moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2018, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SELARL Milliard-Million, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 500 euros soit mis à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée relative à la Nouvelle-Calédonie ;
- l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 portant statut général des fonctionnaires des cadres territoriaux ;
- la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 portant droits et obligations des fonctionnaires territoriaux ;
- la délibération n° 230 du 13 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d'administration générale de la Nouvelle-Calédonie ;
- la délibération n° 74/CP du 12 février 2009 portant statut particulier des personnels techniques de la Nouvelle-Calédonie ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2018 :
- le rapport de M. Jardin,
- et les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public.
1. Considérant que le § 4 de l'article 12 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 dispose : " Les fonctionnaires sont gérés par l'autorité de la collectivité ou de l'établissement qui les emploie, sauf dans les cas suivants qui relèvent de l'Exécutif du Territoire : " (...) b) les nominations dans les corps ou les grades ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 23 de l'arrêté n° 1065 du 22 août 1953 : " " Les fonctionnaires sont recrutés suivant l'une ou suivant l'une et l'autre des modalités ci-après : (...) 2° - Pour l'accès à certains corps techniques, sur présentation par les candidats de titres ou diplômes énumérés limitativement par les statuts particuliers./ Les modalités pratiques des recrutements sur titre sont réglées par les statuts particuliers des corps intéressés qui pourront notamment prévoir, dans le cas d'une pluralité de candidatures, l'organisation d'épreuves de sélection. " ; qu'aux termes de l'article 11 de la délibération n° 74/CP du 12 février 2009 : " 1. Les ingénieurs 1er grade sont recrutés : a) par voie externe, sur titre parmi les titulaires d'un diplôme de niveau II en rapport avec les activités du domaine concerné ; (...) " ;
2. Considérant que l'Institut pour le Développement des Compétences en Nouvelle-Calédonie (IDC-NC), qui est un établissement public administratif, a recruté Mme A...comme chargée d'études au sein du service Observatoire de l'Emploi, de la Formation, des qualifications et des salaires, du 18 février 2013 au 17 février 2014, par un contrat à durée déterminée signé le 18 février 2013 faisant référence au lancement d'une enquête pour le compte de la Chambre d'agriculture de Nouvelle-Calédonie ; que l'établissement public a fait publier le 22 juillet 2013 un avis de vacance de poste en vue du recrutement, par voie de mutation d'un titulaire, d'un chargé d'études emploi et formation devant être titulaire du grade d'attaché du cadre d'administration générale ; que l'avis précisait qu'à défaut de candidatures de fonctionnaires correspondant au profil du poste, il pourrait être pourvu par le recrutement d'un agent contractuel, pour une durée déterminée n'excédant pas un an, dans les conditions prévues par l'article 11 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 ; que, constatant que cet avis de vacance avait été déclaré infructueux, l'IDC-NC, après avoir résilié le contrat en cours de MmeA..., d'un commun accord avec elle, l'a recrutée pour occuper cet emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire, par un contrat à durée déterminée signé le 3 septembre 2013, pour une période allant du 2 septembre 2013 au 1er septembre 2014 ; que ce recrutement d'un agent non titulaire, qui correspond au cas prévu par le b) de l'article 11 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990, n'est pas constitutif d'une illégalité fautive ;
3. Considérant que l'IDC-NC a fait publier le 16 janvier 2014 un avis de vacance de poste en vue du recrutement, par voie de mutation d'un titulaire ou de recrutement externe sur titre, d'un chargé d'études emploi et formation devant être titulaire du grade d'ingénieur, régi par le statut particulier des personnels techniques de la Nouvelle-Calédonie ; que l'avis précisait qu'à défaut de candidatures de fonctionnaires correspondant au profil du poste, il pourrait être pourvu par le recrutement d'un agent contractuel, pour une durée déterminée n'excédant pas un an, dans les conditions prévues par l'article 11 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 ; que, constatant que cet avis de vacance avait été déclaré infructueux, l'IDC-NC a recruté Mme A...pour occuper cet emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire, par un contrat à durée déterminée signé le 18 juillet 2014, pour une période allant du 2 septembre 2014 au 1er septembre 2015 ; que ce recrutement d'un agent non titulaire, qui correspond au cas prévu par le b) de l'article 11 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990, n'est pas non plus constitutif d'une illégalité fautive ;
4. Considérant que l'IDC-NC a fait publier le 22 mai 2015 un avis de vacance ayant le même contenu que celui du 16 janvier 2014, qui a également été déclaré infructueux, ce qui a conduit à la prolongation jusqu'au 1er septembre 2016 du contrat de MmeA... par un avenant signé le 19 août 2015 ; que le secrétaire général du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, dans une lettre datée du 30 décembre 2015, a fait savoir au directeur de l'IDC-NC qu'il n'était pas possible de nommer Mme A...ingénieur 1er grade dès lors que le diplôme dont elle est titulaire ne le permet pas ; que le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, par un jugement lu le 3 novembre 2016 devenu définitif, a annulé la décision contenue dans cette lettre au motif qu'elle était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article 11 de la délibération n° 74/CP du 12 février 2009 ; que l'annulation de cette décision, compte tenu de son motif, impliquait seulement le réexamen par le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie de la candidature de MmeA..., dans l'hypothèse toutefois où l'IDC-NC n'ait pas abandonné son projet de recrutement d'un ingénieur titulaire ; que MmeA..., qui a réussi le concours donnant accès au grade des attachés d'administration du cadre d'administration générale de la Nouvelle-Calédonie au mois de juin 2015, a été nommée attaché d'administration du cadre d'administration générale de la Nouvelle-Calédonie à compter du 1er mars 2016, par un arrêté n° 2016/1554 GNC-Pr du 9 février 2016, et placée en position d'activité pour servir sous l'autorité du directeur de l'IDC-NC ; que comme l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif, l'illégalité fautive de la décision annulée par le jugement lu le 3 novembre 2016 ne présente pas un lien direct de causalité avec le préjudice financier dont Mme A...demande la réparation, à savoir la différence entre sa rémunération d'attaché et celle qu'elle aurait perçue si elle avait été nommée au grade d'ingénieur ;
5. Considérant que Mme A...n'avance aucune élément de nature à établir que le Tribunal administratif n'a pas fait une juste appréciation de son préjudice moral en le limitant à la somme de 50 000 francs CFP ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au même titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Délibéré après l'audience du 15 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 novembre 2018.
L'assesseur le plus ancien,
D. DALLELe président-rapporteur
C. JARDIN
Le greffier,
C. BUOT
La République mande et ordonne à la ministre des outre-mer en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 18PA00332